CR du Grand Raid du Golfe 2019
- ynwa
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CR du Grand Raid du Golfe 2019.
Après de nombreuses participations au Trail et au Raid du Golfe, j’avais envie de tenter l’aventure sur le grand format de ces courses organisées dans le cadre de l’Ultramarin.
L’opportunité de pouvoir me libérer le vendredi (RTT) m’a permis de prendre le départ des 177km.
J’ai pu arriver en milieu de matinée afin de trouver une place de stationnement pas très éloignée du site du départ et de l’arrivée car je ne voulais pas passer trop de temps à me déplacer à faire d’incessantes navettes entre mon véhicule et le site de la course. De la même manière, j’anticipais l’après course où quand on est bien fatigué on n’a pas envie de faire des kilomètres supplémentaires à aller chercher ses affaires puis se rendre à la douche …
Le problème fut de gérer les 9h d’attente. J’espérais pouvoir trouver un endroit pour dormir mais comme il faisait chaud il fallait aller trouver de l’ombre. Après un copieux repas de galettes et de crêpes et tout l’après-midi à me reposer, sans pouvoir dormir, on nous apprit que le départ était repoussé d’une heure et donc il passait à 19h. Il ferait nuit et donc sans doute moins chaud plus tôt.
J’avais préparé mes sacs à dos, les deux se superposant, et à force de les avoir faits et refaits à plusieurs reprises, j’hésitais à savoir quoi y laisser et ce que je pouvais en retirer. Je préparais aussi le sac pour Arzon où j’avais prévu de changer de t-shirt et de chaussettes. J’essayais de m’alléger le plus possible mais les sacs restaient quand même assez lourds avec les 2 litres de boissons imposés par l’organisation.
L’heure du départ se rapprochait enfin et je me présentais sur le site du départ où il commençait à y avoir du monde mais, paradoxalement, la ligne de départ n’était pas inaccessible et je m’y installais surtout pour profiter de l’ombre de l’arche. Le décompte final allait commencer avec la traditionnelle bande son de Kavinsky. Un coup de corne marqua le départ et tout un chacun déclencha son chrono. Un demi-tour après 100m puis nous voilà lancés vers notre aventure de 177km. Il faisait chaud et la brise contraire ne nous permettait pas de nous rafraîchir en raison du grand nombre de participants. La longue ligne droite vers la presqu’île de Conleau me donna assez rapidement l’impression que mes chaussures allaient être difficiles à supporter tout le long de la course, mais j’avais opté pour un modèle trail et non pas pour un modèle route car il y a beaucoup de portions de ce parcours où il sera nécessaire d’être bien cramponné et protégé de la boue et autres parties humides.
Je suis parti trop vite – pourtant avec mon expérience je ne devrais plus faire ce genre de bêtises – et je sentais que peu à peu la nécessité de ralentir se faisait ressentir de manière impérieuse. De toute façon, je voyais bien de nombreux coureurs me dépasser mais les voies étant larges je ne gênais personne. Après Conleau, npus somme peu à peu passés sur des chemins moins larges, sur le parcours du marathon de Vannes, et l’ombre faisait du bien car j’étais déjà tout trempé dégoulinant de sueur qui allait aussi mouiller mes chaussettes et donc l’intérieur de mes chaussures. Une fois le pont de Campen franchi, nous sommes passés sur d’étroits chemins ombragés avec quelque dénivellé.
Le premier poste de ravitaillement avant Arradon, au km 13 atteint en 1h23, me permit de remplir mes bouteilles et de me projeter vers le second poste de ravitaillement situé 15km plus loin. Cette partie au demeurant très belle ne va pas être la plus facile à négocier avec de nombreux passages tantôt dans des chemins étroits, tantôt sur de la route et de nombreuses portions de plage. Pas facile de garder un rythme régulier et je pense que c’est sur cette portion que j’ai commencé à payer mon départ trop vif. Il faisait encore chaud, l’air n’était pas brassé, le vent était tombé, je continuais de transpirer mais heureusement que je m’hydratais régulièrement. Je grignotais aussi de temps à autres uns barre de céréales accompagnée de compote dont j’avais garni les poches de mon sac à dos.
Arrivé à Port Blanc, km 28 en 3h15, je me ravitaillais, refaisais le plein et je repris la route sur une portion que je connaissais bien et dont je savais que la route ne serait pas toujours aisée à faire. Prochaine étape : Larmor-Baden au km 35 atteint en 4h28 puis nous serons rentrés dans la nuit. J’avais mis la frontale, conservé ma tenue trempée mais comme la tiédeur de ce début de nuit ne me donnait pas froid, je poursuivais dans un état proche de l’éponge mal essorée. Ça allait bien finir par sécher maintenant que je ne courais plus assez vite pour transpirer.
Les 17 km pour atteindre Le Bono étaient en plein jour très jolis mais là oh ultime frustration je n’allais pas pouvoir profiter de la beauté du paysage. La côte apparaissait quand même avec les lumières des habitations et on apercevait au gré du découpage de la côtes une ribambelles de petites lumières en mouvement, chacune appartenant à un de mes camarades de ce grand jeu de piste. Quelques petits picotements me rappelèrent que je n’avais pas stocké assez se sommeil en amont de la course et je commençais à craindre son appel dans des délais plus ou moins courts. Au port du Bono, km 52 en 7h03, je ne pris pas de café (j’aurais dû) mais je pris une soupe et me ravitaillais en fromage, saucisson, compote et gâteau de riz. Je ressentis l’appel du sommeil à plusieurs reprises et à Auray un coureur me proposa un peu de café que je bus en espérant repousser l’envie de dormir le plus loin possible. Après Auray, c’est vers Crac’h que nous nous dirigions mais c’était à 15km du Bono. A mon rythme il fallait compter entre 2h et 3h de course selon que j’allais marcher sur de plus longues portions qu’avant. J’arrivais au poste de ravitaillement de Crac’h après 9h51 de route (km 67) et là je me posais une trentaine de minutes le temps de manger et d’essayer de dormir un peu assis sur une chaise. Un micro sommeil bénéfique qui me permettra de repartir alors que les premières lueurs de l’aube apparaissaient.
L’étape suivante était d’arriver au bateau à Locmariaquer, au km 82. J’y arrivais en 12h12, un peu inespéré au vu de mes difficultés à courir longtemps et régulièrement. J’avais assisté au lever du soleil, rouge sur l’horizon, et me projetais vers l’avenir en souhaitant ne pas être trop en retard pour arriver en début de nuit. Mais entre espoir et réalité il y a un gouffre parfois. Mes pieds me faisaient mal en marchant donc je préférais souvent la course à la marche, mais je n’avançais plus assez vite à mon gré et commençais à compter qu’à ce rythme il n’allait pas falloir que je fasse trop de longs arrêts.
À l’embarcadère je suis monté dans un zodiac après qu’on m’ait équipé d’un poncho et d’un gilet de sauvetage. Le temps a été arrêté et reprendra au sortir du bateau, à chaque fois on passait sur des tapis d’enregistrement. Il s’est passé une vingtaine de minutes entre les deux passages sur les tapis. Sur le bateau, il faisait frais, mais couvert ainsi je n’en ressentais pas trop les effets. Quand je suis reparti de Port-Navalo je savais que les 5km jusqu’au ravitaillement n’allaient pas être aisés. Et ce fut le cas, les chemins très techniques ou les routes assez escarpées empêchaient toute progression régulière. J’arrivais au stade d’Arzon après environ 13h15 de course (km 86,7), on était proches de la mi-course mais j’avais envie de prendre mon temps pour me changer. Nouveau t-shirt, sec celui-là, puis nouvelles chaussettes après un nettoyage des pieds et un recrémage. Je mangeais, buvais du café, plein d’eau pétillante fraîche à souhait et je repris mon labeur après ces plus de 45 minutes de pause.
Prochain objectif : Sarzeau au km 120. Mais avant d’y être, il y avait 35km à faire, donc, en extrapolant, cela m’indiquait un possible passage là-bas vers 20h de course (à 15h). Je mis mon GPS à charger car la batterie était trop faible et je perdis donc toute notion d’heure. Je passais au pointage de Porh Neze au km 98 en 15h32 puis à celui de Bernon au km110 en 18h mais j’étais usé, les chemins pourtant connus me semblaient interminables, heureusement qu’une brise de mer s’était levée et qu’avec elle la brume a recouvert la côte nous apportant une bonne fraîcheur. Mais comme je n’avais plus de repère chronométrique et kilométrique je m’en remettais à ma mémoire des lieux en me disant que j’avais emprunté ces chemins à diverses reprises et que Sarzeau allait vite arriver. Mais dans mes souvenirs, ma vitesse de course était double à mon allure actuelle donc ça faussait mon ressenti.
Sarzeau était proche, je savais qu’il y avait des difficultés à franchir avant d’y arriver et elles furent à la hauteur de ce que je craignais mais j’en vins à bout.
Sarzeau, km 120 en 20h20. Plus que 57km ! En estimant une moyenne identique à celle de la première moitié, je pouvais rêver d’une arrivée dans 10 à 12h, soit entre 1h et 3h du matin. Mais on n’y était pas encore.
Après 20’ de ravitaillement et de repos relatif, je suis reparti vers Le Hézo situé à 15km de là. J’ai galéré pendant 3h30 ne pouvant pas courir tout le temps en raison des contraintes du parcours, et ne marchant que très lentement avec des plantes de pieds et des genoux douloureux. L’envie de dormir se faisait encore plus pressante et je cherchais quelque endroit pour m’allonger. Les coureurs du Trail 56km me rattrapant sur des parties souvent en monotrace, je me méfiais pour ne pas les gêner dans leur course à bonne allure, mais c’était fatiguant à la longue. Je trouvais un banc sur lequel je m’allongeais pour dormir un peu. Mais voilà, la sollicitude des coureurs du 56 au demeurant fort sympathique allait m’empêcher de trouver un bon sommeil car souvent certains me demandaient si ça allait. « Oui, merci, répondais-je à chaque fois, mais j’aimerais dormir ! ». Une fois le gros du peloton passé, quand les chemins étaient moins encombrés, je repris ma route mais au bout de 500m, je vis un attroupement. On arrivait dans un bourbier tel qu’il était impossible de ne pas tremper ses chaussures. J’avais bien besoin de ça à ce moment de la course ! Heureusement, après divers tâtonnements, j’avisai un petit sentier tracé par quelques téméraires faisant éviter la partie la plus humide pour longer l’itinéraire par un champ qui rejoignait le chemin enfin redevenu sec. Pas trop de dégâts au niveau des chaussures mais une autre perte de temps et une remise en route encore moins facile qu’avant.
Le Hézo où j’arrivais après presque 24h de course au km 135 me permit de me reposer un peu et je voulais aussi faire soigner une ampoule qui était apparue au bout d’un de mes orteils. Mais il y avait plusieurs coureurs en attente de soins si bien que je remettais de la crème sur mes pieds, réajustais mes chaussettes et enfilais de nouveau mes chaussures non sans en avoir vidé le contenu à savoir petits cailloux mesquins et autres petites branches. Ravitaillement en eau et nourriture aussi avant de prendre le cap pour Noyalo situé à 5,5km, donc à une portée de fusil. Au ravitaillement, il n’y avait que de l’eau du robinet et je cherchais en vain des WC. Pas de WC ouverts, les blocs sanitaires n’étaient pas ouverts ! Donc solution de secours, une entrée de champ conviendrait si j’en trouvais une. Je n’ai pas attendu la nuit et une fois soulagé je repris mon labeur. J’avais dû mettre plus d’une heure entre Le Hézo et Noyalo, je ne pensais pas à en mettre 4 de plus pour Séné, distant de 14km seulement ! Mais mon périple fut ponctué de nombreuses tentatives de sommeil tantôt sur un muret de propriété, tantôt accoudé sur une barrière. C’est qu’il ne pousse pas beaucoup de bancs dans le coin et les zones herbeuses devenaient humides avec la tombée progressive de la nuit. La galère continuait et les serre-files du Trail 56km m’ont « ramassé » et tenu compagnie pour m’éviter de finir au fossé. C’est que je progressais en somnolant et les chemins sinagots étaient sombres malgré ma frontale pour les éclairer. Je revis d’ailleurs mes potes les monstres de la veille nés de mon imagination et des ombres créées par la lumière de mon guide frontal.
Arrivé à Séné, je pris la décision de me faire soigner mon ampoule et quitte à finir autant ne pas le faire comme un zombie alors que je mettre 32h ou 36h ou plus, l’important maintenant était d’aller au bout, et j’avais le temps. Donc une fois soigné, je m’allongeais sur un lit de camp pour dormir. Sans doute pas profondément mais assez pour que sur les coups de 5h je reprenne la course. Cet arrêt de plus de 5 heures me fit du bien et quand je me remis à courir, j’ai vite senti que j’avais de bonnes jambes, pas de courbatures des 155 premiers km. Il en restait 22 et je n’allais pas lâcher l’affaire comme ça. Bon, bien sûr, c’est quand on veut courir longtemps qu’il se présente des obstacles et la partie sud de Séné, une presqu’île commençant par la Pointe du Bil jusqu’à Port Anna fut assez technique et m’a obligé souvent à marcher alors que je ne demandais qu’à courir. Les 8,2km jusqu’au ravitaillement et poste de pointage de Barrarac’h ont été faits en 1h12’, pas de quoi casser trois pattes à un canard mais ça me faisait avancer. J’ai néanmoins dû attendre au ravitaillement qu’on me donne de l’eau car les robinets étaient « débranchés » comme s’il n’y avait plus de coureurs en besoin d’eau sur le parcours.
Les 14 derniers km pour rallier l’arrivée ont été mes plus rapides mis à part ceux du début de course : 1h37’ soit une allure plus conforme à ce que j’attends de la course à pied. Peu de difficultés certes sont venues perturber ma fin de course et je remontais plein de coureurs étonnés que je puisse encore courir et surtout à cette allure souvent proche des 9km/h ; je leur répondais alors que quand on se repose 5h, après c’est normal d’avoir des jambes et je n’avais plus de problèmes de sommeil non plus.
L’arrivée sur Vannes aurait été trop belle s’il ne s’était pas mis à pleuvoir au niveau de Cantizac où je zappais le ravitaillement (pas vu). La fin fut « courte » par rapport à ce que je craignais et ce fut avec un grand soulagement que je franchis les tapis d’arrivée. Je reçus ma médaille ainsi que le débardeur de finisher de ces 177km.
Pas mécontent car j’ai fini le Grand Raid du Golfe. Seulement déçu de ma mauvaise gestion du début de course, trop rapide, des quelques soucis de pieds générés par le port de mes chaussures de trail sur du très long kilométrage (mais je n’allais pas courir en running de route, il y a des endroits où ça ne serait pas passé) et surtout mon gros déficit en terme de gestion du sommeil. Il va falloir que j’apprenne la technique du micro sommeil et bien entendu que j’épargne à ce niveau les quelques jours précédant la course.
Voilà pour ce CR où j’ai dû oublier plein de choses à dire mais qui sont enfouies dans ma tête et qui reviendront peu à peu.
à+ynwa
Après de nombreuses participations au Trail et au Raid du Golfe, j’avais envie de tenter l’aventure sur le grand format de ces courses organisées dans le cadre de l’Ultramarin.
L’opportunité de pouvoir me libérer le vendredi (RTT) m’a permis de prendre le départ des 177km.
J’ai pu arriver en milieu de matinée afin de trouver une place de stationnement pas très éloignée du site du départ et de l’arrivée car je ne voulais pas passer trop de temps à me déplacer à faire d’incessantes navettes entre mon véhicule et le site de la course. De la même manière, j’anticipais l’après course où quand on est bien fatigué on n’a pas envie de faire des kilomètres supplémentaires à aller chercher ses affaires puis se rendre à la douche …
Le problème fut de gérer les 9h d’attente. J’espérais pouvoir trouver un endroit pour dormir mais comme il faisait chaud il fallait aller trouver de l’ombre. Après un copieux repas de galettes et de crêpes et tout l’après-midi à me reposer, sans pouvoir dormir, on nous apprit que le départ était repoussé d’une heure et donc il passait à 19h. Il ferait nuit et donc sans doute moins chaud plus tôt.
J’avais préparé mes sacs à dos, les deux se superposant, et à force de les avoir faits et refaits à plusieurs reprises, j’hésitais à savoir quoi y laisser et ce que je pouvais en retirer. Je préparais aussi le sac pour Arzon où j’avais prévu de changer de t-shirt et de chaussettes. J’essayais de m’alléger le plus possible mais les sacs restaient quand même assez lourds avec les 2 litres de boissons imposés par l’organisation.
L’heure du départ se rapprochait enfin et je me présentais sur le site du départ où il commençait à y avoir du monde mais, paradoxalement, la ligne de départ n’était pas inaccessible et je m’y installais surtout pour profiter de l’ombre de l’arche. Le décompte final allait commencer avec la traditionnelle bande son de Kavinsky. Un coup de corne marqua le départ et tout un chacun déclencha son chrono. Un demi-tour après 100m puis nous voilà lancés vers notre aventure de 177km. Il faisait chaud et la brise contraire ne nous permettait pas de nous rafraîchir en raison du grand nombre de participants. La longue ligne droite vers la presqu’île de Conleau me donna assez rapidement l’impression que mes chaussures allaient être difficiles à supporter tout le long de la course, mais j’avais opté pour un modèle trail et non pas pour un modèle route car il y a beaucoup de portions de ce parcours où il sera nécessaire d’être bien cramponné et protégé de la boue et autres parties humides.
Je suis parti trop vite – pourtant avec mon expérience je ne devrais plus faire ce genre de bêtises – et je sentais que peu à peu la nécessité de ralentir se faisait ressentir de manière impérieuse. De toute façon, je voyais bien de nombreux coureurs me dépasser mais les voies étant larges je ne gênais personne. Après Conleau, npus somme peu à peu passés sur des chemins moins larges, sur le parcours du marathon de Vannes, et l’ombre faisait du bien car j’étais déjà tout trempé dégoulinant de sueur qui allait aussi mouiller mes chaussettes et donc l’intérieur de mes chaussures. Une fois le pont de Campen franchi, nous sommes passés sur d’étroits chemins ombragés avec quelque dénivellé.
Le premier poste de ravitaillement avant Arradon, au km 13 atteint en 1h23, me permit de remplir mes bouteilles et de me projeter vers le second poste de ravitaillement situé 15km plus loin. Cette partie au demeurant très belle ne va pas être la plus facile à négocier avec de nombreux passages tantôt dans des chemins étroits, tantôt sur de la route et de nombreuses portions de plage. Pas facile de garder un rythme régulier et je pense que c’est sur cette portion que j’ai commencé à payer mon départ trop vif. Il faisait encore chaud, l’air n’était pas brassé, le vent était tombé, je continuais de transpirer mais heureusement que je m’hydratais régulièrement. Je grignotais aussi de temps à autres uns barre de céréales accompagnée de compote dont j’avais garni les poches de mon sac à dos.
Arrivé à Port Blanc, km 28 en 3h15, je me ravitaillais, refaisais le plein et je repris la route sur une portion que je connaissais bien et dont je savais que la route ne serait pas toujours aisée à faire. Prochaine étape : Larmor-Baden au km 35 atteint en 4h28 puis nous serons rentrés dans la nuit. J’avais mis la frontale, conservé ma tenue trempée mais comme la tiédeur de ce début de nuit ne me donnait pas froid, je poursuivais dans un état proche de l’éponge mal essorée. Ça allait bien finir par sécher maintenant que je ne courais plus assez vite pour transpirer.
Les 17 km pour atteindre Le Bono étaient en plein jour très jolis mais là oh ultime frustration je n’allais pas pouvoir profiter de la beauté du paysage. La côte apparaissait quand même avec les lumières des habitations et on apercevait au gré du découpage de la côtes une ribambelles de petites lumières en mouvement, chacune appartenant à un de mes camarades de ce grand jeu de piste. Quelques petits picotements me rappelèrent que je n’avais pas stocké assez se sommeil en amont de la course et je commençais à craindre son appel dans des délais plus ou moins courts. Au port du Bono, km 52 en 7h03, je ne pris pas de café (j’aurais dû) mais je pris une soupe et me ravitaillais en fromage, saucisson, compote et gâteau de riz. Je ressentis l’appel du sommeil à plusieurs reprises et à Auray un coureur me proposa un peu de café que je bus en espérant repousser l’envie de dormir le plus loin possible. Après Auray, c’est vers Crac’h que nous nous dirigions mais c’était à 15km du Bono. A mon rythme il fallait compter entre 2h et 3h de course selon que j’allais marcher sur de plus longues portions qu’avant. J’arrivais au poste de ravitaillement de Crac’h après 9h51 de route (km 67) et là je me posais une trentaine de minutes le temps de manger et d’essayer de dormir un peu assis sur une chaise. Un micro sommeil bénéfique qui me permettra de repartir alors que les premières lueurs de l’aube apparaissaient.
L’étape suivante était d’arriver au bateau à Locmariaquer, au km 82. J’y arrivais en 12h12, un peu inespéré au vu de mes difficultés à courir longtemps et régulièrement. J’avais assisté au lever du soleil, rouge sur l’horizon, et me projetais vers l’avenir en souhaitant ne pas être trop en retard pour arriver en début de nuit. Mais entre espoir et réalité il y a un gouffre parfois. Mes pieds me faisaient mal en marchant donc je préférais souvent la course à la marche, mais je n’avançais plus assez vite à mon gré et commençais à compter qu’à ce rythme il n’allait pas falloir que je fasse trop de longs arrêts.
À l’embarcadère je suis monté dans un zodiac après qu’on m’ait équipé d’un poncho et d’un gilet de sauvetage. Le temps a été arrêté et reprendra au sortir du bateau, à chaque fois on passait sur des tapis d’enregistrement. Il s’est passé une vingtaine de minutes entre les deux passages sur les tapis. Sur le bateau, il faisait frais, mais couvert ainsi je n’en ressentais pas trop les effets. Quand je suis reparti de Port-Navalo je savais que les 5km jusqu’au ravitaillement n’allaient pas être aisés. Et ce fut le cas, les chemins très techniques ou les routes assez escarpées empêchaient toute progression régulière. J’arrivais au stade d’Arzon après environ 13h15 de course (km 86,7), on était proches de la mi-course mais j’avais envie de prendre mon temps pour me changer. Nouveau t-shirt, sec celui-là, puis nouvelles chaussettes après un nettoyage des pieds et un recrémage. Je mangeais, buvais du café, plein d’eau pétillante fraîche à souhait et je repris mon labeur après ces plus de 45 minutes de pause.
Prochain objectif : Sarzeau au km 120. Mais avant d’y être, il y avait 35km à faire, donc, en extrapolant, cela m’indiquait un possible passage là-bas vers 20h de course (à 15h). Je mis mon GPS à charger car la batterie était trop faible et je perdis donc toute notion d’heure. Je passais au pointage de Porh Neze au km 98 en 15h32 puis à celui de Bernon au km110 en 18h mais j’étais usé, les chemins pourtant connus me semblaient interminables, heureusement qu’une brise de mer s’était levée et qu’avec elle la brume a recouvert la côte nous apportant une bonne fraîcheur. Mais comme je n’avais plus de repère chronométrique et kilométrique je m’en remettais à ma mémoire des lieux en me disant que j’avais emprunté ces chemins à diverses reprises et que Sarzeau allait vite arriver. Mais dans mes souvenirs, ma vitesse de course était double à mon allure actuelle donc ça faussait mon ressenti.
Sarzeau était proche, je savais qu’il y avait des difficultés à franchir avant d’y arriver et elles furent à la hauteur de ce que je craignais mais j’en vins à bout.
Sarzeau, km 120 en 20h20. Plus que 57km ! En estimant une moyenne identique à celle de la première moitié, je pouvais rêver d’une arrivée dans 10 à 12h, soit entre 1h et 3h du matin. Mais on n’y était pas encore.
Après 20’ de ravitaillement et de repos relatif, je suis reparti vers Le Hézo situé à 15km de là. J’ai galéré pendant 3h30 ne pouvant pas courir tout le temps en raison des contraintes du parcours, et ne marchant que très lentement avec des plantes de pieds et des genoux douloureux. L’envie de dormir se faisait encore plus pressante et je cherchais quelque endroit pour m’allonger. Les coureurs du Trail 56km me rattrapant sur des parties souvent en monotrace, je me méfiais pour ne pas les gêner dans leur course à bonne allure, mais c’était fatiguant à la longue. Je trouvais un banc sur lequel je m’allongeais pour dormir un peu. Mais voilà, la sollicitude des coureurs du 56 au demeurant fort sympathique allait m’empêcher de trouver un bon sommeil car souvent certains me demandaient si ça allait. « Oui, merci, répondais-je à chaque fois, mais j’aimerais dormir ! ». Une fois le gros du peloton passé, quand les chemins étaient moins encombrés, je repris ma route mais au bout de 500m, je vis un attroupement. On arrivait dans un bourbier tel qu’il était impossible de ne pas tremper ses chaussures. J’avais bien besoin de ça à ce moment de la course ! Heureusement, après divers tâtonnements, j’avisai un petit sentier tracé par quelques téméraires faisant éviter la partie la plus humide pour longer l’itinéraire par un champ qui rejoignait le chemin enfin redevenu sec. Pas trop de dégâts au niveau des chaussures mais une autre perte de temps et une remise en route encore moins facile qu’avant.
Le Hézo où j’arrivais après presque 24h de course au km 135 me permit de me reposer un peu et je voulais aussi faire soigner une ampoule qui était apparue au bout d’un de mes orteils. Mais il y avait plusieurs coureurs en attente de soins si bien que je remettais de la crème sur mes pieds, réajustais mes chaussettes et enfilais de nouveau mes chaussures non sans en avoir vidé le contenu à savoir petits cailloux mesquins et autres petites branches. Ravitaillement en eau et nourriture aussi avant de prendre le cap pour Noyalo situé à 5,5km, donc à une portée de fusil. Au ravitaillement, il n’y avait que de l’eau du robinet et je cherchais en vain des WC. Pas de WC ouverts, les blocs sanitaires n’étaient pas ouverts ! Donc solution de secours, une entrée de champ conviendrait si j’en trouvais une. Je n’ai pas attendu la nuit et une fois soulagé je repris mon labeur. J’avais dû mettre plus d’une heure entre Le Hézo et Noyalo, je ne pensais pas à en mettre 4 de plus pour Séné, distant de 14km seulement ! Mais mon périple fut ponctué de nombreuses tentatives de sommeil tantôt sur un muret de propriété, tantôt accoudé sur une barrière. C’est qu’il ne pousse pas beaucoup de bancs dans le coin et les zones herbeuses devenaient humides avec la tombée progressive de la nuit. La galère continuait et les serre-files du Trail 56km m’ont « ramassé » et tenu compagnie pour m’éviter de finir au fossé. C’est que je progressais en somnolant et les chemins sinagots étaient sombres malgré ma frontale pour les éclairer. Je revis d’ailleurs mes potes les monstres de la veille nés de mon imagination et des ombres créées par la lumière de mon guide frontal.
Arrivé à Séné, je pris la décision de me faire soigner mon ampoule et quitte à finir autant ne pas le faire comme un zombie alors que je mettre 32h ou 36h ou plus, l’important maintenant était d’aller au bout, et j’avais le temps. Donc une fois soigné, je m’allongeais sur un lit de camp pour dormir. Sans doute pas profondément mais assez pour que sur les coups de 5h je reprenne la course. Cet arrêt de plus de 5 heures me fit du bien et quand je me remis à courir, j’ai vite senti que j’avais de bonnes jambes, pas de courbatures des 155 premiers km. Il en restait 22 et je n’allais pas lâcher l’affaire comme ça. Bon, bien sûr, c’est quand on veut courir longtemps qu’il se présente des obstacles et la partie sud de Séné, une presqu’île commençant par la Pointe du Bil jusqu’à Port Anna fut assez technique et m’a obligé souvent à marcher alors que je ne demandais qu’à courir. Les 8,2km jusqu’au ravitaillement et poste de pointage de Barrarac’h ont été faits en 1h12’, pas de quoi casser trois pattes à un canard mais ça me faisait avancer. J’ai néanmoins dû attendre au ravitaillement qu’on me donne de l’eau car les robinets étaient « débranchés » comme s’il n’y avait plus de coureurs en besoin d’eau sur le parcours.
Les 14 derniers km pour rallier l’arrivée ont été mes plus rapides mis à part ceux du début de course : 1h37’ soit une allure plus conforme à ce que j’attends de la course à pied. Peu de difficultés certes sont venues perturber ma fin de course et je remontais plein de coureurs étonnés que je puisse encore courir et surtout à cette allure souvent proche des 9km/h ; je leur répondais alors que quand on se repose 5h, après c’est normal d’avoir des jambes et je n’avais plus de problèmes de sommeil non plus.
L’arrivée sur Vannes aurait été trop belle s’il ne s’était pas mis à pleuvoir au niveau de Cantizac où je zappais le ravitaillement (pas vu). La fin fut « courte » par rapport à ce que je craignais et ce fut avec un grand soulagement que je franchis les tapis d’arrivée. Je reçus ma médaille ainsi que le débardeur de finisher de ces 177km.
Pas mécontent car j’ai fini le Grand Raid du Golfe. Seulement déçu de ma mauvaise gestion du début de course, trop rapide, des quelques soucis de pieds générés par le port de mes chaussures de trail sur du très long kilométrage (mais je n’allais pas courir en running de route, il y a des endroits où ça ne serait pas passé) et surtout mon gros déficit en terme de gestion du sommeil. Il va falloir que j’apprenne la technique du micro sommeil et bien entendu que j’épargne à ce niveau les quelques jours précédant la course.
Voilà pour ce CR où j’ai dû oublier plein de choses à dire mais qui sont enfouies dans ma tête et qui reviendront peu à peu.
à+ynwa
par ynwa
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- bianchi77
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Bravo quelle aventure.
par bianchi77
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- kyoden
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Sacré course, ça n'a pas été facile mais tu as l'air d'avoir bien fini.
Bonne récupération.
Bonne récupération.
par kyoden
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- rycker
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Bravo Fabrice d'être allé au terme de cette aventure (je n'en doutais pas venant de ta part), je suis surpris vu ta grande expérience que tu es mis autant de temps mais le temps qu'il a fait y est aussi certainement pour quelque chose et partir trop vite n'était, ce jour, certes, pas le bon choix( pour ma part je n'ai jamais autant transpiré de toute ma vie, trempé et dégoulinant de sueur des premiers hectomètres jusqu'au 50éme !!)
Félicitations à Toi
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par rycker
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- Patrick57
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Félicitations Fabrice pour avoir bouclé ce Grand Raid du Golfe !!
Certes ce n'était pas facile (d'autant moins vu la météo), mais tu as réussi à gérer ta course pour arriver au bout malgré la fatigue et les nombreuses difficultés rencontrés.
Merci pour ton superbe récit très détaillé (comme toujours) !
Bonne suite de récup !
PS: le comportement des coureurs du 56 était normal (j'en aurais fait autant je pense) même si de ton côté tu aurais préféré pouvoir dormir et je comprends aussi
Certes ce n'était pas facile (d'autant moins vu la météo), mais tu as réussi à gérer ta course pour arriver au bout malgré la fatigue et les nombreuses difficultés rencontrés.
Merci pour ton superbe récit très détaillé (comme toujours) !
Bonne suite de récup !
PS: le comportement des coureurs du 56 était normal (j'en aurais fait autant je pense) même si de ton côté tu aurais préféré pouvoir dormir et je comprends aussi
par Patrick57
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- Cyril27
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Merci beaucoup pour ton récit et félicitation pour ta course!
par Cyril27
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