Marathon et gestion mentale: ma contribution
- sabine
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Marathon et gestion mentale: ma contribution a été créé par sabine
Posted il y a 12 ans 9 mois #144372
eh voilà, j'ai enfin terminé mon article, je me résous à le publier même si je ne le trouve pas parfait; j'en ai assez de le peaufiner, donc je me lance en toute humilité
Bonne lecture les coureurs
Marathon : la tête et les jambes
«Le cerveau est-il le pire ennemi du runner ?» c’est cet article lu récemment, qui m’a fait prendre conscience que la préparation d’un marathon n’est pas seulement l’accumulation de sorties longues, de séances de VMA, d’étirements, PPS, PPG….
Ma propre expérience m’a amené à tirer certaines conclusions très personnelles, certes.
Ayant vécu le bonheur et l’enfer, j’ai pu peaufiner et personnaliser une technique qui m’est apparue, avec du recul, si évidente.
Lorsque je me suis engagée dans cette folle aventure pour le marathon de New York -mon tout premier- j’ai compris de suite qu’il me faudrait arriver coûte que coûte à franchir cette ligne mythique. C’est New York, et je ne peux me résoudre à m’imposer toute cette préparation, cette distance, ce voyage pour abandonner.
Avant et durant la préparation, certaines lectures et témoignages m’ont enseigné que la souffrance physique et mentale m’accompagneraient une bonne partie de la course. C’était un fait acquis : je l’avais intégré, accepté, il faisait partie intégrante de ma préparation. Mon cerveau le savait parfaitement et l’attendait presque impatiemment.
J’avais également entendu parler de ce fameux mur tant craint par le marathonien, et là encore, je m’étais visualisé cette douleur, jour après jour, mon corps l’attendait, la désirait presque, un peu comme un défi à relever : si tu ne souffres pas, tu n’es pas marathonien.
Le jour J attendu depuis des mois où je n’ai vécu presque que pour ça, jour après jour, je me sens prête, sans appréhension particulière, avec l’envie d’en découdre. Je ne reconnais presque rien des images visionnées çà et là. L’ambiance est indescriptible, les longues heures d’attente sur l’île de Staten Island s’égrènent rapidement quand enfin le fameux coup de canon retentit. Je pars en trottinant allègrement pour 4h23 minutes presque dans un état second. Il m’est impossible d’expliquer combien cette expérience est unique. Mon corps et ma tête ne faisaient qu’un, mes jambes s’activaient sans que je n’y puisse rien, et mon esprit jouissait en toute quiétude, voire béatitude, du spectacle de la rue qui s’offrait à moi. Avant d’avoir pu réellement prendre conscience de cette extraordinaire aventure que j’étais en train de vivre, j’étais déjà transportée à Central Park presque déçue de ne pas avoir eu la visite de cette souffrance à laquelle je m’étais préparée. Je m’étais si souvent représenté ce fabuleux passage de la ligne d’arrivée, en larmes, tel Phillipidès, emplie d’une émotion contenue pendant 42,195 km, genoux à terre. Que nenni, point de larmes ! Si le sentiment de la mission accomplie, le soulagement et la fierté d’avoir pu gérer cet effort sans encombres m’habitaient alors, je dois bien avouer qu’au fond de moi, est apparue une once de regret de n’avoir pas su profiter pleinement de l’instant, de ne pas avoir explosé de joie voire de larmes comme je me l’étais imaginé. Je ne pensais alors qu’à une seule chose : recommencer.
Ma seconde expérience à Paris fût moins glorieuse : je n’avais alors pensé qu’à préparer mon corps, je savais qu’il tiendrait la distance, il l’avait fait une fois, la seconde ne devait être qu’une formalité. Mon cerveau, lui, ne s’attendait pas à ce qu’il en soit autrement : il n’y avait pas été préparé comme à New York. Quand la douleur est apparue, il n’avait alors aucune envie de prendre le relais tant il était occupé à écouter les sempiternelles lamentations des nombreux organes en tourment. La bête blessée n’a alors pas trouvé la ressource pour se battre et continuer.
Il m’a fallu prendre du recul pour ravaler ma déception, repartir de l’avant pour analyser les raisons profondes de cet échec. Je ne pensais alors qu’à une seule chose : recommencer.
J’avais malheureusement oublié tous les préceptes ayant conduit à faire de New York une réussite : occuper mon esprit, apprendre à dompter la douleur, ne pas la laisser s’insinuer subrepticement dans la moindre parcelle de ma tête, apprendre à anticiper son apparition, trouver des parades, faire preuve d’imagination. Pendant mes entrainements, je m’y attelle. Cet exercice doit faire partie de ma préparation. Certaines choses fonctionnent, d’autres moins. Je continue à m’exercer, à occuper ce mystérieux organe que je ne dois en aucun cas laisser gamberger. Dès que le doute apparaît, je dois instantanément trouver une parade pour me concentrer sur autre chose que la distance qui me reste à parcourir. Plusieurs possibilités s’offrent à moi, je conserve ce qui fonctionne. Chanter la chanson de Charlélie : 2km ; réaliser un kata : 2km ; me remémorer tous les détails d’un petit circuit que j’ai l’habitude d’emprunter que je connais par cœur : le chemin blanc jusqu’à l’intersection et la barrière de bois : 500 Mètres, le carrefour de l’inspecteur : 500 m etc. J’ai appris à reconnaitre ces petits détails, à les mémoriser presque les yeux fermés. Le jeu consiste alors à faire coïncider chaque détail dudit circuit avec les bornes kilométriques pendant la course. Cette dernière technique est particulièrement efficace quand le corps commence à trouver que la plaisanterie a assez duré. La distance de 5km de ce circuit me permet alors de me fixer comme objectif le prochain ravitaillement, de récupérer, de boire et marcher quelques mètres. Il m’arrive également de me parler en positivant : Sabine, tu es en train de faire ce que tu aimes, tu te fais plaisir, tu vas bientôt revoir le magnifique sourire de ton amoureux qui t’attend à l’arrivée, sera fier de toi, et récompense suprême, tu vas te boire une méga bière bien fraîche.
L’idée alors est de ne jamais se laisser aspirer dans une spirale négative de doute qui engendrera un autre doute, une autre douleur. C’est l’esprit qui ici commande le corps, et c’est un exercice à répéter au même titre que nos séances de VMA ou d’étirements.
Lors de ma troisième tentative, j’ai pu mettre en pratique ces techniques, qui ont été une vraie réussite. J’ai pu alors, comme je l’ai toujours souhaité, franchir la ligne tant convoitée. D’autres obstacles sont venus ternir cette expérience, mais c’est une autre histoire.
Je ne pense aujourd’hui qu’à une seule chose : … !
Bonne lecture les coureurs
Marathon : la tête et les jambes
«Le cerveau est-il le pire ennemi du runner ?» c’est cet article lu récemment, qui m’a fait prendre conscience que la préparation d’un marathon n’est pas seulement l’accumulation de sorties longues, de séances de VMA, d’étirements, PPS, PPG….
Ma propre expérience m’a amené à tirer certaines conclusions très personnelles, certes.
Ayant vécu le bonheur et l’enfer, j’ai pu peaufiner et personnaliser une technique qui m’est apparue, avec du recul, si évidente.
Lorsque je me suis engagée dans cette folle aventure pour le marathon de New York -mon tout premier- j’ai compris de suite qu’il me faudrait arriver coûte que coûte à franchir cette ligne mythique. C’est New York, et je ne peux me résoudre à m’imposer toute cette préparation, cette distance, ce voyage pour abandonner.
Avant et durant la préparation, certaines lectures et témoignages m’ont enseigné que la souffrance physique et mentale m’accompagneraient une bonne partie de la course. C’était un fait acquis : je l’avais intégré, accepté, il faisait partie intégrante de ma préparation. Mon cerveau le savait parfaitement et l’attendait presque impatiemment.
J’avais également entendu parler de ce fameux mur tant craint par le marathonien, et là encore, je m’étais visualisé cette douleur, jour après jour, mon corps l’attendait, la désirait presque, un peu comme un défi à relever : si tu ne souffres pas, tu n’es pas marathonien.
Le jour J attendu depuis des mois où je n’ai vécu presque que pour ça, jour après jour, je me sens prête, sans appréhension particulière, avec l’envie d’en découdre. Je ne reconnais presque rien des images visionnées çà et là. L’ambiance est indescriptible, les longues heures d’attente sur l’île de Staten Island s’égrènent rapidement quand enfin le fameux coup de canon retentit. Je pars en trottinant allègrement pour 4h23 minutes presque dans un état second. Il m’est impossible d’expliquer combien cette expérience est unique. Mon corps et ma tête ne faisaient qu’un, mes jambes s’activaient sans que je n’y puisse rien, et mon esprit jouissait en toute quiétude, voire béatitude, du spectacle de la rue qui s’offrait à moi. Avant d’avoir pu réellement prendre conscience de cette extraordinaire aventure que j’étais en train de vivre, j’étais déjà transportée à Central Park presque déçue de ne pas avoir eu la visite de cette souffrance à laquelle je m’étais préparée. Je m’étais si souvent représenté ce fabuleux passage de la ligne d’arrivée, en larmes, tel Phillipidès, emplie d’une émotion contenue pendant 42,195 km, genoux à terre. Que nenni, point de larmes ! Si le sentiment de la mission accomplie, le soulagement et la fierté d’avoir pu gérer cet effort sans encombres m’habitaient alors, je dois bien avouer qu’au fond de moi, est apparue une once de regret de n’avoir pas su profiter pleinement de l’instant, de ne pas avoir explosé de joie voire de larmes comme je me l’étais imaginé. Je ne pensais alors qu’à une seule chose : recommencer.
Ma seconde expérience à Paris fût moins glorieuse : je n’avais alors pensé qu’à préparer mon corps, je savais qu’il tiendrait la distance, il l’avait fait une fois, la seconde ne devait être qu’une formalité. Mon cerveau, lui, ne s’attendait pas à ce qu’il en soit autrement : il n’y avait pas été préparé comme à New York. Quand la douleur est apparue, il n’avait alors aucune envie de prendre le relais tant il était occupé à écouter les sempiternelles lamentations des nombreux organes en tourment. La bête blessée n’a alors pas trouvé la ressource pour se battre et continuer.
Il m’a fallu prendre du recul pour ravaler ma déception, repartir de l’avant pour analyser les raisons profondes de cet échec. Je ne pensais alors qu’à une seule chose : recommencer.
J’avais malheureusement oublié tous les préceptes ayant conduit à faire de New York une réussite : occuper mon esprit, apprendre à dompter la douleur, ne pas la laisser s’insinuer subrepticement dans la moindre parcelle de ma tête, apprendre à anticiper son apparition, trouver des parades, faire preuve d’imagination. Pendant mes entrainements, je m’y attelle. Cet exercice doit faire partie de ma préparation. Certaines choses fonctionnent, d’autres moins. Je continue à m’exercer, à occuper ce mystérieux organe que je ne dois en aucun cas laisser gamberger. Dès que le doute apparaît, je dois instantanément trouver une parade pour me concentrer sur autre chose que la distance qui me reste à parcourir. Plusieurs possibilités s’offrent à moi, je conserve ce qui fonctionne. Chanter la chanson de Charlélie : 2km ; réaliser un kata : 2km ; me remémorer tous les détails d’un petit circuit que j’ai l’habitude d’emprunter que je connais par cœur : le chemin blanc jusqu’à l’intersection et la barrière de bois : 500 Mètres, le carrefour de l’inspecteur : 500 m etc. J’ai appris à reconnaitre ces petits détails, à les mémoriser presque les yeux fermés. Le jeu consiste alors à faire coïncider chaque détail dudit circuit avec les bornes kilométriques pendant la course. Cette dernière technique est particulièrement efficace quand le corps commence à trouver que la plaisanterie a assez duré. La distance de 5km de ce circuit me permet alors de me fixer comme objectif le prochain ravitaillement, de récupérer, de boire et marcher quelques mètres. Il m’arrive également de me parler en positivant : Sabine, tu es en train de faire ce que tu aimes, tu te fais plaisir, tu vas bientôt revoir le magnifique sourire de ton amoureux qui t’attend à l’arrivée, sera fier de toi, et récompense suprême, tu vas te boire une méga bière bien fraîche.
L’idée alors est de ne jamais se laisser aspirer dans une spirale négative de doute qui engendrera un autre doute, une autre douleur. C’est l’esprit qui ici commande le corps, et c’est un exercice à répéter au même titre que nos séances de VMA ou d’étirements.
Lors de ma troisième tentative, j’ai pu mettre en pratique ces techniques, qui ont été une vraie réussite. J’ai pu alors, comme je l’ai toujours souhaité, franchir la ligne tant convoitée. D’autres obstacles sont venus ternir cette expérience, mais c’est une autre histoire.
Je ne pense aujourd’hui qu’à une seule chose : … !
par sabine
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- FredX
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Réponse de FredX sur le sujet Re: Marathon et gestion mentale: ma contribution
Posted il y a 12 ans 9 mois #144375
Marrant, sabine, en te lisant j'ai pensé à la conférence avec serge girard.
A la suite de son périple européen, un an de course, pour faire le tour de l'europe sans s'arrêter à un rythme de 74 kms / jour.
A une personne qui lui demandait s'il avait mal et comment il faisait pour lutter contre, voici sa réponse :
"Avoir mal est intégré dans mon parcours, je sais que je vais avoir mal, c'est moi qui me l'inflige, et donc je ne peux pas m'en plaindre puisque cela fait partie de mon défi"
A la suite de son périple européen, un an de course, pour faire le tour de l'europe sans s'arrêter à un rythme de 74 kms / jour.
A une personne qui lui demandait s'il avait mal et comment il faisait pour lutter contre, voici sa réponse :
"Avoir mal est intégré dans mon parcours, je sais que je vais avoir mal, c'est moi qui me l'inflige, et donc je ne peux pas m'en plaindre puisque cela fait partie de mon défi"
par FredX
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- AtomHeart
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Réponse de AtomHeart sur le sujet Re: Marathon et gestion mentale: ma contribution
Posted il y a 12 ans 9 mois #144377
C'est un très, très beau témoignage Sabine. Merci à toi de nous faire partager ton (tes) expérience(s). Cela me conforte dans l'idée qu'il ne faut jamais négliger sa préparation mentale sur les distances longues.
P.S: Si j'arrive à le retrouver, j'ai bien envie de lire ton compte-rendu du marathon de New York.
Edit: Le voilà : www.conseils-courseapied.com/forum/25-re...-york-de-sabine.html
Edit (bis): Une phrase m'a particulièrement marqué dans ton récit et je trouve que celle-ci résume parfaitement l'exploit représenté par le marathon : "J’ai du mal à y croire, tellement je n’y crois pas"
P.S: Si j'arrive à le retrouver, j'ai bien envie de lire ton compte-rendu du marathon de New York.
Edit: Le voilà : www.conseils-courseapied.com/forum/25-re...-york-de-sabine.html
Edit (bis): Une phrase m'a particulièrement marqué dans ton récit et je trouve que celle-ci résume parfaitement l'exploit représenté par le marathon : "J’ai du mal à y croire, tellement je n’y crois pas"
Last Edit:il y a 12 ans 9 mois
par AtomHeart
Dernière édition: il y a 12 ans 9 mois par AtomHeart.
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- rycker
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Réponse de rycker sur le sujet Re: Marathon et gestion mentale: ma contribution
Posted il y a 12 ans 9 mois #144384
J'aime beaucoup
C'est comme ça que j'imagine le mien , souffrir mais..... parce que je le veux bien , donc ne pas se plaindre et trouver le moyen de s'occuper l'esprit pour arriver à son terme malgré tout
Merci Sabine
C'est comme ça que j'imagine le mien , souffrir mais..... parce que je le veux bien , donc ne pas se plaindre et trouver le moyen de s'occuper l'esprit pour arriver à son terme malgré tout
Merci Sabine
par rycker
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- Canayoo
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Réponse de Canayoo sur le sujet Re: Marathon et gestion mentale: ma contribution
Posted il y a 12 ans 9 mois #144387
C'est un très beau cadeau que tu nous fais, Sabine.
Pour les non initiés au marathon dont je fais parti, c'est un témoignage qui servira, c'est sûr.
Pour les non initiés au marathon dont je fais parti, c'est un témoignage qui servira, c'est sûr.
par Canayoo
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- Mar2kfait
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Réponse de Mar2kfait sur le sujet Re: Marathon et gestion mentale: ma contribution
Posted il y a 12 ans 9 mois #144400
Très très bien et également source d'inspiration pour ma préparation pour mon premier qui m'attend
par Mar2kfait
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