Drayes Blanches 2013 - Foyer de Lente (26)

Les Drayes Blanches sont un ensemble de courses sur neige (7km/10km/23km) qui se disputent sur les hauts plateaux du Vercors, à un peu plus de 1000m d’altitude. Pour information, dans les alpes les drayes sont les chemins qu’empruntent les troupeaux (pour monter en alpage par exemple).


Chapitre I – La transhumance vers les hauts plateaux du Vercors

Lors de la semaine qui précède la course, je surveille la météo avec attention afin de me préparer psychologiquement pour les conditions météo. Beaucoup de chutes de neige en début de semaine puis un temps plus sec et froid. Les conditions semblent plutôt bonnes pour la course : de la poudreuse, un temps froid et peut être même un peu de soleil ! On échappe normalement à la neige molle et à la glace !

Dimanche 10 février, le réveil sonne à 7h. Dur dur de sortir du lit, même en semaine je me lève plus tard pour aller travailler... J’arrive tout de même à m’extirper de ma couette, je prends un petit déjeuner consistant et je termine de préparer mes affaires.

Je prends la route vers 8h pour environ 1h30 de route afin de rejoindre le chalet de Lente sur les plateaux ouest du Vercors. Le thermomètre de la voiture indique 0°C dès la sortie du garage puis descend rapidement ! -1°C, -2°C, -3°C... pour atteindre -8°C au pied du Vercors.

J'arrive donc dans la montée vers Lente. Et là, comme tout bon grenoblois qui va en montagne, je me retrouve derrière un lyonnais qui avance pas (désolé pour les lyonnais qui savent conduire en montagne ). Mais tout ça s'était avant le drame.
Au bout de quelques kilomètres, on rejoint… un parisien ! Et oui les lyonnais aussi ont leurs boulets en montagne... (Finalement j’étais pas si mal derrière mon lyonnais )

Bref j’ai le temps de profiter du paysage, et ça tombe plutôt bien car je suis sur la superbe route de Combe-Laval. Une des routes les plus touristiques du Vercors, creusée à même la roche à la fin du XIXème siècle. Elle surplombe le cirque du même nom et c'est vraiment chouette avec la neige, la glace...

Un petit aperçu :
Après cet interlude touristique, j’arrive (enfin ) au foyer de Lente. Le thermomètre indique maintenant -16°C et ça se sent en sortant de la voiture.

Je vais donc rapidement récupérer mon dossard et ma puce, j’en profite pour discuter un peu avec mes futurs compagnons de galère puis c’est l’heure de se changer avant le débriefing et le départ de la plus longue des courses de la journée : la Grande Blanche (23km 750m D+). L’arche de départ se trouve sur une piste de ski de fond assez large mais au bout de 5 mètres, on passe sur une monotrace dans la poudreuse et les organisateurs annoncent qu’une grosse partie des courses se fera sur ce genre de terrain (adieux les rêves de pistes damées).

Je retourne donc chercher les bâtons que j’hésitais à prendre et je pars m’échauffer tranquillement sur la route pendant 15 minutes puis je rejoins les pistes de ski de fond pour faire monter un peu le cardio et me familiariser avec la neige.


Chapitre II – Sur les traces de l’ours du Vercors

10h25 : regroupement sous l’arche de départ, on est environ 190 participants sur le boréal : parcours de 10km pour 300m D+.

Mon objectif étant d’arriver dans la 1ère moitié du classement, je me place dans le milieu du peloton. On part nous aussi sur la monotrace (qui n’en est plus vraiment une depuis le passage des 150 coureurs du 23km), ça risque donc d’être difficile de doubler...

Le départ est donné à 10h30 précises ! Dès le début, ça bouchonne… Je me suis placé trop loin sur la ligne de départ. Plutôt que de patienter tranquillement derrière, je saute dans les traces d’un coureur qui, comme moi, s’est mal placé et vient de sortir de la trace pour remonter le peloton dans la poudreuse.

Sacré départ ! Si je voulais m’économiser sur le début du parcours, c’est raté ! Au moins ça permet de grappiller rapidement quelques places mais non sans un effort conséquent. Les premières pentes se profilent, pas très raides mais dans 40cm de poudreuse, elles sont déjà grimper le cardio (qui avoisine les 90% de FCM).

Le 1er kilomètre est bouclé en 9’18… les places sont alors un peu mieux définies et il y a un peu moins besoin de zigzaguer pour doubler les coureurs partis trop vite et qui commencent déjà à caler. Le chemin consiste maintenant le plus souvent en 2 traces parallèles qui dessinent 2 sillons au milieu de la neige fraiche. On s’enfonce toujours autant et la pente commence à se faire plus insistante au fur et à mesure qu'on s'enfonce dans la forêt. Le temps passe mais les kilomètres ne défilent vraiment pas vite. Je suis obligé de marcher régulièrement, même sur les portions planes (ou presque) car chaque foulée représente une grosse dépense d’énergie surtout quand on a l'impression que le sol se dérobe sous nos pieds.

Les kilomètres suivants passent encore moins vite (11’23 puis 11’36) majoritairement du fait de la pente qui s'accentue. Les cuisses commencent à vraiment souffrir (bien plus que lors des entrainements en côte ou même les SL vallonnées).

Après 3 km, on arrive enfin sur une partie en descente, ça reste compliqué d’avancer mais au moins ça ne grimpe plus. Un peu de repos bien mérité pour les quadriceps (km 4 : 10’28).

Malheureusement le répit est de courte durée. On entame une belle petite montée en forêt avec comme perspective : les coureurs dans le lacet au dessus de nous... On va grimper environ 75m D+ sur 1km (km 5 : 12’53… à se demander si j’ai vraiment couru ). On débouche enfin sur un piste de ski de fond !
De la neige (presque) dure enfin ! Un bénévole nous indiquent le ravitaillement dans 300m. Quelques flocons de neige font alors leur apparition alors qu'on semble attaquer la descente.

Arrêt rapide au ravitaillement, je bois un verre de thé chaud, je mange un quartier d’orange et je repars sans perdre trop de temps (surtout pour pas geler sur place !), au bout de quelques mètres, j’ai l’impression de traverser la piste à chaque fois que je plante mon bâton gauche... Je regarde si je n’ai pas perdu la rondelle spéciale neige, mais c’est un des brins du bâton qui a eu la bonne idée de se replier.

J’essaie de régler l bâton à la bonne taille tout en courant mais ça ne fonctionne pas (c'est pas des bâtons de trail et ça se voit àce moment), je m’arrête alors quelques instants et… pas mieux ! Impossible de régler le bâton correctement. Je ne m'entête pas et repars donc avec un bâton taille enfant et un bâton normal ! (km 6 : 11’15).

La descente se poursuit sur les pistes de ski de fond et cette fois aucune montée pour gâcher le plaisir. J’ai l’impression de réellement courir pour la première fois depuis le départ (même si ça reste assez lentement). On ne s'enfonce plus jusqu'aux genoux à chaque pas ! Du coup les kilomètres 7 et 8 sont "avalés" en 9’42 et 7’42 !!!

Le tracé quitte alors la piste pour couper à travers bois pour une belle descente qui va nous ramener quelques dizaine de mètres plus bas sur les pistes de fond. On commence à entendre le speaker annoncer les arrivées (km 9 : 8’33).

On sort alors de la forêt, quelques skieurs nous encouragent « Vous avez fait le plus dur, l’arrivée n’est plus loin ! » et on aperçoit alors l’arche d’arrivée... dans la direction opposée à celle que prend la piste ... il va donc falloir faire une petite boucle avant d'arriver.
De petites montées/descentes se succèdent, c’est pas grand-chose mais j’ai les jambes vraiment dures. Pour ne pas arranger les choses, on est totalement à découvert depuis la sortie de la forêt et le vent se fait bien ressentir d'autant plus qu'il neige assez abondamment maintenant ! J’essaie quand même de mettre un peu de rythme mais les jambes n’y sont plus vraiment.
En plus les places semblent quasiment définitives à ce moment là : le coureur devant moi est relativement loin et pareil pour le coureur derrière moi.

Ma montre sonne alors pour m’indiquer la fin du 10ème km (8’13), il reste encore 300m avant l’arche. Je rattrape le coureur devant qui cale vraiment, il marche beaucoup... Je le passe en l’encourageant un peu, la ligne n’est plus très loin ! J’essaie de nouveau de relancer malgré le vent de face histoire de faire bonne figure devant les quelques courageux spectateurs qui ont bravé le froid pour nous accueillir à l’arrivée.

Je passe enfin la ligne au bout d’1h43’30 de course !!!


Chapitre III – Le repos du berger

Ravitaillement rapide histoire de récupérer un peu ses esprits puis direction la voiture pour se changer au plus vite, avant d’attraper la mort ! A l'arrêt on ressent bien le froid et l’humidité des vêtements et ça serait bête de tomber malade.

Quand je reviens au ravito d'arrivée, les résultats ont été affichés. Le 1er a terminé en 1h07’48 avec presque 6 minutes d’avance sur le 2ème ! Quant à moi, je termine à la 76ème place sur 186 finishers.

Alors que les premiers finishers du 23 km arrivent, je me décide à prendre le chemin du retour car il fait quand même frisquet ! J’ai alors la bonne surprise de retrouver mon amis lyonnais dans la descente (enfin je sais pas si c’est vraiment le même… mais si ce n’est lui c’est donc son frère !). C’est reparti pour une visite touristique du cirque de Combe-Laval !

Je rentre chez moi en pièces, j'ai mal partout dans les jambes mais aussi dans le haut du corps avec l'utilisation des bâtons pour tenter de ma stabiliser. J'ai l'impression d'avoir 90 ans et d'avoir perdu toute ma souplesse !

Heureusement la nuit sera réparatrice et en ce lundi je suis presque en pleine forme ! Juste quelques courbatures mais plus de douleurs dans les articulations ou les tendons !


Bilan personnel :
Je me suis régalé tout au long de cette journée ! J'ai découvert des paysages magnifiques dans une partie du Vercors que je n'avais pas encore visitée (malgré les nombreuses randonnées que j'ai fait dans ce massif). J'ai pris beaucoup de plaisir à [strike]souffrir[/strike] courir dans la poudreuse !

Malgré le chrono que j'espérais un peu meilleur, je suis quand même satisfait de ma place à l’arrivée. Je cours de manière assidue depuis (seulement) 6 mois maintenant et je sens que l'entrainement porte ses fruits, même si je choisis pas les courses les plus faciles pour me tester (cf mon précédent récit ...). Plutôt encourageant pour la suite de la saison.

Prochain RDV : 24 mars pour un pseudo-trail de 22km et 700m de D+ (normalement pas sur neige cette fois !).

Ps : merci à ceux qui ont tenu jusqu'ici !

Félicitations à toi, et merci pour ce beau récit.
On ressent que ça a dû être bien éprouvant toute cette neige.

Superbe CR et belle place, bravo.
C'est vraiment des courses de malade, ces trails en montagne !

Ouf... Rien que de te lire, ça brûle les poumons tout ce froid et cette neige!

Un grand bravo pour ce CR, mais aussi pour ta course.... En effet, aprés 6 mois de CAP, on ne peut pas dire que tu démarres par du "facile"!
C'est le genre de course qui doit laisser des souvenirs!

Bravo Hisoka,
Ce récit me confirme qu'on est mieux sur des skis qu'en chaussures de trail dans ces conditions .

Merci pour ton récit.
Je me suis régalé bien installé sur mon fauteuil .

Bonne journée.