mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
- franck
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mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D- a été créé par franck
Posted il y a 10 ans 2 mois #326544
Piau, vendredi 22 aout, il est 7H40 et le car vient de nous déposer à la station (1800m). Un gars de l’orga nous fait rentrer dans une salle hors-sac pour le ski en hivers pour que nous ne restions pas 1H20 à attendre dans le froid dehors. Le temps est gris et nous sommes prévenu : froid, pluie, brouillard, et orage au programme de ces 20 prochaines heures. Pour les survivants ca devrait être mieux dans le créneau 20/40 heures suivantes …..
Je patiente tranquillement sur une chaise et cherche à faire une petite sieste (réveillé depuis 2H30 ce matin….). Des petits groupes se forment à droite à gauche… Vers 8H15, mes copains d’entrainements et de galères arrivent à leurs tours. Petites discussions, ca se chambre, quelques photos de groupe ou individuel : pour l’instant on est et on fait les beaux.
8H45 nous sortons sur la place devant l’arche de départ. La tension monte un peu. Un peu normal vu le chantier qui nous attend. Huit mois à attendre et préparer cela, et on a du mal à réaliser que le grand jour c’est déjà maintenant.
Musique de Coldplay et hop c’est le départ qui est donné à 9H00 pétantes. Nous nous engageons dans une descente avant d’attaquer les 750m de D+ d’une première boucle qui nous ramènera à la station de ski. Ca monte sec jusqu’à 2500m d’altitude (on reste sous les nuages, cool…) puis on redescend dans un pierrier (le premier d’une très très longue série) pour revenir sur la station (je sais c’est con, mais faut pas s’attendre non plus à un truc très intelligent…). Première barrière horaire (9km, 744m D+ et 778m de D- ) passée en 1H29 (46 minutes d’avance : cool) en 266 ème position. Je suis parti trop vite… tant pis.
Nous entamons ensuite le contournement du cirque de Piau pour rejoindre le port de Campbieil qui nous rajoutera 770 m de D+ dans les cuissots. Je marche à bonne allure, pas question de courir, la journée sera longue. La pluie commence à tomber et le tonnerre gronde sur l’autre versant. Il fait froid, très froid (bonnet et gants). Pluie, vent violent et froid au sommet du col, je ne traine pas et attaque la descente jusqu’à Gèdre.
10 km et 1500 m de D- cette descente. Pas de gros souvenir mis-à-part une pluie sournoise et une douleur au genou droite du fait du froid je pense. Ca va être une grosse, grosse galère. On sert les dents. J’arrive à Gèdre où je vois pour la dernière fois un ami de mon village qui repart devant moi. Gédre, 2nd barrière (25ème km, 1515m D+, 2224m D-) passé en 297ème position en 4H48 (1H42 d’avance sur la barrière !). En bas, je vois également un ami de la région qui pars un peu devant moi. Je lui fais part de ma mésaventure avec mon genou. Sa fille, veut me strapper. Je lui propose de voir la situation plus tard à Gavarnie. Pour l’instant ce sera Synthol (j’ai pas été malin sur ce coup là….le strap aurait été déjà le bienvenu).
Je vous dis que ce truc, c’est pas très très intelligent…. Car après la descente, maintenant c’est 1500m de D+ à gravir sur environ 14 km. La pluie se calme puis redouble d’intensité (avec du tonnerre, mais cette fois-ci on est grosso-modo dessous…). On atteint le barrage du lac des Gloriettes. Parait que c’est joli… Parait… Il faudra revenir. Tout d’un coup, petit miracle, les nuages se dissipent un peu et on voit le cirque d’Estaubé dans lequel on se dirige. Et c’est la montée à la hourquette d’Alans que l’on grimpe (très péniblement) dans le brouillard. Maintenant c’est le genou gauche qui me fait mal en montant.
En haut de ce col, c’est reparti pour une descente d’enfer de 1000m de D- à près de 20% pour rejoindre Gavarnie. Le début de la descente est aérienne et très humide et je prend un bon soleil sur une dalle glissante. Le brouillard froid est bien présent et mon genou droit me fait de nouveau affreusement mal dans la descente. Petit arrêt au refuge d’Espuguettes au 41ème km pour une bonne soupe aux asperges inattendue. Ce sont des moments qui font vraiment du bien.
L’arrivée au Gave de Gavarnie se fait après une belle descente et je sens un peu moins mon genou droit. Avant d’aller à Gavarnie, il faut faire l’aller/retour à l’hôtel du cirque. Il est autour de 19H00 et j’appelle mon épouse et mes filles pour leur donner de mes nouvelles. Elles sont comme des folles devant le PC à nous suivre (Elles connaissent 3 autres amis du village présents sur le circuit). Ca fait du bien au moral. Arrivée à Gavarnie (50ème km, 3215m D+, 3709m D-) en 300ème position en 11H23 (2H30 d’avance sur la barrière, toujours cool). Le problème c’est qu’il est 20H30 et que la nuit va bientôt tomber.
Je reste plus d’1/2H en ce point, un ami m’attend pour que l’on passe la nuit ensemble et on en attend un autre pour repartir à 3. Je me fais strapper le genou droit par une demoiselle: elle ne le sait pas encore, mais elle va faire un miracle (dommage que j’ai refusé qu’elle me fasse également le genou gauche qui n’était pas trop douloureux à ce moment là). Je profite de cette pose pour bien m’alimenter, mettre le collant long, le bonnet et je sors la frontale. A nous deux la nuit !! Ce n’est pas le cas de tout le monde ici : il y aura beaucoup d’abandons à Gavarnie.
On repart donc à 3 en plaisantant et se disant des conneries du style : promis on se met au babyfoot ou à la pétanque. Il en faut du moral car cette nuit sera une grosse galère dans le brouillard et le froid sur du sentier très très technique. Nous descendons un chemin boueux pour atteindre Bas Bareilles puis c’est la dure montée vers la crête de Pouey Boucou. On macère dans notre jus depuis des heures et on commence à faire des valdingues dans la boue des sentiers. Sans parler des balises que l’on ne voit pas toujours et qui nous amène à nous tromper…. Foutus chemins souvent plus proche du sentier à moutons avec des petits arbustes qui vous griffent les jambes et accrochent les bâtons.
Arrivé enfin en haut de la crête, mes amis me demandent de partir seul : l’un à trop mal à un genou et l’autre dit ne plus avoir de force…. C’est un peu le cœur serré que je les quitte et presse donc le pas pour récupérer un petit groupe dans la descente (un gars chante « gare au gorille » pour se donner de l’entrain) et atteindre le ravito du parking de Bué. Celui-ci est signalé par un gyrophare et quelques bénévoles nous accueillent à 1H33 du matin sous la pluie, et le froid. Il y a pas mal de gars transis de froid : je sens que pour eux c’est fini. De mon côté j’ai plus mal aux genoux et je peux avancer…enfin une bonne nouvelle (qui ne va pas durer…).
Je repars donc assez rapidement. Le petit groupe a explosé entre abandon et un peu de chacun pour soi. Je descends donc une piste qui devient un sentier bien gras. Arrivé en bas, il faut remonter au roc d’Arrode une montée courte d’environ 2km mais une montée de dingue à près de 20%. Il y a 2 bénévoles en haut du roc pour nous présenter les passages délicats qu’ils ont sécurisé. Pas question de faire un faux pas sinon c’est aller simple pour la vallée….
La descente qui suit est carrément pourrie (je mets 1H pour faire les 2km de descente) : 28% de moyenne dans de la boue et le brouillard (on n’y voit pas à 3 mètres). Je jure pas mal… A mi pente je tombe sur une ferme où un couple d’agriculteur est dehors et me propose un thé et du pain d’épice. Il est quelque chose comme 3H du matin et je remercie ces gens formidables pour ce moment de réconfort!!
Petite montée et longue descente pour arriver à Luz Saint Sauveur sur le coup de 5H30 du matin. Je commence à m’endormir tout en marchant sur la route goudronnée. En écrivant ces lignes, j’ai maintenant le souvenir de la boite de nuit de Luz-Saint Sauveur avec les petits jeunes qui en sortent tout aussi fatigués que moi (mais en plus propre…). C’est dans ces moments là que je reçois un SMS (nièce et neveu qui reviennent de bringue ègalement) qui me fait chaud au cœur.
La femme d’un des 2 amis m’attend à Luz et on marche cote à cote jusqu’à la base vie. Elle me parle et je me force à lui répondre : cela me réveille. Elle m’apprend que l’un a abandonné au parking Bué mais que son mari a continué… Il est donc quelque part derrière moi. J’arrive donc dans la base vie où je récupère un sac que j’ai fait acheminé : linge propre, gant et serviette, des produits énergétiques. Je prends donc le temps de me laver dans un lavabo au milieu d’une cour des miracles. C’est crade, on doit bien puer, mais il fait chaud et il y a de la lumière ! Je prends mon temps et vais voir un podologue : j’ai les pieds dans un sale état (plantes des pieds toutes plissées par les heures dans l’humidité….). Rien à faire sinon mettre du Nok et je renfile des chaussettes toutes propres dans mes chaussures très sales (je sais, ça aussi c’est très con….). L’ami vient d’arriver : il a complètement décroché dans sa tête et ne veut plus continuer. De mon côté je passe en mode « guerrier » : sauf blessure, j’ai décidé de ne m’arrêter que si les barrières m’y ordonne. Il est 7H06 quand je pars de Luz (24 minutes avant la fin de la barrière officielle – en fait je ne le savais pas, mais à ce stade elle avait été repoussée de plusieurs heures compte tenu des conditions…). 76ème km, 4524m D+, 5658m D- 240ème position.
De là ce n’est pas très compliqué : il y a 19km de montée qui nous attend avec 1750 m de dénivellé positif… Une broutille. Non, je plaisante, c’est loin d’être facile. Il y a en a qui me doublent rapidement : ce sont les cadors du 160 km que l’on a retrouvé depuis Luz Saint Sauveur – des monstres. Je double et me fait doubler par des lents comme moi : ce sont les rescapés du 120…
Le manque de sommeil se fait sentir. Je connais mes premières hallucinations/illusions : mon road book m’indiquait la présence d’un funiculaire au km 84 : je l’ai vu une dizaine de fois à la sortie de virage dans des bois, alors qu’il ne s’agissait au final que de formes prises par les branches et les troncs des arbres.
J’arrive à Tournaboup à 1400 m d’altitude sous le Tourmalet : il reste encore 1000m à monter ! 25H41 que je suis parti (ca y est j’ai fait mon premier 24H !!) 88ème km, 5470m D+, 5860m D-, 221ème position. (il y a du avoir de la casse à Tournaboup, car je n’ai pas l’impression d’avoir gratter 19 places dans cette première partie de montée…)
Montée ensuite très très longue (2H30) à la cabane d’Aygue-cluses. Ravitaillement en eau. Je passe quelques minutes allongé dans l’herbe à boire. J’ai oublié de le dire : il est presque 13H et on est en plein cagnard maintenant !!! Montée terrible à la hourquette Nere. La pente est très sévère au sommet. Je ne le sais pas encore mais c’est maintenant que la grosse, très grosse galère va commencer. Pour l’instant au sommet je profite de la vue énorme sur les lac et laquets en contrebas du col avec les sommets à plus de 3000 environnant.
Début de la descente et là je vois que cela ne va pas, mais pas du tout : douleur terrible sur le genou gauche (le droit est strappé pour ceux qui n’ont pas suivi !!) et puis les 2 voutes plantaires qui me fouettent à chaque pas sur les cailloux. La descente vers le lac de l’Oule est donc un long, très long calvaire. Arrivé au lac, il y a un petit ravitaillement sauvage improvisé. Je m’arrête et en profite largement je sens que suis bien maintenant dans les barrières horaires.
3km de montée suive avant d’arriver sur la dernière barrière : chalet Merlan que j’avais vu de nuit l’année passée sur le 80km. J’ai 2H d’avance sur la barrière et j’ai bien rattrapé mon retard. 104ème km (ça y est je suis centbornard à ce moment !!), 32H de « course », 6670m de D+, 6500m de D-, 224ème position.
Dernière montée (enfin!) au col de Portet en une demi heure : il fait pas chaud en haut et on a retrouvé le brouillard. Il ne reste plus que 12km de descente avec 1400 m de D-. On pourrait croire que c’est une broutille, mais il me faudra plus de 3H pour boucler le chantier avec des douleurs terribles (je m’arrête 10 minutes en haut de Portet pour essayer de strapper avec ce qu’il me reste de bande le genou gauche). Les pieds chauffent à faire fondre les chaussures. Encore des sentiers pourris avant de retrouver le goudron. J’appelle la petite famille dans le dernier km pour lui dire que c’est bientôt fini. Je raccroche, arrive sur Vielle Aure vers 20H30 et au milieu de la foule, tout lâche… Un moment très fort.
117 km, 6800 m de D+, 7915m de D-, 228ème en 35H37m56s, finisher de la première édition du tour des Cirques du Grand Raid des Pyrénées.
A titre indicatif nous étions 497 inscrits, et 236 concurrents finiront l’épreuve (gagné en 16H53 !!).
Reste des moments très, très fort humainement. Indépendamment de l’aspect sportif cela reste une forte expérience de, et sur soi : le mental l’emporte, et de loin, sur le physique.
Je patiente tranquillement sur une chaise et cherche à faire une petite sieste (réveillé depuis 2H30 ce matin….). Des petits groupes se forment à droite à gauche… Vers 8H15, mes copains d’entrainements et de galères arrivent à leurs tours. Petites discussions, ca se chambre, quelques photos de groupe ou individuel : pour l’instant on est et on fait les beaux.
8H45 nous sortons sur la place devant l’arche de départ. La tension monte un peu. Un peu normal vu le chantier qui nous attend. Huit mois à attendre et préparer cela, et on a du mal à réaliser que le grand jour c’est déjà maintenant.
Musique de Coldplay et hop c’est le départ qui est donné à 9H00 pétantes. Nous nous engageons dans une descente avant d’attaquer les 750m de D+ d’une première boucle qui nous ramènera à la station de ski. Ca monte sec jusqu’à 2500m d’altitude (on reste sous les nuages, cool…) puis on redescend dans un pierrier (le premier d’une très très longue série) pour revenir sur la station (je sais c’est con, mais faut pas s’attendre non plus à un truc très intelligent…). Première barrière horaire (9km, 744m D+ et 778m de D- ) passée en 1H29 (46 minutes d’avance : cool) en 266 ème position. Je suis parti trop vite… tant pis.
Nous entamons ensuite le contournement du cirque de Piau pour rejoindre le port de Campbieil qui nous rajoutera 770 m de D+ dans les cuissots. Je marche à bonne allure, pas question de courir, la journée sera longue. La pluie commence à tomber et le tonnerre gronde sur l’autre versant. Il fait froid, très froid (bonnet et gants). Pluie, vent violent et froid au sommet du col, je ne traine pas et attaque la descente jusqu’à Gèdre.
10 km et 1500 m de D- cette descente. Pas de gros souvenir mis-à-part une pluie sournoise et une douleur au genou droite du fait du froid je pense. Ca va être une grosse, grosse galère. On sert les dents. J’arrive à Gèdre où je vois pour la dernière fois un ami de mon village qui repart devant moi. Gédre, 2nd barrière (25ème km, 1515m D+, 2224m D-) passé en 297ème position en 4H48 (1H42 d’avance sur la barrière !). En bas, je vois également un ami de la région qui pars un peu devant moi. Je lui fais part de ma mésaventure avec mon genou. Sa fille, veut me strapper. Je lui propose de voir la situation plus tard à Gavarnie. Pour l’instant ce sera Synthol (j’ai pas été malin sur ce coup là….le strap aurait été déjà le bienvenu).
Je vous dis que ce truc, c’est pas très très intelligent…. Car après la descente, maintenant c’est 1500m de D+ à gravir sur environ 14 km. La pluie se calme puis redouble d’intensité (avec du tonnerre, mais cette fois-ci on est grosso-modo dessous…). On atteint le barrage du lac des Gloriettes. Parait que c’est joli… Parait… Il faudra revenir. Tout d’un coup, petit miracle, les nuages se dissipent un peu et on voit le cirque d’Estaubé dans lequel on se dirige. Et c’est la montée à la hourquette d’Alans que l’on grimpe (très péniblement) dans le brouillard. Maintenant c’est le genou gauche qui me fait mal en montant.
En haut de ce col, c’est reparti pour une descente d’enfer de 1000m de D- à près de 20% pour rejoindre Gavarnie. Le début de la descente est aérienne et très humide et je prend un bon soleil sur une dalle glissante. Le brouillard froid est bien présent et mon genou droit me fait de nouveau affreusement mal dans la descente. Petit arrêt au refuge d’Espuguettes au 41ème km pour une bonne soupe aux asperges inattendue. Ce sont des moments qui font vraiment du bien.
L’arrivée au Gave de Gavarnie se fait après une belle descente et je sens un peu moins mon genou droit. Avant d’aller à Gavarnie, il faut faire l’aller/retour à l’hôtel du cirque. Il est autour de 19H00 et j’appelle mon épouse et mes filles pour leur donner de mes nouvelles. Elles sont comme des folles devant le PC à nous suivre (Elles connaissent 3 autres amis du village présents sur le circuit). Ca fait du bien au moral. Arrivée à Gavarnie (50ème km, 3215m D+, 3709m D-) en 300ème position en 11H23 (2H30 d’avance sur la barrière, toujours cool). Le problème c’est qu’il est 20H30 et que la nuit va bientôt tomber.
Je reste plus d’1/2H en ce point, un ami m’attend pour que l’on passe la nuit ensemble et on en attend un autre pour repartir à 3. Je me fais strapper le genou droit par une demoiselle: elle ne le sait pas encore, mais elle va faire un miracle (dommage que j’ai refusé qu’elle me fasse également le genou gauche qui n’était pas trop douloureux à ce moment là). Je profite de cette pose pour bien m’alimenter, mettre le collant long, le bonnet et je sors la frontale. A nous deux la nuit !! Ce n’est pas le cas de tout le monde ici : il y aura beaucoup d’abandons à Gavarnie.
On repart donc à 3 en plaisantant et se disant des conneries du style : promis on se met au babyfoot ou à la pétanque. Il en faut du moral car cette nuit sera une grosse galère dans le brouillard et le froid sur du sentier très très technique. Nous descendons un chemin boueux pour atteindre Bas Bareilles puis c’est la dure montée vers la crête de Pouey Boucou. On macère dans notre jus depuis des heures et on commence à faire des valdingues dans la boue des sentiers. Sans parler des balises que l’on ne voit pas toujours et qui nous amène à nous tromper…. Foutus chemins souvent plus proche du sentier à moutons avec des petits arbustes qui vous griffent les jambes et accrochent les bâtons.
Arrivé enfin en haut de la crête, mes amis me demandent de partir seul : l’un à trop mal à un genou et l’autre dit ne plus avoir de force…. C’est un peu le cœur serré que je les quitte et presse donc le pas pour récupérer un petit groupe dans la descente (un gars chante « gare au gorille » pour se donner de l’entrain) et atteindre le ravito du parking de Bué. Celui-ci est signalé par un gyrophare et quelques bénévoles nous accueillent à 1H33 du matin sous la pluie, et le froid. Il y a pas mal de gars transis de froid : je sens que pour eux c’est fini. De mon côté j’ai plus mal aux genoux et je peux avancer…enfin une bonne nouvelle (qui ne va pas durer…).
Je repars donc assez rapidement. Le petit groupe a explosé entre abandon et un peu de chacun pour soi. Je descends donc une piste qui devient un sentier bien gras. Arrivé en bas, il faut remonter au roc d’Arrode une montée courte d’environ 2km mais une montée de dingue à près de 20%. Il y a 2 bénévoles en haut du roc pour nous présenter les passages délicats qu’ils ont sécurisé. Pas question de faire un faux pas sinon c’est aller simple pour la vallée….
La descente qui suit est carrément pourrie (je mets 1H pour faire les 2km de descente) : 28% de moyenne dans de la boue et le brouillard (on n’y voit pas à 3 mètres). Je jure pas mal… A mi pente je tombe sur une ferme où un couple d’agriculteur est dehors et me propose un thé et du pain d’épice. Il est quelque chose comme 3H du matin et je remercie ces gens formidables pour ce moment de réconfort!!
Petite montée et longue descente pour arriver à Luz Saint Sauveur sur le coup de 5H30 du matin. Je commence à m’endormir tout en marchant sur la route goudronnée. En écrivant ces lignes, j’ai maintenant le souvenir de la boite de nuit de Luz-Saint Sauveur avec les petits jeunes qui en sortent tout aussi fatigués que moi (mais en plus propre…). C’est dans ces moments là que je reçois un SMS (nièce et neveu qui reviennent de bringue ègalement) qui me fait chaud au cœur.
La femme d’un des 2 amis m’attend à Luz et on marche cote à cote jusqu’à la base vie. Elle me parle et je me force à lui répondre : cela me réveille. Elle m’apprend que l’un a abandonné au parking Bué mais que son mari a continué… Il est donc quelque part derrière moi. J’arrive donc dans la base vie où je récupère un sac que j’ai fait acheminé : linge propre, gant et serviette, des produits énergétiques. Je prends donc le temps de me laver dans un lavabo au milieu d’une cour des miracles. C’est crade, on doit bien puer, mais il fait chaud et il y a de la lumière ! Je prends mon temps et vais voir un podologue : j’ai les pieds dans un sale état (plantes des pieds toutes plissées par les heures dans l’humidité….). Rien à faire sinon mettre du Nok et je renfile des chaussettes toutes propres dans mes chaussures très sales (je sais, ça aussi c’est très con….). L’ami vient d’arriver : il a complètement décroché dans sa tête et ne veut plus continuer. De mon côté je passe en mode « guerrier » : sauf blessure, j’ai décidé de ne m’arrêter que si les barrières m’y ordonne. Il est 7H06 quand je pars de Luz (24 minutes avant la fin de la barrière officielle – en fait je ne le savais pas, mais à ce stade elle avait été repoussée de plusieurs heures compte tenu des conditions…). 76ème km, 4524m D+, 5658m D- 240ème position.
De là ce n’est pas très compliqué : il y a 19km de montée qui nous attend avec 1750 m de dénivellé positif… Une broutille. Non, je plaisante, c’est loin d’être facile. Il y a en a qui me doublent rapidement : ce sont les cadors du 160 km que l’on a retrouvé depuis Luz Saint Sauveur – des monstres. Je double et me fait doubler par des lents comme moi : ce sont les rescapés du 120…
Le manque de sommeil se fait sentir. Je connais mes premières hallucinations/illusions : mon road book m’indiquait la présence d’un funiculaire au km 84 : je l’ai vu une dizaine de fois à la sortie de virage dans des bois, alors qu’il ne s’agissait au final que de formes prises par les branches et les troncs des arbres.
J’arrive à Tournaboup à 1400 m d’altitude sous le Tourmalet : il reste encore 1000m à monter ! 25H41 que je suis parti (ca y est j’ai fait mon premier 24H !!) 88ème km, 5470m D+, 5860m D-, 221ème position. (il y a du avoir de la casse à Tournaboup, car je n’ai pas l’impression d’avoir gratter 19 places dans cette première partie de montée…)
Montée ensuite très très longue (2H30) à la cabane d’Aygue-cluses. Ravitaillement en eau. Je passe quelques minutes allongé dans l’herbe à boire. J’ai oublié de le dire : il est presque 13H et on est en plein cagnard maintenant !!! Montée terrible à la hourquette Nere. La pente est très sévère au sommet. Je ne le sais pas encore mais c’est maintenant que la grosse, très grosse galère va commencer. Pour l’instant au sommet je profite de la vue énorme sur les lac et laquets en contrebas du col avec les sommets à plus de 3000 environnant.
Début de la descente et là je vois que cela ne va pas, mais pas du tout : douleur terrible sur le genou gauche (le droit est strappé pour ceux qui n’ont pas suivi !!) et puis les 2 voutes plantaires qui me fouettent à chaque pas sur les cailloux. La descente vers le lac de l’Oule est donc un long, très long calvaire. Arrivé au lac, il y a un petit ravitaillement sauvage improvisé. Je m’arrête et en profite largement je sens que suis bien maintenant dans les barrières horaires.
3km de montée suive avant d’arriver sur la dernière barrière : chalet Merlan que j’avais vu de nuit l’année passée sur le 80km. J’ai 2H d’avance sur la barrière et j’ai bien rattrapé mon retard. 104ème km (ça y est je suis centbornard à ce moment !!), 32H de « course », 6670m de D+, 6500m de D-, 224ème position.
Dernière montée (enfin!) au col de Portet en une demi heure : il fait pas chaud en haut et on a retrouvé le brouillard. Il ne reste plus que 12km de descente avec 1400 m de D-. On pourrait croire que c’est une broutille, mais il me faudra plus de 3H pour boucler le chantier avec des douleurs terribles (je m’arrête 10 minutes en haut de Portet pour essayer de strapper avec ce qu’il me reste de bande le genou gauche). Les pieds chauffent à faire fondre les chaussures. Encore des sentiers pourris avant de retrouver le goudron. J’appelle la petite famille dans le dernier km pour lui dire que c’est bientôt fini. Je raccroche, arrive sur Vielle Aure vers 20H30 et au milieu de la foule, tout lâche… Un moment très fort.
117 km, 6800 m de D+, 7915m de D-, 228ème en 35H37m56s, finisher de la première édition du tour des Cirques du Grand Raid des Pyrénées.
A titre indicatif nous étions 497 inscrits, et 236 concurrents finiront l’épreuve (gagné en 16H53 !!).
Reste des moments très, très fort humainement. Indépendamment de l’aspect sportif cela reste une forte expérience de, et sur soi : le mental l’emporte, et de loin, sur le physique.
par franck
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- Air1
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Réponse de Air1 sur le sujet Re: mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
Posted il y a 10 ans 2 mois #326546
Bravo, super CR et très belle aventure sportive et humaine. Même si malheureusement avec la surenchere actuelle les D+ et D- ne me parlent plus pour me rendre compte de ce que cela represente .
Last Edit:il y a 10 ans 2 mois
par Air1
Dernière édition: il y a 10 ans 2 mois par Air1.
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- hayko00
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Réponse de hayko00 sur le sujet mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
Posted il y a 10 ans 2 mois #326562
Air1 écrit:
Parce que tu ne fais pas de trail^^
Mais dans les proportions, le GRP propose les même dénivelés que l'UTMB ou la diagonale par exemple, après dépend aussi de comment est organisé le dénivelé.
Bravo, super CR et très belle aventure sportive et humaine. Même si malheureusement avec la surenchere actuelle les D+ et D- ne me parlent plus pour me rendre compte de ce que cela represente .
Parce que tu ne fais pas de trail^^
Mais dans les proportions, le GRP propose les même dénivelés que l'UTMB ou la diagonale par exemple, après dépend aussi de comment est organisé le dénivelé.
par hayko00
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- secalex
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Réponse de secalex sur le sujet Re: mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
Posted il y a 10 ans 2 mois #326580
Bravo pour cette belle course et pour ce CR.
par secalex
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- jordan40
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Réponse de jordan40 sur le sujet Re: mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
Posted il y a 10 ans 2 mois #326729
Bravo pour le CR et pour ta course. Au vu des conditions météo ça n'as vraiment pas du être facile.
Comment as-tu gérer l'après course? Pas trop de douleur ?
EDIT : je viens de voir que tu as fais le Bisca trail on s'est donc déjà croisé
Comment as-tu gérer l'après course? Pas trop de douleur ?
EDIT : je viens de voir que tu as fais le Bisca trail on s'est donc déjà croisé
Last Edit:il y a 10 ans 2 mois
par jordan40
Dernière édition: il y a 10 ans 2 mois par jordan40.
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- rycker
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Réponse de rycker sur le sujet Re: mon grand raid des pyrénées 120km 7000mD+ 8000D-
Posted il y a 10 ans 2 mois #326735
Bravo pour ce très, très bel exploit
par rycker
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