CCC 2010 (CCV...)
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Courmayeur:
Arrivée de bon matin sous un ciel assez bas, mais pas vraiment menaçant, et une température plutôt clémente. Le départ ne sera donné que dans près de 3h, alors je prends mon temps et en profite pour refaire un petit somme... 1h avant le début de la course je commence tranquillement à me préparer puis je me dirige vers la ligne de départ distante de'1 km du centre sportif. Il y a beaucoup de monde dans les rues malgré l'heure matinale, l'ambiance est pour le moment bonne. Au fil des minutes la tension monte en même temps que le plafond s'abaisse. Il ne fait déjà plus guère de doute que nous aurons droit à la pluie. Je m'abrite dans l'entrée d'un bâtiment juste à coté de la dépose des sacs quand la pluie fait son apparition. Nous sommes à 30 minutes du départ et l'ambiance est maintenant franchement plombée. A un quart d'heure je me resouds à rejoindre la longue cohorte des trailers qui attendent le départ sous une pluie continue mais légère, mais 5' plus tard c'est le début du déluge: Plus de doutes à avoir, je sors de mon sac ma veste de pluie (dont j'ai déjà pu tester l'efficacité lors de la traversée Verbier - Saint-Bernard...) et j'attends impatiemment le départ. A 10h pile le départ est donnée dans une grosse ambiance malgré le temps déplorable...
Courmayeur-Bertone:
Le départ dans Courmayeur est très agréable, je me suis délibérément placé en milieu de peloton pour ne pas être tenté de partir trop vite. Le rythme est donc relativement lent et me permet de profiter des rues et des gens massés sur le nord pour nous encourager. Cette première partie n'est qu'une longue ascension de près de 17km, elle doit me servir "d'échauffement" et me permettre d'arriver au sommet très frais. La route puis les chemins sont relativement large pour le moment et me permette de remonter tranquillement une partie des concurrents sur cette partie très roulante, par contre au niveau du temps, après une courte accalmie d'une dizaine de minutes, la pluie fait son retour accompagnée de 2 ou trois coups de tonnerre. Petit à petit le chemin se rétrécit et au bout d'une petite heure apparait le premier "single track" accompagné de son premier bouchon. Le reste de la montée jusqu'à Bertone se fera donc au train, quasi impossible de doubler sauf à prendre des risques, ou alors en coupant droit dans la pente comme quelques abrutis copieusement sifflés et hués par le reste du troupeau...
Après la barrière de pointage, je zappe le premier ravitaillement (bondé!!!) comme j'en ai pris l'habitude et continue vers le sommet.
02h02'30" 890è
Distance depuis le départ : 12.30 km
Altitude : 1989 m
Dénivelé positif depuis le départ : 797 m Dénivelé positif depuis Départ : 797 m
refuge Bertone - Tête de la Tronche
Il y a toujours beaucoup de monde dans cette partie, je sens que je suis toujours en sous-régime et c'est tant mieux. Je continue à boire et m'alimenter suivant le protocole que je me suis fixé: 2 bouches pleines de boissons énergétiques toutes les 12' et un gel ou une barre énergétique toutes les 45'. A cette altitude le vent est déjà assez fort et on supporte largement la veste dans les parties exposées. Les chemins sont détrempées et déjà ravagés par les coureurs qui me précèdent.
La progression est difficile et le paysage complétement obstrué par les nuages: pas vraiment ce dont j'avais rêvé pendant toute ma préparation, ici c'est déjà l'automne.... fin de montée tranquille et sommet atteint en 3h.
02:59:39 691è
Distance depuis le départ : 16.60 km
Distance depuis refuge Bertone : 4.30 km
Altitude : 2584 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1410 m Dénivelé positif depuis refuge Bertone : 613 m
Tête de la Tronche - refuge Bonatti
La pluie ayant eu la bonne idée de s'arrêter et étant maintenant à l'abri du vent, je prends 30" pour retirer ma veste avant d'entamer une descente rythmée mais sans excès: il reste encore 80km et au moins 17h de course... La fin de la descente roulante puis le chemin en balcon vers Bonatti rende cette partie de course agréable (j'aurais du plus en profiter...). Je progresse toujours à un rythme régulier et le temps qui se lève un petit peu nous permet de profiter en partie de la beauté des paysages du val Ferret Italien. Nouveau pointage sans arrêt à Bonatti avec toujours beaucoup de monde!!!
03:44:47 604
Distance depuis le départ : 22.10 km
Distance depuis Tête de la Tronche : 5.50 km
Altitude : 2010 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1513 m
Dénivelé positif depuis Tête de la Tronche : 103 m
refuge Bonatti - Arnuva
Nouvelle partie de chemins en balcons, le paysage devient vraiment sympa et par moment je me retrouve seul pour la première fois depuis le début de la course. Je m'aperçois que j'ai passé les 4h de course sans avoir ressenti mon fameux coup de pompe des 3h30~4h, c'est une excellente nouvelle: je dois avoir trouver le bon compromis dans mon alimentation et ma gestion de course pour rester efficace (enfin je le crois encore à ce moment là...) Les premiers signes de lassitude apparaissent alors, rien de bien grave, c'est même plutôt normal. Je conserve mon rythme qui me permet de récupérer des places des que le chemin est roulant. Ce début de course confirme que je suis définitivement plus a l'aise en descente et sur le plat que dans les montées. Au loin on entend les premiers encouragements des spectateurs masses a Arnuva, dernier point de passage de la course en Italie. L'ambiance est bonne et il n'y a pas trop de monde au ravitaillement. Je prends une petite dizaine de minutes pour boire (coca + eau gazeuse) et pour me ravitailler (banane, chocolat noir, pain d'épices). Je fais aussi remplir ma poche avec de l'eau alors que jusqu'à maintenant je tournais a l'isostar. C'est le premier tournant et ma seule erreur de la course. Mais a ce moment je n'ai aucune idée de l'impact que va avoir ce changement sur ma course...
04:29:17 528
Distance depuis le départ : 27.10 km
Distance depuis refuge Bonatti : 5.00 km
Altitude : 1769 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1633 m
Dénivelé positif depuis refuge Bonatti : 120 m
Arnuva - Grand Col Ferret
Je repars tranquillement a l'assaut du grand col Ferret, court mais vraiment pentu et surtout très expose au vent. Je monte donc a un rythme très cool, sachant que je souhaite arriver frais a Champex qui est encore a 28km... Le soleil fait son apparition pour la première et dernière fois de la journee: la vue sur les glaciers du val Ferret est magnifique, une des plus belles depuis que je fais de lla montagne! L'ascension est reguliere et le vent fait de nouveau son apparition raffraichissant rapidement la temperature. Je depasse (déjà!!!!) des trailers en difficulte avec des crampes, j'en vois aussi qui sont vraiment sous equipes. Tout ceux la je le sais n'iront pas au bout et risque de passer une bien mauvaise fin de journee...au detour d'une epingle on appercoit enfin le col qui finalement sera passe sans encombre.
05:49:06 540è
Distance depuis le départ : 31.40 km
Distance depuis Arnuva : 4.30 km
Altitude : 2537 m
Dénivelé positif depuis le départ : 2401 m
Dénivelé positif depuis Arnuva : 768 m
Grand Col Ferret - La Fouly
Je bascule dans la descente avec un moral gonfle a bloc: je sais que les 12 km qui viennent me sont particulierement favorable puisque c'est une partie qui se court. En plus je sais qu'a La Fouly m'attendent femme et enfants, je suis impatient de les voir. Je descends a un bon rythme, je reprends un bon paquet de coureur plus ou moins a l'aise dans ces longues portions de courses entrecoupees de quelques petis toboggan. Mais même si je mene grand train je sens que quelque chose ne collle pas: je continue a m'alimenter a la même frequence depuis le début et pourtant je me sens de moins en moins bien. Les jambes tournent bien, je dois etre a une FC largement en dessous des 70% , mais je me sens de plus en plus nauseeux, premier signe d'un coup de moins bien... C'est pas grave je savais que ce moment arriverai, je suis juste surpris qu'il arrive dans la partie ou je suis le plus a l'aise. Dans la descente qui nous mene a La Fouly je repere les chemins et paysages empruntes dans l'autre sens début juillet pour la traversée, je sais que je ne suis plus très loin, et après un dernier effort j'aperçois mes deux fils qui pour l'occasion portent des t-shirt ou ils ont inscrit des encouragements. Ils m'accompagnent ainsi que ma femme jusqu',au pointage, je les embrasse et leur donne rendez-vous a Champex pour ravitaillement complet prévu dans mon planning. Malgré les signaux d'alerte, je décide de suivre mon plan : je ne m'arrete pas au ravitaillement et repars aussi sec.
06:58:56 511è
Distance depuis le départ : 41.10 km
Distance depuis Grand Col Ferret : 9.70 km
Altitude : 1598 m
Dénivelé positif depuis le départ : 2540 m
Dénivelé positif depuis Grand Col Ferret : 139 m
La Fouly – Champex
Le début se fait dans des chemins de sous bois agréable mais déjà bien attaqués par les coureurs qui sont devant. Je suis inquiet pour le reste des coureurs de la CCC, mais surtout pour tous les participants de l’UTMB qui risque de trouver tout le parcours en bien piteux état… Les jambes tournent toujours super bien, par conter je sens maintenant clairement que quelque chose ne tourne pas rond, cela fait maintenant une heure que je n’ai rien avalé, il faut que je m’alimente mais cette idée ne fait qu’accentuer mon état nauséeux… mais c’est indispensable, je sens les cuisses se raidirent alors que le parcours est favorable et qu’au niveau cardiaque je suis vraiment facile. Je parviens à avaler un gel cacahouète qui sera mon dernier ravitaillement avant Champex. Il me permet de sauver les apparences pendant un petit moment, mais je le sais à ce moment là, je vais avoir une grosse défaillance : je cogite et me demande ou j’ai fait l’erreur. J’ai beau tout passer en revu, je n’arrive pas alors à voir ou. La seule bonne nouvelle c’est que sur cette partie du parcours on croise 4 ou 5 fois la route qui mène de La Fouly à Champex, et à chaque fois ma petite famille m’encourage chaleureusement. Les premieres fois je parviens à garder le sourire pour donner le change et ne pas les alerter sur mes inquiétudes et mon état, mais sur le dernière passage avant la montée sur Champex je suis déjà trop dans le dur pour pouvoir le masquer : mon fils ainé remarque bien que ma foulée est bien plus étriquée et mes traits doivent etre beaucoup moins détendus. J’attaque alors cette montée sur Champex, comme Hors d’œuvre de la nuit qui m’attends avec 3 montées annoncées chacune pour des raisons différentes comme éprouvantes. La pluie décide aussi de faire un retour en fanfare, et vu l’état du ciel, il ne s’agit pas d’une brève averse, je renfile donc ma veste que je ne quitterai plus jusqu’à la fin. Les jambes sont lourdes, les cuisses douloureuses, le moral en berne. J’avais prévu d’arriver à Champex frais et prêt à débuter réellement mon ultra, je risque plutôt d’y arriver cuit, trempé, démoralisé. Durant cette longue et très lente montée je tente de reprendre le dessus, je sais que je suis dans un (très) mauvais passage et que ca doit passer, je me rappelle la maxime que j’ai vue sur plusieurs panneaux depuis ce matin : « la douleur est passagère, l’abandon est irrévocable ». Et pourtant c’est bien de ca dont il s’agit : d’abandon. Je suis au fond, impossible de positiver, les cuisses sont douloureuses, j’ai les larmes au bord des yeux… Pendant plus d’une heure je vais subir cette montée sous la pluie, sans pouvoir me remettre en selle, sans pouvoir manger, juste en buvant de l’eau. Et c’est bien ca le problème : depuis 4 heures maintenant je ne bois que de l’eau et ca ne suffit pas, je suis en hypoglycémie, mais alors sévère. Mais sur le moment impossible de prendre autant de recul. Enfin, j’entends les bruits qui viennent du ravitaillement et à son approche j’aperçois mes proches maintenant accompagnés d’un de mes amis triathlète sur le bord du chemin. Pas besoin de parler, quand ils voient mon visage ils comprennent tout de suite : Le grand m’encourage et me dit que je vais pouvoir me reposer, le petit ne dit rien et c’est pire. Une fois que je serai arrivé au ravito il dira à ma femme : « il repart pas papa, on le ramène avec nous ! » : Je suis livide, marqué et abattu. Une fois sous la tente mon pote me fait assoir et commence par me demander de me taire quand je lui parle d’abandon. Il va me chercher un bol de soupe et me laisse récupérer. Je suis complètement hagard, il me faudra plus de 10’ avant de pouvoir reparler tranquillement et pouvoir avaler mon bol. A ce moment je suis toujours décider à ne pas repartir malgré le réconfort et les encouragements de mes proches. Je me change, remet des habits secs et retourne faire la queue pour un deuxième bol. Au passage je prends une banane et du pain et une compote, en même temps que je me réchauffe, que je récupère, mes réflexes de coureur reviennent, je me remet en mode ultra. De retour à la table je mange tranquillement et commence à envisager la possibilité de continuer. Les forces reviennent et dans le même temps les douleurs et la lassitude disparaissent. 45’ après mon arrêt je suis de nouveau prêt à repartir, je sais que la fin sera difficile, que je ne ferai pas un temps canon, mais je vais essayer d’aller au bout, au moins essayer.
08:52:37 423è
Distance depuis le départ : 55.10 km
Distance depuis La Fouly : 14.00 km
Altitude : 1477 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3103 m
Dénivelé positif depuis La Fouly : 563 m
Champex – Bovine
Je repars accompagnés de mon assistance qui reste avec moi le long des bords du lac, la pluie c’est finalement décidé à nous laisser un court répis, juste le temps de les embrasser et de rassurer mon petit. Cet arrêt a été vraiment bénéfique : contrairement à ce que je craignais je peux me remettre en footing à la sortie de la ville. Cette longue portion de faux plat descendant qui mène au pied de bovine me parait interminable, surtout que les coureurs sont maintenant beaucoup plus dispersés, j’ai l’impression que beaucoup profitent un maximum de la chaleur de la tente. En même temps que la nuit, la pluie fait un énième retour, accompagné du vent cette fois ci. Je mets en route ma frontale et j’arrive finalement au pied de bovine. Dès le début je vois que sa réputation n’est pas usurpé, ce col est une vraie vacherie, fait de grosse pierre obligeant à lever bien haut les pieds, à appuyer fort sur les cuisses et les batons. La pluie redouble et l’eau commence à dégringoler de partout. Il fait maintenant nuit noire, des petits groupes se forment au gré des passages difficiles. A l’approche des torrents le bruit ne trompe pas, il y a de l’eau, beaucoup d’eau… le premier passage se fait sur des pierres émergées, mais dans le deuxième il faut mettre les pieds dans l’eau. Je ne suis pas rassuré car il commence à y avoir du bouillon, mais bon, je traverse tant bien que mal, et me retrouve avec les pieds trempés et froids, comme je n’ai plus de chaussettes de rechange, ils le resteront jusqu’à Cham’. Le vent se renforce en même temps que l’on se rapproche du sommet. En haut c’est carrément la tempête, les 500m qui nous séparent du pointage se font avec le vent de face et la pluie qui arrive à l’horizontale rentre par la capuche : un vrai bonheur. J’arrive au ravitaillement sous le déluge, la tente est archi pleine. Tout le monde tente de se réchauffer à l’intérieur, impossible de rentrer. Je prends donc mon bol de soupe dehors avec l’eau qui coule depuis la toile de tente directement dedans : irréel. Autant dire que je ne m’attarde pas et repars illico vers Trient.
11:50:55 540è
Distance depuis le départ : 64.70 km
Distance depuis Champex : 9.60 km
Altitude : 1987 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3828 m Dénivelé positif depuis Champex : 725 m
Bovine – Trient
C’était dur avant, mais la ca devient infernal. En plus des conditions météo, le chemin est vraiment à la limite du praticable. Très dur de courir sur les 3 à 5cm d’eau qui recouvrent la boue… J’ai un nouvel ami dans cette descente : l’ennui. Je m’ennuie ferme, isolé dans ma capuche et dans mon faisceau de lummière, impossible de lever la tête pour essayer de distinguer les lumières de la vallée… c’est donc de relativement mauvaise humeur que j’arrive à Trient. En me dirigeant vers le ravito, je passe devant le centre de secours : il y a la queue jusque dehors… Une fois au chaud je reprends un bol de soupe et trouve une place pour m’assoir, je demande à mon voisin si il sait qui est en tête de l’UTMB qui s’est élancé à 18h30. Il me répond que l’organisation vient d’annoncer son annulation. Je suis abasourdi, c’est impossible, il a mal compris. Mais non, le speaker nous annonce qu’effectivement en raison des conditions meteo épouvantables au col de la Seigne notamment, l’UTMB est purement annulé et que le départ de la TDS est repoussé ! C’est un vrai choc, je pense tout de suite à mon pote qui se presentait pour la 3ème fois de suite au départ, et qui après 2 échecs voulait coute que coute aller au bout cette année, dur, dur… Après un nouveau bol de bouillon, je renfile le sac et repars affronter la pluie.
13:06:39 507è
Distance depuis le départ : 71.10 km
Distance depuis Bovine : 6.40 km
Altitude : 1300 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3908 m
Dénivelé positif depuis Bovine : 80 m
Trient – Catogne
Avant dernière difficulté, la montée vers Catogne. C’est une montée courte mais bien raide. En plus de la pluie, de la fatigue, de l’ennui et de la douleur, le froid fait son apparition. Je suis trempé jusqu’aux os et mon faible rythme de montée ne me permet pas de me réchauffer malgré mes 3 couches… La montée jusqu’aux Tseppes est interminable, mais le passage jusqu’à Catogne sera pire. De nouveau face à la tempête, sans moyen de s’habriter, je commence vraiment à trouver le temps long… et surtout de nouveau qu’est ce que je m’ennuie ! Nouvelle désillusion en arrivant au pointage, ici pas de bouillon juste un petit abris ouvert aux vents, avec quelques bénévoles qui essaient de se réchauffer autour d’un feu. Vraiment pas de quoi s’arrêter, mêmes quelques instants.
14:49:44 478è
Distance depuis le départ : 75.90 km
Distance depuis Trient : 4.80 km
Altitude : 2027 m
Dénivelé positif depuis le départ : 4657 m
Dénivelé positif depuis Trient : 749 m
Catogne – Vallorcine
Dans la descente c’est carrément du délire, de la boue jusqu’au cheville, un vent terrible et surtout j’ai froid, de plus en plus. Je n’arrive pas à me réchauffer et il est presque impossible de courir tellement c’est glissant. Durant la descente sur la dizaine de coureur que je vais voir, la moitié va tomber… Je crois que c’est en voyant le dernier prendre une monstrueuse gamelle alors qu’il descendait à la vitesse incroyable d’environ 4km/h que je vais de nouveau penser à arrêter. Je cherche des raisons de continuer après Vallorcine et j'en trouve bien peu. Cela fait des heures qu'i n'a plus aucune notion de plaisir, de sensation de vitesse rien. Cela fait des heures que je prends l'eau par tous les trous, je suis trempe, j'ai maintenant bien froid a tel point que j'ai le cou quasiment bloque tellement je suis contracte. Je n' ai plus d'affaires de rechanges, donc impossible de repartir sec pour a dernière partie de la course. Enfin sais que si les conditions sont épouvantables ici, entre la tête aux vents et la flegere ce sera pire! Du cote positif (si,si...) Je ne suis pas blesse, je ne suis pas encore malade, et je ne suis plus si loin de Vallorcine. En cinq minutes je prends ma décision, quoi qu'il se passe, je m'arrêterai a Vallo, pas la peine d'insister, aujourd'hui n'est pas un bon jour pour aller en montagne, a quoi bon insister et finir dans la page faits-divers. A compter de ce moment ma seule obsession sera de rallier la vallée en prenant le moins de risque possible... Des l'entrée de l'entre, je me dirige vers le bénévole responsable des abandons et je lui dis que pour moi c'est termine. Je lui explique que ca devient vraiment trop dangereux a mon gout et que dans ces conditions je ne repars pas. Soulage, je vais me ravitailler et essayer de me réchauffer. J'apprends quelques minutes plus tard qu'il n'est plus possible de partir et qu'il a été décide de neutralise la course une heure. Je suis conforte dans ma décision, plus aucun coureur ne partira et la course définitivement arrèté.
16:01:34 499è
Distance depuis le départ : 80.80 km
Distance depuis Catogne : 4.90 km
Altitude : 1260 m
Dénivelé positif depuis le départ : 4663 m
Dénivelé positif depuis Catogne : 6 m
[strike]Vallorcine ---- Chamonix....[/strike]
reste à faire...
Distance depuis le départ : 98.50 km
Distance depuis Vallorcine : 17.70 km
Altitude : 1035 m
Dénivelé positif depuis le départ : 5618 m
Dénivelé positif depuis Vallorcine : 955 m
il me reste donc 18 km a faire,j'y pense depuis quelques heures après l'arrivée et si le temps le permet j'irai voir les bouquetins jeudi prochain, mais les prévisions sont pour l'instant a la pluie. Décidément...
ps1: l'ultra c'est 90% de mental et l'autre moitié de physique
ps2: je ne peux pas me passer de boisson energétique en course, vu mes difficultés à m'alimenter avec du solide. J'ai voulu partir plus léger (2L au lieu de 3) Je l'ai payé cash...
ps3: l'organisation vient d'annoncer aujourd'hui que ceux qui sont allés jusqu'à Vallorcine dispose de 3points au barème UTMB. Je pourrai donc si je le souhaite m'inscrire à l'UTMB dès l'année prochaine.
ps4: sur les 1800 partants, 440 ont franchi la ligne d'arrivée...
Arrivée de bon matin sous un ciel assez bas, mais pas vraiment menaçant, et une température plutôt clémente. Le départ ne sera donné que dans près de 3h, alors je prends mon temps et en profite pour refaire un petit somme... 1h avant le début de la course je commence tranquillement à me préparer puis je me dirige vers la ligne de départ distante de'1 km du centre sportif. Il y a beaucoup de monde dans les rues malgré l'heure matinale, l'ambiance est pour le moment bonne. Au fil des minutes la tension monte en même temps que le plafond s'abaisse. Il ne fait déjà plus guère de doute que nous aurons droit à la pluie. Je m'abrite dans l'entrée d'un bâtiment juste à coté de la dépose des sacs quand la pluie fait son apparition. Nous sommes à 30 minutes du départ et l'ambiance est maintenant franchement plombée. A un quart d'heure je me resouds à rejoindre la longue cohorte des trailers qui attendent le départ sous une pluie continue mais légère, mais 5' plus tard c'est le début du déluge: Plus de doutes à avoir, je sors de mon sac ma veste de pluie (dont j'ai déjà pu tester l'efficacité lors de la traversée Verbier - Saint-Bernard...) et j'attends impatiemment le départ. A 10h pile le départ est donnée dans une grosse ambiance malgré le temps déplorable...
Courmayeur-Bertone:
Le départ dans Courmayeur est très agréable, je me suis délibérément placé en milieu de peloton pour ne pas être tenté de partir trop vite. Le rythme est donc relativement lent et me permet de profiter des rues et des gens massés sur le nord pour nous encourager. Cette première partie n'est qu'une longue ascension de près de 17km, elle doit me servir "d'échauffement" et me permettre d'arriver au sommet très frais. La route puis les chemins sont relativement large pour le moment et me permette de remonter tranquillement une partie des concurrents sur cette partie très roulante, par contre au niveau du temps, après une courte accalmie d'une dizaine de minutes, la pluie fait son retour accompagnée de 2 ou trois coups de tonnerre. Petit à petit le chemin se rétrécit et au bout d'une petite heure apparait le premier "single track" accompagné de son premier bouchon. Le reste de la montée jusqu'à Bertone se fera donc au train, quasi impossible de doubler sauf à prendre des risques, ou alors en coupant droit dans la pente comme quelques abrutis copieusement sifflés et hués par le reste du troupeau...
Après la barrière de pointage, je zappe le premier ravitaillement (bondé!!!) comme j'en ai pris l'habitude et continue vers le sommet.
02h02'30" 890è
Distance depuis le départ : 12.30 km
Altitude : 1989 m
Dénivelé positif depuis le départ : 797 m Dénivelé positif depuis Départ : 797 m
refuge Bertone - Tête de la Tronche
Il y a toujours beaucoup de monde dans cette partie, je sens que je suis toujours en sous-régime et c'est tant mieux. Je continue à boire et m'alimenter suivant le protocole que je me suis fixé: 2 bouches pleines de boissons énergétiques toutes les 12' et un gel ou une barre énergétique toutes les 45'. A cette altitude le vent est déjà assez fort et on supporte largement la veste dans les parties exposées. Les chemins sont détrempées et déjà ravagés par les coureurs qui me précèdent.
La progression est difficile et le paysage complétement obstrué par les nuages: pas vraiment ce dont j'avais rêvé pendant toute ma préparation, ici c'est déjà l'automne.... fin de montée tranquille et sommet atteint en 3h.
02:59:39 691è
Distance depuis le départ : 16.60 km
Distance depuis refuge Bertone : 4.30 km
Altitude : 2584 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1410 m Dénivelé positif depuis refuge Bertone : 613 m
Tête de la Tronche - refuge Bonatti
La pluie ayant eu la bonne idée de s'arrêter et étant maintenant à l'abri du vent, je prends 30" pour retirer ma veste avant d'entamer une descente rythmée mais sans excès: il reste encore 80km et au moins 17h de course... La fin de la descente roulante puis le chemin en balcon vers Bonatti rende cette partie de course agréable (j'aurais du plus en profiter...). Je progresse toujours à un rythme régulier et le temps qui se lève un petit peu nous permet de profiter en partie de la beauté des paysages du val Ferret Italien. Nouveau pointage sans arrêt à Bonatti avec toujours beaucoup de monde!!!
03:44:47 604
Distance depuis le départ : 22.10 km
Distance depuis Tête de la Tronche : 5.50 km
Altitude : 2010 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1513 m
Dénivelé positif depuis Tête de la Tronche : 103 m
refuge Bonatti - Arnuva
Nouvelle partie de chemins en balcons, le paysage devient vraiment sympa et par moment je me retrouve seul pour la première fois depuis le début de la course. Je m'aperçois que j'ai passé les 4h de course sans avoir ressenti mon fameux coup de pompe des 3h30~4h, c'est une excellente nouvelle: je dois avoir trouver le bon compromis dans mon alimentation et ma gestion de course pour rester efficace (enfin je le crois encore à ce moment là...) Les premiers signes de lassitude apparaissent alors, rien de bien grave, c'est même plutôt normal. Je conserve mon rythme qui me permet de récupérer des places des que le chemin est roulant. Ce début de course confirme que je suis définitivement plus a l'aise en descente et sur le plat que dans les montées. Au loin on entend les premiers encouragements des spectateurs masses a Arnuva, dernier point de passage de la course en Italie. L'ambiance est bonne et il n'y a pas trop de monde au ravitaillement. Je prends une petite dizaine de minutes pour boire (coca + eau gazeuse) et pour me ravitailler (banane, chocolat noir, pain d'épices). Je fais aussi remplir ma poche avec de l'eau alors que jusqu'à maintenant je tournais a l'isostar. C'est le premier tournant et ma seule erreur de la course. Mais a ce moment je n'ai aucune idée de l'impact que va avoir ce changement sur ma course...
04:29:17 528
Distance depuis le départ : 27.10 km
Distance depuis refuge Bonatti : 5.00 km
Altitude : 1769 m
Dénivelé positif depuis le départ : 1633 m
Dénivelé positif depuis refuge Bonatti : 120 m
Arnuva - Grand Col Ferret
Je repars tranquillement a l'assaut du grand col Ferret, court mais vraiment pentu et surtout très expose au vent. Je monte donc a un rythme très cool, sachant que je souhaite arriver frais a Champex qui est encore a 28km... Le soleil fait son apparition pour la première et dernière fois de la journee: la vue sur les glaciers du val Ferret est magnifique, une des plus belles depuis que je fais de lla montagne! L'ascension est reguliere et le vent fait de nouveau son apparition raffraichissant rapidement la temperature. Je depasse (déjà!!!!) des trailers en difficulte avec des crampes, j'en vois aussi qui sont vraiment sous equipes. Tout ceux la je le sais n'iront pas au bout et risque de passer une bien mauvaise fin de journee...au detour d'une epingle on appercoit enfin le col qui finalement sera passe sans encombre.
05:49:06 540è
Distance depuis le départ : 31.40 km
Distance depuis Arnuva : 4.30 km
Altitude : 2537 m
Dénivelé positif depuis le départ : 2401 m
Dénivelé positif depuis Arnuva : 768 m
Grand Col Ferret - La Fouly
Je bascule dans la descente avec un moral gonfle a bloc: je sais que les 12 km qui viennent me sont particulierement favorable puisque c'est une partie qui se court. En plus je sais qu'a La Fouly m'attendent femme et enfants, je suis impatient de les voir. Je descends a un bon rythme, je reprends un bon paquet de coureur plus ou moins a l'aise dans ces longues portions de courses entrecoupees de quelques petis toboggan. Mais même si je mene grand train je sens que quelque chose ne collle pas: je continue a m'alimenter a la même frequence depuis le début et pourtant je me sens de moins en moins bien. Les jambes tournent bien, je dois etre a une FC largement en dessous des 70% , mais je me sens de plus en plus nauseeux, premier signe d'un coup de moins bien... C'est pas grave je savais que ce moment arriverai, je suis juste surpris qu'il arrive dans la partie ou je suis le plus a l'aise. Dans la descente qui nous mene a La Fouly je repere les chemins et paysages empruntes dans l'autre sens début juillet pour la traversée, je sais que je ne suis plus très loin, et après un dernier effort j'aperçois mes deux fils qui pour l'occasion portent des t-shirt ou ils ont inscrit des encouragements. Ils m'accompagnent ainsi que ma femme jusqu',au pointage, je les embrasse et leur donne rendez-vous a Champex pour ravitaillement complet prévu dans mon planning. Malgré les signaux d'alerte, je décide de suivre mon plan : je ne m'arrete pas au ravitaillement et repars aussi sec.
06:58:56 511è
Distance depuis le départ : 41.10 km
Distance depuis Grand Col Ferret : 9.70 km
Altitude : 1598 m
Dénivelé positif depuis le départ : 2540 m
Dénivelé positif depuis Grand Col Ferret : 139 m
La Fouly – Champex
Le début se fait dans des chemins de sous bois agréable mais déjà bien attaqués par les coureurs qui sont devant. Je suis inquiet pour le reste des coureurs de la CCC, mais surtout pour tous les participants de l’UTMB qui risque de trouver tout le parcours en bien piteux état… Les jambes tournent toujours super bien, par conter je sens maintenant clairement que quelque chose ne tourne pas rond, cela fait maintenant une heure que je n’ai rien avalé, il faut que je m’alimente mais cette idée ne fait qu’accentuer mon état nauséeux… mais c’est indispensable, je sens les cuisses se raidirent alors que le parcours est favorable et qu’au niveau cardiaque je suis vraiment facile. Je parviens à avaler un gel cacahouète qui sera mon dernier ravitaillement avant Champex. Il me permet de sauver les apparences pendant un petit moment, mais je le sais à ce moment là, je vais avoir une grosse défaillance : je cogite et me demande ou j’ai fait l’erreur. J’ai beau tout passer en revu, je n’arrive pas alors à voir ou. La seule bonne nouvelle c’est que sur cette partie du parcours on croise 4 ou 5 fois la route qui mène de La Fouly à Champex, et à chaque fois ma petite famille m’encourage chaleureusement. Les premieres fois je parviens à garder le sourire pour donner le change et ne pas les alerter sur mes inquiétudes et mon état, mais sur le dernière passage avant la montée sur Champex je suis déjà trop dans le dur pour pouvoir le masquer : mon fils ainé remarque bien que ma foulée est bien plus étriquée et mes traits doivent etre beaucoup moins détendus. J’attaque alors cette montée sur Champex, comme Hors d’œuvre de la nuit qui m’attends avec 3 montées annoncées chacune pour des raisons différentes comme éprouvantes. La pluie décide aussi de faire un retour en fanfare, et vu l’état du ciel, il ne s’agit pas d’une brève averse, je renfile donc ma veste que je ne quitterai plus jusqu’à la fin. Les jambes sont lourdes, les cuisses douloureuses, le moral en berne. J’avais prévu d’arriver à Champex frais et prêt à débuter réellement mon ultra, je risque plutôt d’y arriver cuit, trempé, démoralisé. Durant cette longue et très lente montée je tente de reprendre le dessus, je sais que je suis dans un (très) mauvais passage et que ca doit passer, je me rappelle la maxime que j’ai vue sur plusieurs panneaux depuis ce matin : « la douleur est passagère, l’abandon est irrévocable ». Et pourtant c’est bien de ca dont il s’agit : d’abandon. Je suis au fond, impossible de positiver, les cuisses sont douloureuses, j’ai les larmes au bord des yeux… Pendant plus d’une heure je vais subir cette montée sous la pluie, sans pouvoir me remettre en selle, sans pouvoir manger, juste en buvant de l’eau. Et c’est bien ca le problème : depuis 4 heures maintenant je ne bois que de l’eau et ca ne suffit pas, je suis en hypoglycémie, mais alors sévère. Mais sur le moment impossible de prendre autant de recul. Enfin, j’entends les bruits qui viennent du ravitaillement et à son approche j’aperçois mes proches maintenant accompagnés d’un de mes amis triathlète sur le bord du chemin. Pas besoin de parler, quand ils voient mon visage ils comprennent tout de suite : Le grand m’encourage et me dit que je vais pouvoir me reposer, le petit ne dit rien et c’est pire. Une fois que je serai arrivé au ravito il dira à ma femme : « il repart pas papa, on le ramène avec nous ! » : Je suis livide, marqué et abattu. Une fois sous la tente mon pote me fait assoir et commence par me demander de me taire quand je lui parle d’abandon. Il va me chercher un bol de soupe et me laisse récupérer. Je suis complètement hagard, il me faudra plus de 10’ avant de pouvoir reparler tranquillement et pouvoir avaler mon bol. A ce moment je suis toujours décider à ne pas repartir malgré le réconfort et les encouragements de mes proches. Je me change, remet des habits secs et retourne faire la queue pour un deuxième bol. Au passage je prends une banane et du pain et une compote, en même temps que je me réchauffe, que je récupère, mes réflexes de coureur reviennent, je me remet en mode ultra. De retour à la table je mange tranquillement et commence à envisager la possibilité de continuer. Les forces reviennent et dans le même temps les douleurs et la lassitude disparaissent. 45’ après mon arrêt je suis de nouveau prêt à repartir, je sais que la fin sera difficile, que je ne ferai pas un temps canon, mais je vais essayer d’aller au bout, au moins essayer.
08:52:37 423è
Distance depuis le départ : 55.10 km
Distance depuis La Fouly : 14.00 km
Altitude : 1477 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3103 m
Dénivelé positif depuis La Fouly : 563 m
Champex – Bovine
Je repars accompagnés de mon assistance qui reste avec moi le long des bords du lac, la pluie c’est finalement décidé à nous laisser un court répis, juste le temps de les embrasser et de rassurer mon petit. Cet arrêt a été vraiment bénéfique : contrairement à ce que je craignais je peux me remettre en footing à la sortie de la ville. Cette longue portion de faux plat descendant qui mène au pied de bovine me parait interminable, surtout que les coureurs sont maintenant beaucoup plus dispersés, j’ai l’impression que beaucoup profitent un maximum de la chaleur de la tente. En même temps que la nuit, la pluie fait un énième retour, accompagné du vent cette fois ci. Je mets en route ma frontale et j’arrive finalement au pied de bovine. Dès le début je vois que sa réputation n’est pas usurpé, ce col est une vraie vacherie, fait de grosse pierre obligeant à lever bien haut les pieds, à appuyer fort sur les cuisses et les batons. La pluie redouble et l’eau commence à dégringoler de partout. Il fait maintenant nuit noire, des petits groupes se forment au gré des passages difficiles. A l’approche des torrents le bruit ne trompe pas, il y a de l’eau, beaucoup d’eau… le premier passage se fait sur des pierres émergées, mais dans le deuxième il faut mettre les pieds dans l’eau. Je ne suis pas rassuré car il commence à y avoir du bouillon, mais bon, je traverse tant bien que mal, et me retrouve avec les pieds trempés et froids, comme je n’ai plus de chaussettes de rechange, ils le resteront jusqu’à Cham’. Le vent se renforce en même temps que l’on se rapproche du sommet. En haut c’est carrément la tempête, les 500m qui nous séparent du pointage se font avec le vent de face et la pluie qui arrive à l’horizontale rentre par la capuche : un vrai bonheur. J’arrive au ravitaillement sous le déluge, la tente est archi pleine. Tout le monde tente de se réchauffer à l’intérieur, impossible de rentrer. Je prends donc mon bol de soupe dehors avec l’eau qui coule depuis la toile de tente directement dedans : irréel. Autant dire que je ne m’attarde pas et repars illico vers Trient.
11:50:55 540è
Distance depuis le départ : 64.70 km
Distance depuis Champex : 9.60 km
Altitude : 1987 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3828 m Dénivelé positif depuis Champex : 725 m
Bovine – Trient
C’était dur avant, mais la ca devient infernal. En plus des conditions météo, le chemin est vraiment à la limite du praticable. Très dur de courir sur les 3 à 5cm d’eau qui recouvrent la boue… J’ai un nouvel ami dans cette descente : l’ennui. Je m’ennuie ferme, isolé dans ma capuche et dans mon faisceau de lummière, impossible de lever la tête pour essayer de distinguer les lumières de la vallée… c’est donc de relativement mauvaise humeur que j’arrive à Trient. En me dirigeant vers le ravito, je passe devant le centre de secours : il y a la queue jusque dehors… Une fois au chaud je reprends un bol de soupe et trouve une place pour m’assoir, je demande à mon voisin si il sait qui est en tête de l’UTMB qui s’est élancé à 18h30. Il me répond que l’organisation vient d’annoncer son annulation. Je suis abasourdi, c’est impossible, il a mal compris. Mais non, le speaker nous annonce qu’effectivement en raison des conditions meteo épouvantables au col de la Seigne notamment, l’UTMB est purement annulé et que le départ de la TDS est repoussé ! C’est un vrai choc, je pense tout de suite à mon pote qui se presentait pour la 3ème fois de suite au départ, et qui après 2 échecs voulait coute que coute aller au bout cette année, dur, dur… Après un nouveau bol de bouillon, je renfile le sac et repars affronter la pluie.
13:06:39 507è
Distance depuis le départ : 71.10 km
Distance depuis Bovine : 6.40 km
Altitude : 1300 m
Dénivelé positif depuis le départ : 3908 m
Dénivelé positif depuis Bovine : 80 m
Trient – Catogne
Avant dernière difficulté, la montée vers Catogne. C’est une montée courte mais bien raide. En plus de la pluie, de la fatigue, de l’ennui et de la douleur, le froid fait son apparition. Je suis trempé jusqu’aux os et mon faible rythme de montée ne me permet pas de me réchauffer malgré mes 3 couches… La montée jusqu’aux Tseppes est interminable, mais le passage jusqu’à Catogne sera pire. De nouveau face à la tempête, sans moyen de s’habriter, je commence vraiment à trouver le temps long… et surtout de nouveau qu’est ce que je m’ennuie ! Nouvelle désillusion en arrivant au pointage, ici pas de bouillon juste un petit abris ouvert aux vents, avec quelques bénévoles qui essaient de se réchauffer autour d’un feu. Vraiment pas de quoi s’arrêter, mêmes quelques instants.
14:49:44 478è
Distance depuis le départ : 75.90 km
Distance depuis Trient : 4.80 km
Altitude : 2027 m
Dénivelé positif depuis le départ : 4657 m
Dénivelé positif depuis Trient : 749 m
Catogne – Vallorcine
Dans la descente c’est carrément du délire, de la boue jusqu’au cheville, un vent terrible et surtout j’ai froid, de plus en plus. Je n’arrive pas à me réchauffer et il est presque impossible de courir tellement c’est glissant. Durant la descente sur la dizaine de coureur que je vais voir, la moitié va tomber… Je crois que c’est en voyant le dernier prendre une monstrueuse gamelle alors qu’il descendait à la vitesse incroyable d’environ 4km/h que je vais de nouveau penser à arrêter. Je cherche des raisons de continuer après Vallorcine et j'en trouve bien peu. Cela fait des heures qu'i n'a plus aucune notion de plaisir, de sensation de vitesse rien. Cela fait des heures que je prends l'eau par tous les trous, je suis trempe, j'ai maintenant bien froid a tel point que j'ai le cou quasiment bloque tellement je suis contracte. Je n' ai plus d'affaires de rechanges, donc impossible de repartir sec pour a dernière partie de la course. Enfin sais que si les conditions sont épouvantables ici, entre la tête aux vents et la flegere ce sera pire! Du cote positif (si,si...) Je ne suis pas blesse, je ne suis pas encore malade, et je ne suis plus si loin de Vallorcine. En cinq minutes je prends ma décision, quoi qu'il se passe, je m'arrêterai a Vallo, pas la peine d'insister, aujourd'hui n'est pas un bon jour pour aller en montagne, a quoi bon insister et finir dans la page faits-divers. A compter de ce moment ma seule obsession sera de rallier la vallée en prenant le moins de risque possible... Des l'entrée de l'entre, je me dirige vers le bénévole responsable des abandons et je lui dis que pour moi c'est termine. Je lui explique que ca devient vraiment trop dangereux a mon gout et que dans ces conditions je ne repars pas. Soulage, je vais me ravitailler et essayer de me réchauffer. J'apprends quelques minutes plus tard qu'il n'est plus possible de partir et qu'il a été décide de neutralise la course une heure. Je suis conforte dans ma décision, plus aucun coureur ne partira et la course définitivement arrèté.
16:01:34 499è
Distance depuis le départ : 80.80 km
Distance depuis Catogne : 4.90 km
Altitude : 1260 m
Dénivelé positif depuis le départ : 4663 m
Dénivelé positif depuis Catogne : 6 m
[strike]Vallorcine ---- Chamonix....[/strike]
reste à faire...
Distance depuis le départ : 98.50 km
Distance depuis Vallorcine : 17.70 km
Altitude : 1035 m
Dénivelé positif depuis le départ : 5618 m
Dénivelé positif depuis Vallorcine : 955 m
il me reste donc 18 km a faire,j'y pense depuis quelques heures après l'arrivée et si le temps le permet j'irai voir les bouquetins jeudi prochain, mais les prévisions sont pour l'instant a la pluie. Décidément...
ps1: l'ultra c'est 90% de mental et l'autre moitié de physique
ps2: je ne peux pas me passer de boisson energétique en course, vu mes difficultés à m'alimenter avec du solide. J'ai voulu partir plus léger (2L au lieu de 3) Je l'ai payé cash...
ps3: l'organisation vient d'annoncer aujourd'hui que ceux qui sont allés jusqu'à Vallorcine dispose de 3points au barème UTMB. Je pourrai donc si je le souhaite m'inscrire à l'UTMB dès l'année prochaine.
ps4: sur les 1800 partants, 440 ont franchi la ligne d'arrivée...
par papadje
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- gilles84 [Dum Spiro Spero]
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Réponse de gilles84 [Dum Spiro Spero] sur le sujet Re: CCC 2010 (CCV...)
Posted il y a 14 ans 2 mois #58087
Dantesque, émouvant, prenant, instructif ...suis sans voix ....
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- bidoubay
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c'est sur que c'est décevant d'abandonner mais les conditions étaient si terrible
la sécurité avant tout
dans quel état physique es tu maintenant ? es tu remis ?
ton CR est super, tu as un réel talent d'écriture.
j'étais en montagne avec toi et je ressentais le froid et la pluie, brrrrrrrrrrrrrr
la sécurité avant tout
dans quel état physique es tu maintenant ? es tu remis ?
ton CR est super, tu as un réel talent d'écriture.
j'étais en montagne avec toi et je ressentais le froid et la pluie, brrrrrrrrrrrrrr
par bidoubay
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- gilles
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Merci pour ton récit
Comme tu l'as dit très justement souligné, ce n'était vraiment pas un temps à mettre un coureur dehors.
Et malgré les remarques de certains coureurs "élite", les organisateurs ont pris la bonne décision
Et pour tes soucis d'alimentation, quelle solution penses tu prendre ?
Que du liquide ?
Comme tu l'as dit très justement souligné, ce n'était vraiment pas un temps à mettre un coureur dehors.
Et malgré les remarques de certains coureurs "élite", les organisateurs ont pris la bonne décision
Et pour tes soucis d'alimentation, quelle solution penses tu prendre ?
Que du liquide ?
par gilles
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- NicoTux
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Vraiment énorme
Quelle aventure, quels bons moments et quelle déception
On y était presque avec toi !
Un tel récit me fait rêver
Quelle aventure, quels bons moments et quelle déception
On y était presque avec toi !
Un tel récit me fait rêver
Last Edit:il y a 14 ans 2 mois
par NicoTux
Dernière édition: il y a 14 ans 2 mois par NicoTux.
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- kretchy
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Bonjour,
quelle course.......
superbe CR
ca donne envie............................................................... de ne pas le faire tellement ce doit être dur
félicitation
quelle course.......
superbe CR
ca donne envie............................................................... de ne pas le faire tellement ce doit être dur
félicitation
par kretchy
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