un marathon de rêve...
- robin
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On a tous nos petites barrières à franchir qui évoluent au fil des âges, de la motivation, de la forme du moment...
Quand nos barrières rejoignent des barrières mythiques, ce sont de bons moments en perspective car beaucoup de monde souhaitent alors que l'on franchisse cette barre : c'est un moteur puissant. Tout cela dénote le bon esprit qui règne en cap en général et sur ce site en particulier. Bon état d'esprit confirmé par le fait que j'ai déjà vu et entendu beaucoup de monde sincèrement heureux pour moi d'avoir franchi cette barre des 3h sur marathon.
Voilà la barre que j'avais en ligne de mire depuis quelques mois : moins de 3h sur cette distance mythique du marathon !
C'est fait depuis dimanche 11h28 et des brouettes
Récit donc de ce beau challenge personnel :
"Challenge personnel" qui n'est en rien une performance en tant que telle. Je précise cela en préambule car je souhaite vraiment que d'autres coureurs moins rapides (mais qui ont l'immense mérite de finir un marathon ! ) mesurent bien que la distance athlétique entre eux et moi est beaucoup plus faible qu'entre moi et les coureurs de la tête de course en 2h05, 10 ou 20...
Une fois qu'on a mesuré ça, on peut se faire plaisir à aller chercher chacun nos rêves, à vivre pleinement dans et avec son corps.
La préparation mentale :
C'est l'affaire de tous les instants chez moi. Quand j'ai un objectif en tête, je ne le lâche jamais , j'y pense beaucoup mais sans obsession non plus (je mesure qu'il y a d'autres choses dan la vie). Bref, à part des tartes dans la g... que la réalité ne se prive pas parfois de vous coller, rien ne peut me détourner de l'objectif que je me suis fixé. J'ai commencé à m'entrainer sérieusement à la cap il y a 1 an et demi avec cet objectif là en tête. avec une idée aussi de la progression nécessaire pour y arriver : 3h30 d'abord pour gérer correctement un marathon, 3h15, 3h10 ensuite et pour finir (?) 3h.
Mon chrono de 3h05 de Nice à l'automne dernier m'a réellement boosté et dès la ligne franchie, ma prépa mentale pour les 3h à Annecy a commencé.
La préparation physique :
Le revers de la médaille de ma pugnacité à l'entrainement est que je m'emballe un peu parfois en début de prépa. C'est ce que je fis une fois de plus en janvier dernier.
Je décide de passer de 4 à 5 séances et de pallier mon problème récurrent de douleurs aux quadris en marathon en faisant du renfort musculaire avec des séances de côtes. Parallèlement, je veux développer ma vma et faire un test Delerue, le tout dans le froid de l'hiver, entre midi et deux en omettant de manger avant de retourner au boulot... je fais tout ça, motivé comme un beau diable . Et devinez quoi ?
ça passe pas ! Blessure au mollet droit : contracture ? Elongation ? j'en sais finalement trop rien mais un mois d'arrêt forcé et le temps qui tourne...
Prenant de l'âge, je tire quand même les leçons du passé et je ne me démobilise pas pour autant. je ne peux faire aucun sport mais je peux faire mes séances de renfort musculaire (y compris quadri avec des chaises) à condition de ne pas solliciter les mollets. Je me programme donc 3 séances par semaine de muscu en 3 parcours de 8 à 10'. cela entretien la motivation.
Je reprends l'effort cardiaque avec un sport mi-porté : le ski de fond (skating). 5 jours en février dont une journée avec un ami entraineur qui ne m'a pas ménagé...Génial, le mollet a parfaitement tenu malgré 2 séances intenses de skating dans la journée.
Il me reste alors 8 semaines avant Annecy. C'est juste mais j'y crois encore.
Prudemment je reste à 4 séances par semaine, je respecte bien les temps de repos entre séances, j'évite le pire en vma (légères douleurs au mollet), je continue la muscu (2 séances semaine), je me nourris bien avec un peu de viande (j'ai tendance à ne jamais en manger donc probable manque de protéines dans tout ça...), et surtout je mise tout sur le spécifique c'est à dire les séances d'AS42.
je travaille 4'12" au km quoi qu'il arrive : pluie, vent, montée, chemins ou routes, FC trop hautes ou pas...Et d'ailleurs les FC seront toujours trop hautes à 167-169 soit plus de 85% !???
Mais petit à petit, malgré ces FC hautes, je me sens de mieux en mieux à des allures où je courrais mon 1er 10 km il y a seulement 1 an . Je prends confiance avec le semi préparatoire où je bats mon record perso sur la distance en étant un peu sur la retenue.
Les 2 dernières semaines, je privilégie le sommeil en me couchant 1h plus tôt et en essayant de faire une sieste chaque midi (pas toujours facile évidemment).
Annecy nous voilà :
Voilà le week end tant attendu. J'ai pas mal rêvé de mon arrivée du marathon au bord du lac sous un beau soleil de printemps et une température généreuse mais pas accablante
Bon, ceux qui étaient à Annecy ont compris... Je rêvais totalement.
Temps hivernal, pluie battante le samedi et moi qui ai prévu de courir coute que coute en short-Tshirt .
Le mental est primordial mais il a ses limites. Je m'occupe le samedi aprem à chercher à Annecy de quoi me couvrir pour le lendemain.
Il pleut toute la nuit, on entend le plic-plic sur le toit de l'hotel.
Réveil à 4h pour manger. A l'ancienne : fruits, semoule, gateaux.
Je me recouche et redors 1h30. Le deuxième réveil est un peu plus difficile mais j'aime bien ces moments là car contrairement à mon caractère habituel, je suis très calme et ne pense plus à l'objectif. Je me prépare, je fais ce que j'ai à faire et j'attends le coup de feu du départ pour repenser à la course.
Il fait 4°C et il pleut !
J'arbore fièrement un sac poubelle 50L dans les sas de départ et trouve jean-Michel, Jérôme et Pierre. Quelques courtes minutes de discussion et je les abandonne car j'ai besoin et envie d'être seul avec moi même à ce moment là. Je me reconcentre progressivement sur cette folle allure de 4'12" qu'il va falloir tenir pendant 3h alors que je ne l'ai jamais tenu plus de 45' d'affilée à l'entrainement.
Top départ :
Y'a plus à réflechir, y'a plus qu'à courir...
Les sas sont efficaces, je franchis la ligne en quelques secondes mais ça frotte un peu. Un gars derrière me fait un croche patte en voulant zigzaguer. Une bonne frayeur mais tout va bien. Le ballon des 3h est juste devant moi, on est à l'allure. Très très peu échauffé, je prends mal à l'avant des mollets mais c'est habituel, je sais que cela disparaitra au bout de 4 à 5 km. J'essaye de me détendre. Je prends mon rythme d'entrainement et commence à piétiner un poil derrière le ballon. Je le passe au 2ème km, décidé à ne plus le revoir devant moi : le naturel revient au galop
ça y est je suis chaud, la confiance revient. Encore lucide, je sais aussi qu'il faudra bien gérer pour atteindre l'objectif; j'ai peu de marge.
Les km défilent et je vérifie avec bonheur que le parcours est roulant de chez roulant (je comptais, avec raison, beaucoup là dessus ). Je suis en 4'11' et ma FC est déjà très haute : 170-171 .
Je ne m'inquiète pas, c'est exactement la FC à laquelle j'ai couru Nice. l'expérience est déterminante sur marathon. Je n'aurai pas pu gérer avec sérennité cette course comme je l'ai fait si cela avait été mon premier marathon. Tant que je suis vers 170, je ne m'affole pas. Sur des portions plus cool, je descends à 169 voire 168, je me dis que c'est toujours ça de pris.
Je me ravitaille consciencieusement tous les 3 ou 4 km (les ravitos sont un peu bizarrement placés mais ils sont nombreux donc tout va bien) : un peu de gel et de l'eau. Il faut avouer quand dans les temps où je suis, nous sommes bien aéré donc l'accès aux ravitos est très facile; c'est une vraie aide. d'ailleurs, nouveauté, j'ai décidé cette fois de courir sans ceinture porte-bidons. j'ai juste 2 gels dans le T-shirt (mini poches sur les côtés, trouvaille d'hier !!!) et un dans la main.
Le 15ème km arrive avec son tunnel d'ancienne voie ferrée (annecy-chambéry), c'est sympa. je discute avec deux gars à ma hauteur. Ils font respectivement 1h21 et 1h22 au semi . Qu'est ce que je fais là ??? L'un me dit que je suis peut être un peu rapide, que je suis sur mon temps de semi. Il a raison le bougre, je suis maintenant à 4'08" sur certains km.
Et bien, je continue sur ma lancée, trop content de pouvoir courir ce marathon et tenter ma chance aujourd'hui. le souffle est bon, c'est lui que j'écoute. Vers le 17ème, le 1h21 décroche et je ne le reverrai plus . Non mais !
Fin de la piste cyclable, 19ème km, je croise les 1er qui nous ont mis plus de 6 km ! Je les encourage tous, je sais que c'est dur à l'avant aussi. Et à voir la tête du 4ème, c'est tout à fait clair : il souffre beaucoup plus que moi au 25 ème dans quelques minutes. je reconnais en 6ème position Alban Chorin, champion de France qui a des prétentions aujourd'hui. Je l'encourage tant que je peux et lui dis de ne rien lâcher... Il y aurait pensé tout seul mais des fois les encouragements ont un tel effet inattendu chez les coureurs qu'il ne faut pas s'en priver je crois...
Le lac est dans notre dos, le semi s'approche. Je le franchis en 1h28 et 12" (deuxième meilleure perf sur semi pour moi à ce jour ), une minute de moins que prévue et donc une minute de sécurité. Je suis frais comme un gardon
Un peu d'euphorie donc... J'avoue qu'à ce moment là j'ai pensé que je pouvais faire 2h57. je crois que j'avais ça dans les jambes dimanche mais tout se joue sur la fin on le sait. je vais manquer d'un poil de combativité.
j'enchaine 3 km autour de 4' : 3'59", 4'04" et 4'03"
Le parcours est un peu à la descente.
on retrouve la piste cyclable et je me calme en revenant sur mes allures à 4'11". Et je sais que vont venir 3 km de faux plats montant jusqu'au tunnel. On s'approchera alors du 30ème et là, une autre histoire commence.
Pour l'heure je m'occupe en cherchant Jérôme aux alentours des 4h-4h30. Je finis par le voir, tout de blanc vêtu. Je l'encourage, je suis content pour lui, il avait l'air bien, calé dans son rythme.
Je maintiens un 4'14" sur la montée. je suis confiant. Je commence à y croire. Je sais aussi que le plus dur est devant.
mon marathon commence :
31ème km, on ne parle pas encore de mur mais d'assoupissement. Après un ravito, je regarde ma montre, je vois une allure à 4'41" . Réaction immédiate : . je reprends les secondes et termine ce km en 4'20" et je reviens à 4'14"... mais bon voilà, je commence à perdre 2 à 3 " au km. C'est rien mais c'est mon 4ème marathon et je sais ce que ça veut dire : mon marathon vient de commencer, il me reste 10 km et un mur à franchir !
Après 4km, arrive le fameux 35ème km, ma Fc a grimpé à 175 et je ne peux plus maintenir 4'14"sans prendre un gros risque de défaillance totale signifiant l'abandon. Il reste 7km, c'est encore long et je ne suis à l'abri de rien. je faiblis et à ce stade je n'arrive plus à m'alimenter. je prends une dernière petite gorgée de sucre, une autre d'eau, je jette mon gel que je n'ai pas fini, j'enlève mon tour de cou que je sers dans la main et je pense le moins possible. Je veille mes allures et le bout du lac, encore un peu loin...
Je cherche les points positifs : je n'ai pas mal du tout aux quadris comme sur mes précédents marathons, la muscu porte ses fruits, c'est génial. Bien sûr, il y a le revers de la médaille : je commence à avoir mal aux mollets, particulièrement au droit où j'ai blessé il y a 2 mois et demi... Pourvu que ça tienne. j'essaye de ne pas y penser.
L'allure voudrait se stabiliser à 4'30" mais je force un peu j'arrive à garder un 4'25" avec FC à 175.
37ème, 38ème, 39ème, c'est long mais je sais maintenant qu'avec 4'40" au km, ça passe. j'ai eu la lucidité de faire ce petit calcul au 38ème et donc chaque seconde en dessous de 4'40" me conforte dans mon objectif du jour.
A ce stade, j'ai cessé de faire le malin et de remercier les bénévoles comme je le fais toujours aux ravitos et intersections. désolé pour eux. Dans ma tête, je suis déjà dans l'après, un rêve est en train de s'achever là, sous la pluie.
Je suis fatigué mais je me sens bien dans mon corps, complice de mes rêves depuis pas mal d'années déjà.
Je ne suis plus très combattif. J'ai beaucoup doublé sur le deuxième semi mais là, à 1,5 km de l'arrivée, je me fais doubler en masse. je suis revenu à 4'15" mais je perds probablement 15 places. C'est pas grave, l'objectif du jour était ailleurs. je n'ai pas encore franchi la ligne mais je pense déjà que j'aurai envie de battre ce record personnel, que je ne vais pas manquer de nouveaux rêves à aller chercher.
2h58'40" temps réel, 146ème et une grande satisfaction d'avoir pu courir si longtemps à cette vive allure pour moi.
Je mesure que j'ai de la chance.
je prends quelques courtes minutes derrière la ligne pour souffler et penser. Je suis pris par l'émotion et je respire un grand coup : un moment de calme avant de retourner manger, parler, blaguer, débrieffer, rêver.... vivre quoi !
Merci de m'avoir lu. Que mes erreurs et réussites servent à d'autres pour atteindre leurs propres objectifs.
N'oubliez pas quand même, si vos rêves sont haut perchés, il n'y a pas 36 solutions :
Quand nos barrières rejoignent des barrières mythiques, ce sont de bons moments en perspective car beaucoup de monde souhaitent alors que l'on franchisse cette barre : c'est un moteur puissant. Tout cela dénote le bon esprit qui règne en cap en général et sur ce site en particulier. Bon état d'esprit confirmé par le fait que j'ai déjà vu et entendu beaucoup de monde sincèrement heureux pour moi d'avoir franchi cette barre des 3h sur marathon.
Voilà la barre que j'avais en ligne de mire depuis quelques mois : moins de 3h sur cette distance mythique du marathon !
C'est fait depuis dimanche 11h28 et des brouettes
Récit donc de ce beau challenge personnel :
"Challenge personnel" qui n'est en rien une performance en tant que telle. Je précise cela en préambule car je souhaite vraiment que d'autres coureurs moins rapides (mais qui ont l'immense mérite de finir un marathon ! ) mesurent bien que la distance athlétique entre eux et moi est beaucoup plus faible qu'entre moi et les coureurs de la tête de course en 2h05, 10 ou 20...
Une fois qu'on a mesuré ça, on peut se faire plaisir à aller chercher chacun nos rêves, à vivre pleinement dans et avec son corps.
La préparation mentale :
C'est l'affaire de tous les instants chez moi. Quand j'ai un objectif en tête, je ne le lâche jamais , j'y pense beaucoup mais sans obsession non plus (je mesure qu'il y a d'autres choses dan la vie). Bref, à part des tartes dans la g... que la réalité ne se prive pas parfois de vous coller, rien ne peut me détourner de l'objectif que je me suis fixé. J'ai commencé à m'entrainer sérieusement à la cap il y a 1 an et demi avec cet objectif là en tête. avec une idée aussi de la progression nécessaire pour y arriver : 3h30 d'abord pour gérer correctement un marathon, 3h15, 3h10 ensuite et pour finir (?) 3h.
Mon chrono de 3h05 de Nice à l'automne dernier m'a réellement boosté et dès la ligne franchie, ma prépa mentale pour les 3h à Annecy a commencé.
La préparation physique :
Le revers de la médaille de ma pugnacité à l'entrainement est que je m'emballe un peu parfois en début de prépa. C'est ce que je fis une fois de plus en janvier dernier.
Je décide de passer de 4 à 5 séances et de pallier mon problème récurrent de douleurs aux quadris en marathon en faisant du renfort musculaire avec des séances de côtes. Parallèlement, je veux développer ma vma et faire un test Delerue, le tout dans le froid de l'hiver, entre midi et deux en omettant de manger avant de retourner au boulot... je fais tout ça, motivé comme un beau diable . Et devinez quoi ?
ça passe pas ! Blessure au mollet droit : contracture ? Elongation ? j'en sais finalement trop rien mais un mois d'arrêt forcé et le temps qui tourne...
Prenant de l'âge, je tire quand même les leçons du passé et je ne me démobilise pas pour autant. je ne peux faire aucun sport mais je peux faire mes séances de renfort musculaire (y compris quadri avec des chaises) à condition de ne pas solliciter les mollets. Je me programme donc 3 séances par semaine de muscu en 3 parcours de 8 à 10'. cela entretien la motivation.
Je reprends l'effort cardiaque avec un sport mi-porté : le ski de fond (skating). 5 jours en février dont une journée avec un ami entraineur qui ne m'a pas ménagé...Génial, le mollet a parfaitement tenu malgré 2 séances intenses de skating dans la journée.
Il me reste alors 8 semaines avant Annecy. C'est juste mais j'y crois encore.
Prudemment je reste à 4 séances par semaine, je respecte bien les temps de repos entre séances, j'évite le pire en vma (légères douleurs au mollet), je continue la muscu (2 séances semaine), je me nourris bien avec un peu de viande (j'ai tendance à ne jamais en manger donc probable manque de protéines dans tout ça...), et surtout je mise tout sur le spécifique c'est à dire les séances d'AS42.
je travaille 4'12" au km quoi qu'il arrive : pluie, vent, montée, chemins ou routes, FC trop hautes ou pas...Et d'ailleurs les FC seront toujours trop hautes à 167-169 soit plus de 85% !???
Mais petit à petit, malgré ces FC hautes, je me sens de mieux en mieux à des allures où je courrais mon 1er 10 km il y a seulement 1 an . Je prends confiance avec le semi préparatoire où je bats mon record perso sur la distance en étant un peu sur la retenue.
Les 2 dernières semaines, je privilégie le sommeil en me couchant 1h plus tôt et en essayant de faire une sieste chaque midi (pas toujours facile évidemment).
Annecy nous voilà :
Voilà le week end tant attendu. J'ai pas mal rêvé de mon arrivée du marathon au bord du lac sous un beau soleil de printemps et une température généreuse mais pas accablante
Bon, ceux qui étaient à Annecy ont compris... Je rêvais totalement.
Temps hivernal, pluie battante le samedi et moi qui ai prévu de courir coute que coute en short-Tshirt .
Le mental est primordial mais il a ses limites. Je m'occupe le samedi aprem à chercher à Annecy de quoi me couvrir pour le lendemain.
Il pleut toute la nuit, on entend le plic-plic sur le toit de l'hotel.
Réveil à 4h pour manger. A l'ancienne : fruits, semoule, gateaux.
Je me recouche et redors 1h30. Le deuxième réveil est un peu plus difficile mais j'aime bien ces moments là car contrairement à mon caractère habituel, je suis très calme et ne pense plus à l'objectif. Je me prépare, je fais ce que j'ai à faire et j'attends le coup de feu du départ pour repenser à la course.
Il fait 4°C et il pleut !
J'arbore fièrement un sac poubelle 50L dans les sas de départ et trouve jean-Michel, Jérôme et Pierre. Quelques courtes minutes de discussion et je les abandonne car j'ai besoin et envie d'être seul avec moi même à ce moment là. Je me reconcentre progressivement sur cette folle allure de 4'12" qu'il va falloir tenir pendant 3h alors que je ne l'ai jamais tenu plus de 45' d'affilée à l'entrainement.
Top départ :
Y'a plus à réflechir, y'a plus qu'à courir...
Les sas sont efficaces, je franchis la ligne en quelques secondes mais ça frotte un peu. Un gars derrière me fait un croche patte en voulant zigzaguer. Une bonne frayeur mais tout va bien. Le ballon des 3h est juste devant moi, on est à l'allure. Très très peu échauffé, je prends mal à l'avant des mollets mais c'est habituel, je sais que cela disparaitra au bout de 4 à 5 km. J'essaye de me détendre. Je prends mon rythme d'entrainement et commence à piétiner un poil derrière le ballon. Je le passe au 2ème km, décidé à ne plus le revoir devant moi : le naturel revient au galop
ça y est je suis chaud, la confiance revient. Encore lucide, je sais aussi qu'il faudra bien gérer pour atteindre l'objectif; j'ai peu de marge.
Les km défilent et je vérifie avec bonheur que le parcours est roulant de chez roulant (je comptais, avec raison, beaucoup là dessus ). Je suis en 4'11' et ma FC est déjà très haute : 170-171 .
Je ne m'inquiète pas, c'est exactement la FC à laquelle j'ai couru Nice. l'expérience est déterminante sur marathon. Je n'aurai pas pu gérer avec sérennité cette course comme je l'ai fait si cela avait été mon premier marathon. Tant que je suis vers 170, je ne m'affole pas. Sur des portions plus cool, je descends à 169 voire 168, je me dis que c'est toujours ça de pris.
Je me ravitaille consciencieusement tous les 3 ou 4 km (les ravitos sont un peu bizarrement placés mais ils sont nombreux donc tout va bien) : un peu de gel et de l'eau. Il faut avouer quand dans les temps où je suis, nous sommes bien aéré donc l'accès aux ravitos est très facile; c'est une vraie aide. d'ailleurs, nouveauté, j'ai décidé cette fois de courir sans ceinture porte-bidons. j'ai juste 2 gels dans le T-shirt (mini poches sur les côtés, trouvaille d'hier !!!) et un dans la main.
Le 15ème km arrive avec son tunnel d'ancienne voie ferrée (annecy-chambéry), c'est sympa. je discute avec deux gars à ma hauteur. Ils font respectivement 1h21 et 1h22 au semi . Qu'est ce que je fais là ??? L'un me dit que je suis peut être un peu rapide, que je suis sur mon temps de semi. Il a raison le bougre, je suis maintenant à 4'08" sur certains km.
Et bien, je continue sur ma lancée, trop content de pouvoir courir ce marathon et tenter ma chance aujourd'hui. le souffle est bon, c'est lui que j'écoute. Vers le 17ème, le 1h21 décroche et je ne le reverrai plus . Non mais !
Fin de la piste cyclable, 19ème km, je croise les 1er qui nous ont mis plus de 6 km ! Je les encourage tous, je sais que c'est dur à l'avant aussi. Et à voir la tête du 4ème, c'est tout à fait clair : il souffre beaucoup plus que moi au 25 ème dans quelques minutes. je reconnais en 6ème position Alban Chorin, champion de France qui a des prétentions aujourd'hui. Je l'encourage tant que je peux et lui dis de ne rien lâcher... Il y aurait pensé tout seul mais des fois les encouragements ont un tel effet inattendu chez les coureurs qu'il ne faut pas s'en priver je crois...
Le lac est dans notre dos, le semi s'approche. Je le franchis en 1h28 et 12" (deuxième meilleure perf sur semi pour moi à ce jour ), une minute de moins que prévue et donc une minute de sécurité. Je suis frais comme un gardon
Un peu d'euphorie donc... J'avoue qu'à ce moment là j'ai pensé que je pouvais faire 2h57. je crois que j'avais ça dans les jambes dimanche mais tout se joue sur la fin on le sait. je vais manquer d'un poil de combativité.
j'enchaine 3 km autour de 4' : 3'59", 4'04" et 4'03"
Le parcours est un peu à la descente.
on retrouve la piste cyclable et je me calme en revenant sur mes allures à 4'11". Et je sais que vont venir 3 km de faux plats montant jusqu'au tunnel. On s'approchera alors du 30ème et là, une autre histoire commence.
Pour l'heure je m'occupe en cherchant Jérôme aux alentours des 4h-4h30. Je finis par le voir, tout de blanc vêtu. Je l'encourage, je suis content pour lui, il avait l'air bien, calé dans son rythme.
Je maintiens un 4'14" sur la montée. je suis confiant. Je commence à y croire. Je sais aussi que le plus dur est devant.
mon marathon commence :
31ème km, on ne parle pas encore de mur mais d'assoupissement. Après un ravito, je regarde ma montre, je vois une allure à 4'41" . Réaction immédiate : . je reprends les secondes et termine ce km en 4'20" et je reviens à 4'14"... mais bon voilà, je commence à perdre 2 à 3 " au km. C'est rien mais c'est mon 4ème marathon et je sais ce que ça veut dire : mon marathon vient de commencer, il me reste 10 km et un mur à franchir !
Après 4km, arrive le fameux 35ème km, ma Fc a grimpé à 175 et je ne peux plus maintenir 4'14"sans prendre un gros risque de défaillance totale signifiant l'abandon. Il reste 7km, c'est encore long et je ne suis à l'abri de rien. je faiblis et à ce stade je n'arrive plus à m'alimenter. je prends une dernière petite gorgée de sucre, une autre d'eau, je jette mon gel que je n'ai pas fini, j'enlève mon tour de cou que je sers dans la main et je pense le moins possible. Je veille mes allures et le bout du lac, encore un peu loin...
Je cherche les points positifs : je n'ai pas mal du tout aux quadris comme sur mes précédents marathons, la muscu porte ses fruits, c'est génial. Bien sûr, il y a le revers de la médaille : je commence à avoir mal aux mollets, particulièrement au droit où j'ai blessé il y a 2 mois et demi... Pourvu que ça tienne. j'essaye de ne pas y penser.
L'allure voudrait se stabiliser à 4'30" mais je force un peu j'arrive à garder un 4'25" avec FC à 175.
37ème, 38ème, 39ème, c'est long mais je sais maintenant qu'avec 4'40" au km, ça passe. j'ai eu la lucidité de faire ce petit calcul au 38ème et donc chaque seconde en dessous de 4'40" me conforte dans mon objectif du jour.
A ce stade, j'ai cessé de faire le malin et de remercier les bénévoles comme je le fais toujours aux ravitos et intersections. désolé pour eux. Dans ma tête, je suis déjà dans l'après, un rêve est en train de s'achever là, sous la pluie.
Je suis fatigué mais je me sens bien dans mon corps, complice de mes rêves depuis pas mal d'années déjà.
Je ne suis plus très combattif. J'ai beaucoup doublé sur le deuxième semi mais là, à 1,5 km de l'arrivée, je me fais doubler en masse. je suis revenu à 4'15" mais je perds probablement 15 places. C'est pas grave, l'objectif du jour était ailleurs. je n'ai pas encore franchi la ligne mais je pense déjà que j'aurai envie de battre ce record personnel, que je ne vais pas manquer de nouveaux rêves à aller chercher.
2h58'40" temps réel, 146ème et une grande satisfaction d'avoir pu courir si longtemps à cette vive allure pour moi.
Je mesure que j'ai de la chance.
je prends quelques courtes minutes derrière la ligne pour souffler et penser. Je suis pris par l'émotion et je respire un grand coup : un moment de calme avant de retourner manger, parler, blaguer, débrieffer, rêver.... vivre quoi !
Merci de m'avoir lu. Que mes erreurs et réussites servent à d'autres pour atteindre leurs propres objectifs.
N'oubliez pas quand même, si vos rêves sont haut perchés, il n'y a pas 36 solutions :
Last Edit:il y a 12 ans 6 mois
par robin
Dernière édition: il y a 12 ans 6 mois par robin.
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- jyc44
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Mille BravoS....cela a l'air si simple mais je sais bien que non !!!!
Super CR que j'archive pour le moment où j'aborderai une préparation marathon !!!!
Juste à la fin de ton CR c'est 2h48mn ou 2h58mn qu'il faut lire !!!!
Respects
Bonne récupération
Super CR que j'archive pour le moment où j'aborderai une préparation marathon !!!!
Juste à la fin de ton CR c'est 2h48mn ou 2h58mn qu'il faut lire !!!!
Respects
Bonne récupération
par jyc44
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- gilles84 [Dum Spiro Spero]
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Réponse de gilles84 [Dum Spiro Spero] sur le sujet Re: un marathon de rêve...
Posted il y a 12 ans 7 mois #163653
RESPECT ....
j'ai que ça qui me viens en tete
finalement si ...une question ....arret à tous les ravito ? pris en marchant ou en courant ?
j'ai que ça qui me viens en tete
finalement si ...une question ....arret à tous les ravito ? pris en marchant ou en courant ?
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- bat
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Un grand bravo
Ca a visiblement été très dûr avec un vrai combat sur la fin.
Ca reste impressionnant : en ce moment, 4'10, c'est plus mon allure sur 10k que sur marathon
Ca a visiblement été très dûr avec un vrai combat sur la fin.
Ca reste impressionnant : en ce moment, 4'10, c'est plus mon allure sur 10k que sur marathon
par bat
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Quel courage, quelle fol état d'esprit !!!
Ta détermination est impressionante.
Je suis très heureux pour toi.
Je pensais que ce serait très très chaud pour les 3h et tu l'as fait, en prenant des risques mais en croyant en toi. C'est admirable.
Ta détermination est impressionante.
Je suis très heureux pour toi.
Je pensais que ce serait très très chaud pour les 3h et tu l'as fait, en prenant des risques mais en croyant en toi. C'est admirable.
par YMCA
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YMCA écrit:
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en prenant des risques mais en croyant en toi. C'est admirable.
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par jyc44
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