Le marathon est un seigneur, respecte le !

Je pensais que j'aurais des centaines de choses à vous dire en rédigeant ce CR. Au moment où je m'installe devant mon clavier, je me rends compte que le ressenti n'est pas facile à verbaliser.

Alors, je vais vous faire un CR chronologique.

La genèse de ce marathon :

Le marathon de Paris 2014, je l'avais commencé en octobre 2013. Mon objectif était de faire -3h à Metz, afin de pouvoir m'élancer depuis le sas préférentiel à Paris et courir dans des conditions plutôt...confortables Vous connaissez le résultat : 2h55, un chrono inespéré

Du coup, des ailes me sont poussées et je me suis imaginé être un coureur costaud. Dans ma tête, je voulais faire 2h50 sur mon 3è marathon . Ma prépa a été compliquée. Déjà, un nouveau boulot assez chronophage et stressant ne m'a pas permis d'assurer mon plan sereinement. J'étais assez fatigué, mon corps aussi, puisqu'il m'a fallu soigner un ischio blessé 2 petites semaines avant le jour J.
Plus chiant, mes ratios à l'entrainement n'étaient pas bons. Sur l'allure à laquelle j'aurais aimé courir les 42 km, c'étaient 10 pulses de trop. Pas grave me disais-je, je tenterai le coup.

Me voici donc à Paris, sûr de rien, mais envieux de tout. Le samedi se passe super bien, je vais au runing expo où je retrouve mon partenaire d'entrainement qui a eu plein de pépins dans sa prépa et avec qui j'ai décidé de courir. Au détour d'un stand, j'ai d'ailleurs rencontré Chauchau. Sans faire ma midinette, j'étais content de discuter un chouille avec lui.

Le Jour J

Le dimanche arrive bien vite et je file avec mon amie aux Champs, au magasin Mont Blanc que tout provincial trouve facilement (c'est plus compliqué pour certains parisiens pas très grands...Spéciale dédicace Mathieu ). Là, je retrouve le team CCAP. Je suis content :

- de faire connaissance avec certains que je n'avais jamais vu autrement que par leur suivi (j'espère qu'au moins un d'eux viendra courir en Lorraine

- de voir les 2 parigots que je connaissais déjà et que je n'avais pas vu depuis longtemps

- de voir le régional de toutes les étapes de Metz, à Paris en passant par Nancy

En supplément, Gilles est venu nous serrer la louche (cool !!!!!!!!). On discute tranquillement et c'est l'heure de descendre aux sas. Serrages de mains, claquage de bécots et zou, on file avec Sylvain que j'abandonne aux portes des 3h...

De mon côté après 2/3 exercices d'échauffement, je rentre dans mon sas où je trouve tout de suite mon pote (c'est bien les petits sas, se dit le provincial...).

La course :

Le premier semi

Le coup d'envoi retentit 10' après, et hop, en route pour l'aventure ! C'est juste fanstastique de descendre les Champs en courant , merveilleux de traverser la Concorde à pieds sans se faire dessus à cause des voitures , hallucinant de longer les Tuileries au milieu de la route ! Je ne vous ferais pas le trajet rue par rue, mais cette vision de Paris vaut à elle seule le détour...

Après un premier km très tranquille, on accélère avec mon pote. Dès que je regarde mon cardio, je trouve que ma FC est haute (Merde !). Je ne fais pas attention, la ceinture déconne certainement. Au km 5, je me rends compte que je transpire. C'est couillon. Transpirer sur marathon au bout de 5 km, c'est moyen En plus mon cardio est trop haut de 10 pulses.

Il faut faire qqc. J' zappe donc la FC de mon écran de Garmnin. Et oui, je suis comme ça moi, un mec qui sait prendre des décisions

C'est assez étrange parce que ma FC est haute, mais on ne peut pas dire que j'ai l'impression d'être essoufflé... Les km se succèdent et je laisse mon pote prendre de l'avance dans les montées. C'est un domaine dans lequel il excèle autant que je l'excècre (le domaine, pas le bonhomme hein ! ). Par contre, je dois fournir à chaque fois un petit effort en haut de faux plat pour le rejoindre. La dernière fois que je fis cet effort, c'était dans le début du bois de Vincennes. Mais je pris la décision en reprenant la foulée de Renaud de le laisser filer.

" Déjà que mes pulses sont trop hautes, je ne vais pas non plus suivre son rythme". Je pense alors à l'article lu dans le TGV sur notre signature énergétique (surper article sur Jog international) : même en courant en moyenne à la même allure, on a tous des moments d'accélération ou de décélération qui nous sont propres.

On continue Vincennes, le château est vraiment super chouette, je pense au Duc d'Enghien (ben oui, ne me demandez pas pourquoi, mais j'aime l'histoire ).

C'est dans Vincennes que j'ai la confirmation que la journée ne va pas être terrible... Renaud me lâche, j'ai chaud, pour la 1ère fois depuis que je cours, je passe par la cas épongeage (enfin jetage de flotte sur la poire...), mon coeur je l'ignorerai jusqu'à l'arrivée, je m'ennuie et trouve presque le temps déjà long, j'ai fait 6/7 km avec une douleur au diaphragme (je pense à Jean Yves et sa mésaventure de Nantes). J'essaie de me divertir en profitant des belles villas que nous longeons.

Nous voilà au semi. Je sais déjà que je suis plus lent que 15 km/h. Voici d'ailleurs mes temps intermédiaires
km 5 : 20'33
km 10 : 40'38"
km 15 : 1h00'48"
Semi : 1h25'51"

Second semi :

Le chrono semble correct, mais je sais que je n'irai pas bien loin. C'est un cache misère. J'essaie de courir détendu, j'essaie de ne pas me contracter, le diaphragme va mieux. On va attaquer les quais de Seine : ben j'ai pas aimé... Les toboggans ne me plaisent pas et le long tunnel est trop long, l'animation boite de nuit ne me botte pas (c'est pourtant une super initiative !).
Seul point positif, j'entends au km 25 un "Allez Frantz !!!". Sur mon dossard est écrit François, c'est donc qqu qui me connait ! Et là, j'entends, "c'est Michel du forum" Je me retourne et lui lance un Salut Mikky ! (ca fait du bien !!!! Encore merci !).

En arrivant au pied de la Tour Eiffel, je lui lance un simple coup d'oeil, histoire de dire, mais je sens que c'est vraiment pas la patate ! Une femme est allongée en PLS avec des secouristes à ses côtés J'espère que ce n'est rien de grave...
A compter de ce moment commence la descente aux enfers

Mon allure se casse la gueule et je perds au moins 10 secondes au km... J'essaie de limiter la casse en me disant Pas moins vite . Mais ce n'est plus moi qui décide... Une force invisible m'empêche de remette quelque minime couche que ce soit...
Je pense à Robin à Annecy l'an dernier. Malgré la difficulté, il arrivait à mettre des km à 4'. Pour ma part, c'est juste impossible Il est vraimen BCP plus costaud que moi le père Robin.

Mais le pire reste à venir : le bois de Boulogne !!! Le faux plat qui nous y conduit m'achève. Quand je vois le panneau 33, je me dis Allez, c'est moins qu'un 10km, ça va le faire ! Dans la seconde qui suit une petite voix dit Mais jamais je ne pourrais faire 9 km !!!! Je m'invective, je crie à haute voix Lâche rien !ou autre MERDE !, voire Allez !!!!! Un vrai dérangé mental :

Je veux aller au bout !

Je me fixe comme objectif de n'attendre que les panneaux kmétriques. Viens le panneau 34 ! Mais c'est long un km Pense à ta foulée, gaine, ne t'affaisse pas ! Autant d'idées qui ne sont que voeux pieux. Chaque km est en fait une course à part entière.

Je traine ce grand vide intérieur comme je peux.

Au km 37, je ralentis vraiment et veux marcher... Mais non, je pense à Fabrice et à son courage l'an passé NOOOON hurle-je ! Je repars !

Je sais que mon allure diminue ! Cela fait 4 km que je pense à Sylvain Il va revenir et te cramer, ça serait génial pour lui mais il faudra surtout lui dire de ne pas t'attendre.

Je me retourne 2/3 fois sans voir les meneurs d'allure des 3h. Je demande au public si qqu les voit, non, pas de flamme. Je ne sais pas en quel chrono je peux arriver, je ne regarde plus mon garmin.

Les 2 derniers km, je les parcours vide et hagard, ne pensant qu'à l'avenue Foch qui se profile. Le rond point est interminable. La voilà ! Je voudrais accélérer, mais je n'y parviens pas, au contraire... Depuis 5 km, je suis dans l'incapacité de prendre la foulée de qqu qui va à 2" de moins que moi au kilo. Ou alors je le suis 200m et ralentis encore !

Avenue Foch, 100m devant moi, je vois un homme tomber à terre Il se relève, tente de courir. Il ressemble à un pantin à qui on aurait fixé des ficelles et qu'on s'amuse à tordre. Il retombe ! Je devine les crampes à chacun des muscles de son corps. Comment peut on s'infliger de telles tortures ? Je passe à côté de lui "Allez, on y est".
Je vois que 2h59' sont affiché au chrono. Je suis parti 13" après le coup de feu, tu seras sous les 3 heures, ne sprinte pas, t'es plus à ça prêt.

Juste devant moi, un coureur lève les bras de joie. Je l'imite. Pur mimétisme. Pas de joie. De la déception.
C'est enfin fini.
Je suis sec, je suis mort, je suis con !
A cette heure, je me nreds compte que j'ai déjà oublié l'homme aux crampes. Plus assez de sucre pour irriguer le cerveau, j'm'en rappelle plus de ce gars sur le moment.

On m'appelle. Mon pote Renaud est là. Tiens, il m'a attendu presque 10 ' ? Non, seulement 3. Il a sauté...crampes. Ses Adios boosts. Il les a trouvé finalement trop légères. Il ne veut pas de sa médaille. Je le convainc de la prendre. Il y a droit. Son fils sera content et fier de voir sa médaille ce soir (Merci Fab ). Il m'écoute et la prend : à la main, pas autour du cou...

Là, je le regarde et lui dis : "j'ai manqué d'humilité".

J'ai regardé de haut le marathon, il m'a mis à terre et montré qu'un mur était haut. Le marathon est un seigneur. Tu ne le respectes pas, il t'absorbe...

Cette leçon d'humilité a été complète bien des heures plus tard. Après avoir pris des nouvelles de Will, j'apprends qu'il est dans le dur au km38. Je file à l'arrivée (à la vitesse d'un mec qui a fait 42 bornes dont 13 dans le dur ). Là, j'assiste au plus beau spectacle qui soit : des finishers ! Ils se foutent du temps ! Ils finissent, ils pleurent de joie ! Des larmes coulent sur mes joues. Les seigneurs du marathon sont là. un petit bonhomme de 60 kg n'a aucun mérite de terminer un marathon. Tu fais la gueule en 2h59, eux hurlent leur joie à l'arrivée... On a certes le droit d'attendre qqc au regard de nos entrianements, mais c'est finalement peu de choses à côté de ces bonheurs...
Will arrive, Mon amie et moi l'encourageaons, il a un grand sourire ! C'est beau...

Voici mon second semi en chiffres :
km 25 : 1h41'53"
km 30 : 2h03'05"
km 35 : 2h25'24"
Marathon : 2h59'15"

La morale de cette finalement si longue histoire, c'est que je me suis vu trop beau. J'ai ignoré les messages de mon corps lors de mon entrainement. Je n'ai pas réussi à perdre ces 2 kg de trop par manque d'hygiène de vie. Je n'ai pas su me reposer suffisamment. Bref, j'ai cru que je pouvais passer outre tout ceci. Et bien foutaises !!!

En course, j'ai cru que je pouvais ignorer mon cardio. Que je pouvais courir à 91% de FCmax un marathon et faire un chrono. Et bien foutaises.

Je dois maintenant envisager la suite, car malgré tout ceci, j'ai aimé faire ce marathon. J'aime courir cette épreuve. J'ai envie de me lancer un nouveau défi. Mais reste à savoir quand... Je déborde du cadre du CR...

Rdv dans mon suivi pour les prochaines aventures et pour les données chiffrées de ce MDP 2014 ( ah le salop !)

Merci de m'avoir lu jusqu'au bout, j'ai jeté ces mots d'une traite,j 'oublie tant de choses... Tant pis, j'ai bien oublié d'etre humble

SPLENDIDE!!!!!

Il a tous les talents ce Frantz. Merci pour ce CR

Super cr, vraiment. Merci, ça fait du bien de lire des trucs comme ça

Merci pour ce super CR. Merci pour cette belle leçon d'humilité. Je me rappelerai de cette aventure le jour où je m alignerai pour la première fois sur un marathon. Ton prochain marathon sera bien meilleur puisque qu'il sera impregné de ces enseignements. Une belle leçon de la vie d'un runneur.

Un compte rendu SU-PER-BE!!

Bon malgré ta déception c'est un super chrono quand même! Bizarre quand même mais j'avais pas l'impression que tout le monde (moi le premier) avait autant galéré l'an dernier... La chaleur?

Bref repose toi bien maintenant avant de repartir vers d'autres courses et encore bravo!!

Tu m'as scotché avec ton CR. Quelle intensité! Et une belle lucidité. Merci d'avoir partagé ces moments, et de la meme facon que tu as utilisé l'expérience de membres du forum pour te motiver après ton mur, j'essayerai de puiser dans ce CR le jour ou je serai en souffrance