Ma Traversée, non, Notre traversée

Cette course entre dans le cadre de ma préparation pour la TDS (sur les Traces des Ducs de Savoie) à fin août.

Pour ma 3ème participation à cette épreuve je serai accompagné de mon ami Marc pour lequel ce sera sa course la plus longue au niveau durée et D+/D- ainsi que de son épouse Alicia qui a couru il y a 6 semaines la Maxi-Race et que nous laisserons aller à son rythme c’est-à-dire plus vite que nous.

Nous sommes montés le vendredi soir à Verbier afin d’y récupérer nos dossards et d’acheter l’air.

Après une nuit et un petit-déjeuner correct, direction la navette qui va nous emmener au départ à La Fouly.

Dans les titres ci-dessous, les temps de passage indiqués seront les miens, le kilométrage et le D+ sont ceux du suivi, les D- ceux du site.

La Fouly – Col de Fenêtre 9,8 kms, 1'146 D+, 45 D-, 2:07:10

Début par environ 3 kms de bitume afin d’étirer un peloton d’environ 600 coureurs puis c’est l’attaque de la montée en direction du lac de Fenêtre (en fait il y a 3 lacs) puis du col de Fenêtre nommé aussi Fenêtre de Ferret. Mis à part un petit névé quasi au sommet il n’y a plus de neige.

Nous montons à la file indienne jusqu’au lac. Alicia est déjà partie, nous la verrons quelques virages au-dessus de nous puis la prochaine fois ce sera à l’hôtel. Marc est quelques mètres derrière moi, la montée n’est pas son fort. De mon côté je sens que ce n’est pas la toute grande forme. Il faut bien avouer que j’ai préparé cette course comme un très long entraînement et que je n’ai pas fait deux semaines de jus mais à peine 4 jours (cf ma sortie de 3h30 du lundi). Donc je ne m’inquiète pas.

La chaleur est encore supportable.

Marc arrive 30 secondes après moi.

Col de Fenêtre – Grand-St-Bernard 12,3 kms, 1261 D+, 388 D-, 2:39:32

Nous basculons du côté italien. Un nouveau névé nous attend. Quelques dizaines de mètres à descendre, pas de toboggan ni de corde pour cette année, on le descend sur les jambes. Enfin ceux qui arrivent à tenir debout, mon poursuivant immédiat ira tester de près la texture de cette neige sans autre conséquence que d’avoir fait rire ceux qui l’ont vu glisser ainsi que lui-même.

Marc me rattrape très vite. Il dira peut-être qu’il est une chèvre en descente moi je le vois plutôt comme une gazelle.

Une traversée de la route du col bien fréquenté en cette période, remontée par la voie romaine et nouvelle traversée de la route.

Le premier ravito arrive. Il est placé bien avant les précédentes éditions. Ce qui me surprend. Psychologiquement je n’étais pas prêt. J’avale en vitesse deux verres coca/eau, refait le plein d’eau, me dirige vers la sortie et taille le bout de gras avec un des bénévoles qui n’est autre qu’un de mes collègues en attendant Marc qui est arrivé 30 secondes après moi.

Nous repartons après 9’

Grand-St-Bernard – Bourg-St-Pierre 26,8 kms, 1698 D+, 1622 D-, 5:52:52

On monte au col, passons devant l’hospice, redescendons quelques dizaines de mètres et recommençons à grimper en direction du col des Chevaux perché à 2'714 mètres, point culminant de la course.

Une montée brève et intense suivi d’une descente sur un chemin étroit (interdiction de dépasser) et caillouteux nous amène à un long chemin qui nous conduira parallèlement à la route du col du Grand-St-Bernard à Bourg-St-Pierre en nous faisant longer le lac du barrage des Toules.

En haut du col des Chevaux, Marc n’en peut plus, pas de jambes, poumons qui brûlent, il songe à s’arrêter à Bourg-St-Pierre. Une fois au bas du col des Chevaux, il les lâche et gambadera tant bien que mal jusqu’au prochain ravito où il arrivera 5 minutes avant moi.

De mon côté c’est la portion de la course où j’ai le plus souffert. J’avais déjà senti en montant vers le lac de Fenêtre que je n’avais non plus pas de jambes et que le souffle devenait court si j’accélérais la moindre. De plus mes deux verres Coca-eau ne passent pas, j’ai des nausées. Je tente de manger un bout de barre que je recrache aussitôt. Je suis mal de chez mal.

Une solution : je téléphone à ma chérie. Ouf elle répond, je lui raconte mes misères, elle me réconforte et m’encourage. Je raccroche. La nausée est toujours là mais la niaque est revenue. J’en ai les larmes aux yeux. Comme quoi après 26 ans de mariage l’étincelle est toujours bien présente.

Bourg-St-Pierre arrive enfin, c’est le gros ravito. Marc est là depuis quelques minutes, il n’a pas la mine du vainqueur mais le mental oui. Il va continuer, tranquillement, et si cela ne va pas mieux il verra à Lourtier ou rebroussera chemin.

On se requinque, on se motive. Il y a deux ans je n’étais pas arrivé très frais à ce ravito mais à Lourtier, 5 bonnes heures plus tard, je sautillais tellement je pétais le feu.

Il faut dire que la montée sur la cabane de Mille est longue mais très régulière sur les premiers deux-tiers. On peut donc y avancer d’un pas régulier.

20’ après mon arrivée nous repartons.

Bourg-St-Pierre – Cabane de Mille 38,2 kms, 2810 D+, 1832 D-, 9:30:13

Nous montons donc gentiment, très gentiment. On se fait un peu dépasser. Déjà nous croisons quelques concurrents qui redescendent pour abandonner. Je prie pour qu’ils ne donnent pas l’idée à Marc de les suivre. Nous montons toujours à notre rythme, Marc reprend un peu de couleurs après avoir redonner à la terre un peu du ravitaillement de Bourg-St-Pierre. Pour ma part, la nausée fait partie du passé, les jambes sont de retour, le souffle est bon. Je sens que la plante de mes pieds commence à chauffer. Je vais m’arrêter afin de prévenir tout ça, j’en profiterai pour manger un peu de viande séchée, admirer le paysage et envoyer un message à mes femmes. Je repars après 10 minutes. Je ne rattraperai pas Marc qui, ayant repris vie, arrivera 3’ avant moi à la cabane de Mille non sans avoir pacmanisé plusieurs concurrents qui nous avaient dépassés au début de cette grimpette. Le dernier tiers de cette montée est interminable si vous n’avez pas en tête que le poste est au 39ème kilomètre. Au moins à 3 occasions vous pouvez penser arriver au sommet mais non vous tournez, redescendez et recommencez à monter. Il y a quand même 210 mètres de D- dans cette montée.

Cabane de Mille – Lourtier 48,8 kms, 2900 D+, 3318 D-, 11:47:58

Il commence à cailler la moindre à près de 2'500 mètres d’altitude alors que quelques instants auparavant, durant la montée, nous avons eu des moments de grosse chaleur sans un souffle de vent. Nous repartons 10’ après mon arrivée.

Comme vous êtes très forts en calcul vous avez remarqué qu’il s’agit d’une bonne descente avec près de 1500 de D- en 10 kms. Cette descente est roulante.

Je dis à Marc d’y aller. On s’attendra à Lourtier. La preuve que c’est une gazelle en descente, après environ 10’ je le vois plus bas à un endroit que je mettrai encore une bonne minute à atteindre et il y a déjà 5 coureurs entre nous deux.

J’y vais donc à mon rythme. Tout se passe bien. Une traversée d’un troupeau de vaches, un arrêt pipi (le seul !! malgré les litres que j’ai bus), un petit coup de fatigue où je peux me mettre en mode automatique en suivant un couple sur un chemin pas trop semé d’embûches et on y arrive. La nuit s’installe.

J’arrive à Lourtier environ 6’ après Marc, ça va sur plus de 2 heures de courses je ne suis pas trop à la ramasse.

J’y resterai environ 10’ le temps de refaire le plein, de sortir la frontale et de positionner le t-shirt manches longues pas trop loin car au sommet il va faire froid.

Lourtier – la Chaux 56 kms, 4130 D+, 3348 D-, 14:37:17

En arrivant à Lourtier nous avons appris qu’Alicia était déjà à la Chaux. Elle confirme que cette montée c’est l’enfer.

Nous partons serein pour cette dernière portion.

Je la connais cette partie du parcours, je l’ai déjà faite 4 fois dont la dernière en début de semaine. Je sais à quoi m’attendre. Un pas après l’autre nous avançons. Nous ne nous arrêterons que 2 fois pour reprendre un peu de force et une fois pour que j’enfile un vêtement plus chaud car ça commence à cailler sec. C’est ce moment-là qu’Alicia choisit pour nous téléphoner pour nous aviser qu’elle est bien arrivée. Magnifique !

Dernier raidillon (en fait avant dernier), une verticale droit dans la pente. Ma frontale donne des signes de faiblesses, déjà deux lampes sur trois se sont éteintes. Je ne comprends pas. La batterie est quasi neuve et a été rechargée à bloc.

J’arrive au ravito 2’ avant Marc. Je teste ma lampe, une seconde ampoule s’allume. Je ne sais pas ce qu’elle a.

Marc arrive. Il souffre. Il a des cloques aux deux talons. La descente va être pénible. Il se soigne comme il peut. Je vais passer devant dans cette descente, il tâchera de suivre au mieux.

Nous repartons après 15’ d’arrêt.

La Chaux – VERBIER, 62,1 kms, 4256 D+, 4184 D- 16:19:08

Il fait froid. Marc rajoute une couche. La descente ne se passe pas trop mal, Marc me suit comme il peut en serrant les dents.

Soudain le nuit noire, ma frontale a rendu l’âme.

On tente de mettre des piles à la place de la batterie. On n’y arrive pas. Je me vois déjà continuer avec la « torche » de mon téléphone. Heureusement Marc à une batterie de rechange, ça marche.

On continue, on y arrive. Quelques escaliers (ben oui il ne faudrait pas voir à nous faciliter la tâche) puis environ 700 mètres sur du bitume nous font descendre la station en direction du graal, l’arrivée.

Arrivée que nous franchirons ENSEMBLE. Mission accomplie.

On aura pris notre temps (plus d’une heure aux ravitos).

Je n’ai pas parlé des barrières horaires car elles sont larges, très larges. Les organisateurs l’ayant décidés ainsi vu que de toutes façons il y a les coureurs du grand parcours qui arrivent derrière nous donc autant offrir cette course sans le stress inhérent à ces BH.

Cette course préparatoire aura bien rempli son rôle. J’en tire certains enseignements dont je parlerais sur mon suivi.

Merci d’avoir lu ce pavé sans photos, de nous avoir suivi et encouragé via le live et les commentaires de Patrick.

je suis toujours aussi admiratif de ces courses aussi longues!

Bravo à vous!

Bravo à vous 2 et merci pour ce CR.
SUPER !

Un grand bravo à tous les trois.

Plus spécialement à vous deux pour avoir su surmonter les moments difficiles.

Bonne récup et encore merci pour le CR.
J'ai bien voyagé avec vous.

Bravo à vous 3
comme Thomas, je reste pantois devant les perfs des trailers
et dire que c'est une course de prépa

j'ai bien aimé le coup de fil à Madame qui remet les idées à l'endroit

petite aparté, à ce propos, çà m'y a fait penser
à Annecy, tu nous avais dit que madame était pas toujours avec toi sur les courses
elle était là et tu avais claqué ton RP
Bravo à ton (porte) bonheur aussi alors!!

Merci pour ton CR ponctué par quelques pointes d'humour !
Jolie course et moi aussi je reste bouche bée devant un tel effort ! Surtout que ça n'est qu'une étape avant la TDS !
Bonne continuation pour ta préparation, tu sembles quand même être sur la bonne voie pour boucler en beauté ta prépa.

Pour terminer, madame n'est pas toujours avec toi physiquement sur les courses mais un petit coup de téléphone et hop le moral revient ! C'est pas toujours facile de supporter les entrainement (encore moins pour de l'ultra j'imagine) mais les conjoints sont quand même souvent une grosse source de motivation dans les coups de blues !