La prépa du marathon, étalée sur 12 semaines de 4 séances, s'est déroulée sans le moindre souci jusqu'à la dernière semaine où un rhume est venu mettre une ombre au tableau. Je râle un peu car je sais que cela va forcément me handicaper, cependant je positive en me disant que plutôt qu'un rhume, j'aurais pu aussi hériter de la grippe d'un de mes nombreux collègues malades, et là, c'eût été « game over » avant de commencer.
C'est donc avec quelques inquiétudes que j'arrive à Barcelone vendredi après-midi. Nico, qui courra avec moi, et Cristina ont la gentillesse de m'accueillir dans la maison de vacances famiale, à une heure de la capitale catalane. Je peux donc me concentrer à 100% sur ma course. Samedi, mon inquiétude s'accroît car j'ai encore de nombreuses courbatures au niveau des jambes. Je me prépare déjà mentalement à souffrir le lendemain, mais avec la ferme intention d'aller au bout. Je sais par contre que mon objectif optimiste (3h45) risque d'être difficile à atteindre. J'espère donc franchir la ligne en dessous des 4h.
Il est 5 heures, la Catalogne s'éveille.
Dimanche matin, réveil à 5h, douche, petit-déjeuner et en avant pour la gare pour prendre le premier train pour Barcelone. Il y a du mieux au niveau des jambes, mais je sens bien que je ne suis pas au top de ma forme. Il y a déjà quelques coureurs sur le quai. Au fur et à mesure du trajet on va voir le train se remplir petit-à-petit avec les coureurs déjà levés qui cotoient les fêtards pas encore rentrés. Après le train, on a encore 20 minutes de métro, debout malheureusement, et on arrive sans encombre et bien à temps sur la Place d'Espagne. La consigne est super bien organisée et il ne nous reste plus qu'à rejoindre notre bloc de départ, le 5e, prévu pour les chronos de 3h45 à 4h.
Je pensais être mal à l'aise dans la grande foule (on annonce 22,000 inscrits) mais on a quand même un peu d'espace dans le bloc. A 8h25, c'est la fermeture des blocs. Certaines retardataires escaladent les barrières au risque de se blesser sérieusement.
A chaque bloc qui part, les spectateurs applaudissent à tout rompre. L'ambiance est déjà au rendez-vous. A peu près 15 minutes après les élites, c'est enfin à notre tour de nous élancer.
Chi va piano va sano e... lontano
Malgré la foule, les larges avenues permettent de pouvoir courir relativement facilement dès le premier kilomètre. De toute façon, rien ne sert de commencer à slalommer pour gagner quelques secondes. Nico, dont c'est le premier marathon, et moi faisons la course ensemble, aussi longtemps que possible. Les premiers kilomètres sont globalement en côte, nous sommes donc prudents. Le cardio est à 140 (79,5%) de moyenne sur la première portion de 5 kmpour 27'42, tout va bien pour l'instant. Nous sommes justes un peu inquiets de voir que les kms officiels sont plus longs que nos kms GPS. Mais comme il s'agit d'un marathon certifié, il n'y a pas de doute à avoir, c'est que nous ne suivons pas la ligne bleue d'assez près. Même s'il ne fait pas vraiment chaud, l'humidité ambiante fait que je transpire déjà pas mal. Je ne négligerai donc aucun ravitaillement. Au 6e kilomètre, on passe devant le Camp Nou, qui signifie qu'on va bientôt atteindre le point culminant du parcours. En effet, au 7e, on bifurque et on prend une longue section descendante qui nous ramène presque au départ. Sans surprise, c'est sur cette portion là que j'aurai été le plus rapide (27'09). Au 16e, on passe devant la Sagrada Familia. A ce moment de la course, je suis encore en état de profiter des monuments qui jalonnent le parcours. Au 18e, on prend la Meridiana pour un long aller-retour de 4 km. On croise donc les concurrents en avance sur nous et on les regarde un peu avec envie d'être déjà à ce stade de la course. A l'aller, ça monte légèrement, mais cela passe sans trop de mal, le rythme reste régulier (27'23 et 27'26 pour les 2 sections de 5 km). Par contre, on compte déjà 400m de plus au GPS. Je me mets donc déjà en tête que ce sont « 43 » km que je devrai courir. Je passe au semi en 1h55'59, bien dans les temps pour un sub 4h.
Le negative split sera pour une autre fois
Jusqu'au 25e, le parcours est plutôt favorable au niveau denivelée, mais le vent commence à se faire sentir. Nico et moi gardons toujours le rythme (27'33). Au 26e commence un nouveau long aller-retour de 5 km sur la Diagonal. La portion aller est en légère montée et je commence à sentir la fatigue poindre. Je lève légèrement le pied et Nico, dont je sens qu'il en a encore sous la pédale, fait de même. On boucle les 5 km en 27'56 mais à partir du 28e, je commence à avoir un peu mal au dos. Je parviens cependant à garder un rythme correct jusqu'au 32e. Là, on se retrouve le long du littoral, avec beaucoup de vent. Je laisse partir Nico et je réduis un peu la voilure. Je me prépare mentalement à souffrir car je sens les forces qui s'éloignent. Le rythme a sérieusement baissé (30'25) sur les 5 dernières bornes. Pas de doute, il n'y a plus de super dans le réservoir, je dois passer au diesel. Je suis aussi passé en mode objectifs à court terme pour garder le moral. Je tiens bon jusqu'au 37e km où j'ai la mauvaise idée de vouloir un peu détendre les jambes et faire quelques foulées plus déliées. Mal m'en prend car un début de crampe aux ischios survient directement. Je m'arrête quelques secondes pour m'étirer et je marche quelques mètres avant de reprendre au ralenti.
A partir de là, ce sera un combat entre le corps et l'esprit. Combat d'autant plus rude que je sais que les 2 derniers kilomètres sont en côte. Je m'octroie donc quelques mètres de marche aux ravitaillements restant et près de 300 mètres juste avant de 40e, histoire de pouvoir tenir dans la dernière côte. Mon rythme s'est bien entendu écroulé (34'57). Je m'accroche cependant dans la dernière ascension. Mon cerveau me dit de marcher, je refuse. Je n'avance presque plus, les jambes tirent comme jamais, mais je vois des tas de gens encore plus à la dérive, certains couchés sur la route se faisant étirer pour tenter de faire passer les crampes. Je n'ai donc pas le droit de m'arrêter car moi, je n'ai pas de crampe. Pour me motiver, je lappe ma montre lorsqu'elle affiche 42,2 km en 4h00'13. Ca n'a aucune valeur officielle, mais ça me donne le petit coup de boost nécessaire pour aller puiser mes dernières forces. Enfin arrive le sommet de la côte et les 200 derniers mètres. Je n'ai absolument pas la force d'accélérer et franchir la ligne d'arrivée est un énorme soulagement. Je tape dans la main de Nico qui m'a attendu après la ligne et je vais m'asseoir sur une bordure. Je n'en peux plus. J'ai plus souffert que lors de mon premier marathon, mais je pense aussi avoir été puiser plus profond dans mon corps. Mon temps officiel est de 4h05'25, moins bien qu'espéré, mais au vu du parcours, je suis quand même très heureux de ce temps.
Je conseille vraiment aux marathoniens de faire cette épreuve. Il y a une ambiance extraordinaire tout au long du parcours, notamment un peu avant le 36e km où on tourne dans une rue où vous avez une véritable haie d'honneur qui acclame tous les participants. Par contre, je le déconseillerais comme premier marathon car il est vraiment difficile. Ce n'est jamais plat et le vent est présent sur une bonne partie du parcours. La fin est vraiment dantesque avec cette côte de 2 km. Elle n'a rien d'impressionnant, mais après 40 bornes, elle paraît insurmontable.
Quant à moi, j'ai bien évidemment mal aux jambes aujourd'hui et j'évite les escaliers comme la peste. Malgré la souffrance, je suis convaincu que je reviendrai bientôt sur la distance. Mais cette fois, je mettrai beaucoup plus de volume dans mes sorties longues. Bien qu'on dise souvent que des sorties de plus de 2h30 sont inutiles voire contre-productives, je constate que dans mon cas, elles ne suffisent pas. J'ai encore beaucoup de travail de fond à accomplir.
Pour ceux qui veulent les détails chiffrés avec la séance strava :
www.strava.com/activities/1448129248
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