Marathonien… un rêve
- coincoin
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Si je reviens en arrière, mon histoire de la course à pied est jonchée de projet fou. Projet assez classique pour certains mais pour un mec comme moi que rien ne prédispose à la course pied la progression dans l’effort est vertigineuse. C’est parti d’un pari fou en juin 2013 pour faire un 9km3 qui me semblait une distance énorme. Et la frénésie du toujours plus m’a gagné, mon collègue me dit maintenant tu feras un semi, ça me paraissait délirant à l’époque une telle distance, c’est là que je suis arrivé sur le forum ccap et que j’ai appris que courir ça s’apprenait.
Je ferais le semi comme prévu 5 mois après puis ce fut les trails urbains (les vrais trails m’étant impossibles à cause de mes chevilles fragiles) et lors d’un trail urbain en septembre dernier, il m’emmène vers celui de Paris qui aura lieu en avril. Je ne m’en pensais pas capable surtout avec mes lacunes d’entrainement hivernal mais tant pis, j’ai signé et j’ai payé donc maintenant à moi de faire les choses pour que ça se passe bien.
Je choisis le plan 16 semaines et 3 sorties par semaine qui démarre le 20/12, joyeux noël…
Je m’entraine correctement, assidument presque et je m’étonne par ce temps qui n’est pas trop le mien. Et puis je serais rattrapé par mes soucis de cheville, finalement ce sera les 2 pieds qui deviennent douloureux et je freine l’entrainement après une très belle semaine à 4 sorties début février. La dernière semaine correcte d’entrainement suivant le plan, ensuite ce sera un enchainement de semaine plus ou moins efficace et hélas bien plus souvent moins.
Je pars au ski lors de la semaine du semi préparatoire et j’arrive donc sans jus et fatigué. Comble de la bêtise, je ne me tiens pas à mon objectif en courant en AS21 plutôt qu’en AS42. J’obtiendrais un RP mais après la connaissance d’un premier mur lors du 19ème km, les prémices du 30ème…
Je tenterais bien de repartir ensuite lors de ce derniers mois, mais les douleurs au tendon sont toujours présentes et j’ai peur à la blessure avant l’événement. 2 choix s’opposent, le repos des tendons en espérant que ça permettra qu’ils se remettent pour le 12/04 mais avec l’angoisse d’arriver sans jus et repartir à l’entrainement quitte à se blesser définitivement. Je prends l’option 1 qui est aussi celle de la flemme…
La dernière semaine arrive, j’ai obtenu de ne pas travailler le jeudi et le vendredi ce qui m’évitera de me lever à 4h du matin ces jours et me permettront de commencer correctement le régime alimentaire. A noter que j’ai réussi à tenir 3 semaines sans une goutte d’alcool… J’aurais au moins réussi ça dans ma préparation !
J’enchaine les platées de pâtes et de viande blanche, le samedi ma femme fait un trail nocturne, je suis déçue de ne pas aller l’encourager mais il faut bien se coucher pas trop tard.
Dimanche réveil à 6h00 pour un départ à 7h00. Mon camarade qui devait le faire avec moi s’est blessé lors du semi préparatoire et ne pourra donc pas s’aligner avec moi. Cependant, il a tenu à m’accompagner pour me faire le taxi et le vestiaire, c’est hyper généreux de sa part car je sais sa déception.
Nous nous garons porte d’Italie, ligne 5 puis ligne 6. Nous sommes épatés de voir si peu de monde dans le métro, certes j’arrive après le départ des élites mais je suis loin d’être le seul normalement ?
On arrive place de l’Etoile et le contraste est saisissant. Nous passons d’un métro vide a une foulée dense et rieuse, à part peut être pour ceux qui attendent pour le pipi…
Un premier selfie devant l’Arc de Triomphe espérant el revoir à nouveau auréolé d’une victoire contre la distance.
J’abandonne mon collègue et je descend vers le sas 4h. C’est l’heure de pointe pour rentrer dedans, une fois à l’intérieur j’envoie un sms à Alex pour qu’on se retrouve, je lui dit où je suis et il me répond qu’il y est aussi, je me retourne, on se regarde 2 secondes car au final, on ne connaissait pas trop nos visages, un « Alex » et c’est parti copain comme cochon en s’emboite dans la file d’attente.
Il a été plus malin que moi il a une petite bouteille vide et un short ample, ça lui évitera mon premier arrêt pipi ?
On attend finalement peu de temps avant d’avancer, mais hélas la route est séparée en deux et nous sommes dans le deuxième départ, serions-nous pressé d’en baver…
9h44 soit 14’ après l’heure prévue nous nous élançons. Le boulevard est tellement large que nous ne sommes vraiment pas gênés. Nous discutons un peu sur nos allures respectives et je laisse partir Alex qui a dans les jambes une vrai préparation et un objectif qui va avec.
Sitôt Alex parti, je m’écarte des champs pour un petit arrêt qui durera 1’, la gestion du pipi, si bête soit elle, est cruciale sur le temps d’arrivée car cette minute ne se rattrape pas et pourtant j’aurais pu l’éviter.
Je repars les yeux grands ouverts sur ces grands boulevards et ces monuments d’un autre temps mais qui sont attrayants même pour tous même ceux qui comme moi les ont déjà vu à de nombreuses reprises, car en plus, nous avons la chance d’être là où d’habitude la circulation nous empêche de profiter de ce spectacle.
J’arrive donc au premier ravitaillement uniquement en eau en 28’02 ‘’ soit 5’38/km. C’est certes l’allure 4h mais je sais que je dois partir sur des bases 4’30/km si je veux avoir des marges pour les différents arrêts.
Je retrouve la pataugeoire rencontrée au 20km de Paris avec tous les détritus mis au sol, même si les bouteilles d’eau ne traine pas trop et la cohue de ceux pensant qu’ils n’en auront pas…
Les kilomètres s’enchainent plutôt bien, j’avoue être embarqué dans le mouvement mais les ratios sont bons donc je laisse filer tranquillement et je suis content car au moins c’est toujours ça de mangé sur la quantité de km. La BSPP a installé une lance en brumisateur pour nous rafraichir, c’est pas mal mais à l’ombre c’est frisqué.
J’arrive au 10km en 55’32 soit pile 5’30/km sur les km 5 à 10. Tout va bien, une bouteille d’eau et 3 morceaux de bananes et c’est reparti.
Petit bémol, je sens une légère plissure sous le pied droit, une des chaussettes risque de me faire une ampoule mais il est trop tôt pour que ce ne soit pas gênant. Je décide de prendre le risque de ne rien changer en bougeant jute un peu les orteils afin de la replacer, car m’arrêter et remettre la chaussette risquerait d’être bien pire
J’arrive à voir poindre la flamme d’un meneur d’allure 4h, je le remonte sans changer de rythme ce qui est plutôt rassurant, mais à nouveau une pause pipi s’impose, tant pis, je le reverrais peut être plus tard.
J’arrive au 15km en 1h23’15 soit 5’36/km du à l’arrêt pipi principalement mais le pire reste à venir.
Nous arrivons au ravitaillement, je file vers le fond des tables comme d’habitude pour éviter la cohue, mais hélas le sol est vraiment gorgé de détritus, les chaussures en sont même collante. J’attrape une bouteille d’eau me décale pour aller plus loin hercher mes 3 morceaux de bananes et en repartant c’est là que se produit le drame. Je m’écarte de la table lorsqu’une anglaise plonge devant moi vers la table, je ne peux l’éviter qu’au prix d’une embardée mais les pieds dérapent et je m’envole pour retomber sur le bras droit et le dos. L’anglaise se confond en excuse mais je n’ai pas le temps de l’attendre, je repars, je ferais le diagnostic en courant, j’ai le temps…
Je suis totalement couvert de boue de banane et d’orange sur le côté droit, je regarde à de nombreuses reprises mon coude et oh miracle, pas de saignements. La cuisse est un peu douloureuse mais là encore pas de saignement, je m’en sors plutôt bien même si les traumatismes auront surement leur impact plus tard, nous n’en sommes qu’au 15ème.
Je repars et je rejoins bientôt le meneur d’allure 4h de tout à l’heure. Je m’en rapproche et le double tout doucement. Je suis partagé entre me coller à leur train ou garder le mien qui pour le moment me va très bien.
Passage au km20 en 1h50’39 soit 5’32/km, hélas une grosse descente avant le 20 m’a un peu grisé et en regardant ma montre, je me suis rendu compte que je tournais régulièrement proche des 5’/km ce qui est complétement une absurdité.
Par contre je suis super étonné du ravitaillement du meneur d’allure, car je n’ai pris qu’une bouteille et 3 morceaux de bananes et je le retrouve devant moi largement après le ravitaillement, ils ne se sont pas arrêtés ??
Au km23 nouveau brumisateur de la BSPP, je décide d’en profiter car le rafraîchissement ne me fera pas de mal vu que la chaleur commence à être très présente. 2ème galère…
Je me colle côté de la table pour prendre un max de pluie, sauf que l’eau a ruisselé et je me retrouve dans une énorme flaque de 20cm d’eau. Mes chaussures, mes chaussettes et les pieds sont trempés complétement, ce qui ne manque pas de réveiller le début d’ampoule supposé tout à l’heure. Les chaussures sont lourdes, très lourdes !
Nous prenons le ravitaillement au km24 car nous enchainons ensuite sur 1km500 de tunnel. La pénombre est désagréable mais au moins il fait plus frais. Seulement la route est beaucoup moins large, je décide donc de me mettre sur le trottoir gauche qui est lui plutôt dégagé. 3ème erreur… La pénombre ne me fait pas voir un bateau de ce trottoir qui est très haut, résultat, mon pied droit s’encastre dans le dénivelé subit, je trébuche, les pieds me rattrapent mais au prix d’un très gros effort et de chocs énormes. Mes cuisses ont bien chauffées sur le coup et si je ne suis pas tombé, ce n’est guère mieux.
Km25 en 5’36/km le rythme baisse mais reste suffisant…
L’enchainement des galères et la fatigue commencent leur travail de sape !
Je commence à compter les kms à rebours mais ça me parait encore énorme, ce qui n’est pas pour me motiver encore…
Je me laisse ralentir et laisse partir le flambeau 4h00 pour me faire passer par… le flambeau 4h00. Je m’étais fourvoyé, ce n’était pas le même porteur que j’avais aperçu et du coup, j’aurais mieux fait de me laisser glisser vers ce meneur d’allure qui était sur un rythme plus à ma portée.
Nous arrivons au km30 5’58/km avec un 30ème en 6’52, les forces m’ont lâchées…
Les organisateurs ont trouvé drôles de symboliser un faux mur sur les bords en mentionnant dessus « vous franchissez le mur ».
Et je l’ai pris en pleine poire tout de suite après.
Ça tombe comme un couperet, j’arrive au ravitaillement, je décide de faire un ravitaillement long en prenant le temps de manger et en marchant plutôt que de continuer de courir.
Sauf que je n’arrive pas à redémarrer. Les jambes ne veulent pas.
Le doute s’installe, dois je abandonner !
Tant pis, je marche un peu et je fais un nouvel arrêt pipi. Je décide un coup de poker, en utilisant mon joker téléphone. J’appelle ma femme, je lui dis que je suis dans le mur, on papote 2 minutes pendant que je marche, ça change les idées.
Je tente de repartir et là nouveau coup d’arrêt avec énormes contractures au niveau des cuisses. Mes jambes sont des bouts de bois. Je m’arrête à nouveau, je sens l’arrêt définitif poindre de plus en plus. J’étire les jambes sur une barrière 15secondes.
Etait-ce suffisant ? Fallait-il un petit repos ? En tout cas, j’arrive à remettre un pied devant l’autre. Certes l’allure est ridicule mais au moins j’avance et en courant.
J’arrive péniblement au km35 en 7’28/km, ça fait mal !!! Les 4h sont bien loin maintenant mais en même temps, il s’agit de sauver mon marathon en arrivant.
Je sens le rythme revenir tranquillement même si je suis très loin de mes ratios. Je gagne quelques secondes à chaque kilomètre
Km36 7’03
Km37 6’33
Km38 6’20
Km39 6’06
Ce n’était plus les jambes qi travaillaient, j’étais un robot qui enchainait les pas, le regard droit devant, la bouche fermée. Je ne voyais que les mètres gagnaient vers la ligne d’arrivée. C’est vache mais je me motivais à redoubler tous ceux qui m’avaient doublés lorsque j’étais à l’agonie. De plus en plus de runners devenaient des marcheurs, le nombre de concurrents à la peine allait croissant.
J’avançais inexorablement vers la ligne d’arrivée et c’était pour moi le principal. Les ravitaillement des km35 et 40 je les zappe complètement hormis une bouteille au 40 car j’étais incapable d’ingurgiter quoi que ce soit et surtout pas me ralentir ou encore m’arrêter.
Km40 6’37/km, je suis au km40. Plus jamais je ne m’arrêterais sans franchir cette maudite ligne ! Les dents sont serrées.
Km41 en 6’15 le rythme est toujours là car jai fait une escale bouteille d’eau.
La foule devient de plus en plus dense, on nous annonce tous les 100m qu’on se rapproche d’autant de la ligne. Certains mentent gentiment pour nous motiver sur la fin proche.
Je passe un rond point et je me retrouve sur une immense avenue, l’Immense avenue que j’attendais depuis maintenant 42km. J’arrive sur les 200 derniers mètres, plus rien ne peut m’arriver, je savoure, je prends même des photos de la ligne au loin. J’accélères comme je peux.
J’y suis, je passe l’arche et j’arrête ma montre : 4h12’39
Je suis finalement plus lucide que je ne l’étais 10km plus tôt.
Je suis finalement bien mieux que nombre de personnes autour de moi, j’ai le sourire et je marche tranquillement sans chanceler alors que beaucoup souffre et se mette à terre.
Je remonte l’avenue, je trouve l’organisation de l’arrivée extrêmement bien faite. Je récupère mon t-shirt et mon pancho, je me ravitaille avec encore des bananes, une pomme et plein d’abricot sec.
Je commence à réaliser que je suis marathonien ! Je l’ai fait, j’ai réussi ce pari fou, j’appelle ma femme puis mon collègue qui m’attend. Je peux rentrer chez moi et je mesure aux nombres de félicitations de mes proches que c’est loin d’être banal comme course.
Voilà, pour l’éternité, je suis marathonien, je ne suis pas dans les premiers, je ne suis pas dans les derniers, je suis dans la masse. Cette masse est une masse héroïque qui réalise un exploit bien méconnu, un exploit que je mesure aujourd’hui, maintenant que je connais les sacrifices pour pouvoir dire : JE SUIS MARATHONIEN
Je ferais le semi comme prévu 5 mois après puis ce fut les trails urbains (les vrais trails m’étant impossibles à cause de mes chevilles fragiles) et lors d’un trail urbain en septembre dernier, il m’emmène vers celui de Paris qui aura lieu en avril. Je ne m’en pensais pas capable surtout avec mes lacunes d’entrainement hivernal mais tant pis, j’ai signé et j’ai payé donc maintenant à moi de faire les choses pour que ça se passe bien.
Je choisis le plan 16 semaines et 3 sorties par semaine qui démarre le 20/12, joyeux noël…
Je m’entraine correctement, assidument presque et je m’étonne par ce temps qui n’est pas trop le mien. Et puis je serais rattrapé par mes soucis de cheville, finalement ce sera les 2 pieds qui deviennent douloureux et je freine l’entrainement après une très belle semaine à 4 sorties début février. La dernière semaine correcte d’entrainement suivant le plan, ensuite ce sera un enchainement de semaine plus ou moins efficace et hélas bien plus souvent moins.
Je pars au ski lors de la semaine du semi préparatoire et j’arrive donc sans jus et fatigué. Comble de la bêtise, je ne me tiens pas à mon objectif en courant en AS21 plutôt qu’en AS42. J’obtiendrais un RP mais après la connaissance d’un premier mur lors du 19ème km, les prémices du 30ème…
Je tenterais bien de repartir ensuite lors de ce derniers mois, mais les douleurs au tendon sont toujours présentes et j’ai peur à la blessure avant l’événement. 2 choix s’opposent, le repos des tendons en espérant que ça permettra qu’ils se remettent pour le 12/04 mais avec l’angoisse d’arriver sans jus et repartir à l’entrainement quitte à se blesser définitivement. Je prends l’option 1 qui est aussi celle de la flemme…
La dernière semaine arrive, j’ai obtenu de ne pas travailler le jeudi et le vendredi ce qui m’évitera de me lever à 4h du matin ces jours et me permettront de commencer correctement le régime alimentaire. A noter que j’ai réussi à tenir 3 semaines sans une goutte d’alcool… J’aurais au moins réussi ça dans ma préparation !
J’enchaine les platées de pâtes et de viande blanche, le samedi ma femme fait un trail nocturne, je suis déçue de ne pas aller l’encourager mais il faut bien se coucher pas trop tard.
Dimanche réveil à 6h00 pour un départ à 7h00. Mon camarade qui devait le faire avec moi s’est blessé lors du semi préparatoire et ne pourra donc pas s’aligner avec moi. Cependant, il a tenu à m’accompagner pour me faire le taxi et le vestiaire, c’est hyper généreux de sa part car je sais sa déception.
Nous nous garons porte d’Italie, ligne 5 puis ligne 6. Nous sommes épatés de voir si peu de monde dans le métro, certes j’arrive après le départ des élites mais je suis loin d’être le seul normalement ?
On arrive place de l’Etoile et le contraste est saisissant. Nous passons d’un métro vide a une foulée dense et rieuse, à part peut être pour ceux qui attendent pour le pipi…
Un premier selfie devant l’Arc de Triomphe espérant el revoir à nouveau auréolé d’une victoire contre la distance.
J’abandonne mon collègue et je descend vers le sas 4h. C’est l’heure de pointe pour rentrer dedans, une fois à l’intérieur j’envoie un sms à Alex pour qu’on se retrouve, je lui dit où je suis et il me répond qu’il y est aussi, je me retourne, on se regarde 2 secondes car au final, on ne connaissait pas trop nos visages, un « Alex » et c’est parti copain comme cochon en s’emboite dans la file d’attente.
Il a été plus malin que moi il a une petite bouteille vide et un short ample, ça lui évitera mon premier arrêt pipi ?
On attend finalement peu de temps avant d’avancer, mais hélas la route est séparée en deux et nous sommes dans le deuxième départ, serions-nous pressé d’en baver…
9h44 soit 14’ après l’heure prévue nous nous élançons. Le boulevard est tellement large que nous ne sommes vraiment pas gênés. Nous discutons un peu sur nos allures respectives et je laisse partir Alex qui a dans les jambes une vrai préparation et un objectif qui va avec.
Sitôt Alex parti, je m’écarte des champs pour un petit arrêt qui durera 1’, la gestion du pipi, si bête soit elle, est cruciale sur le temps d’arrivée car cette minute ne se rattrape pas et pourtant j’aurais pu l’éviter.
Je repars les yeux grands ouverts sur ces grands boulevards et ces monuments d’un autre temps mais qui sont attrayants même pour tous même ceux qui comme moi les ont déjà vu à de nombreuses reprises, car en plus, nous avons la chance d’être là où d’habitude la circulation nous empêche de profiter de ce spectacle.
J’arrive donc au premier ravitaillement uniquement en eau en 28’02 ‘’ soit 5’38/km. C’est certes l’allure 4h mais je sais que je dois partir sur des bases 4’30/km si je veux avoir des marges pour les différents arrêts.
Je retrouve la pataugeoire rencontrée au 20km de Paris avec tous les détritus mis au sol, même si les bouteilles d’eau ne traine pas trop et la cohue de ceux pensant qu’ils n’en auront pas…
Les kilomètres s’enchainent plutôt bien, j’avoue être embarqué dans le mouvement mais les ratios sont bons donc je laisse filer tranquillement et je suis content car au moins c’est toujours ça de mangé sur la quantité de km. La BSPP a installé une lance en brumisateur pour nous rafraichir, c’est pas mal mais à l’ombre c’est frisqué.
J’arrive au 10km en 55’32 soit pile 5’30/km sur les km 5 à 10. Tout va bien, une bouteille d’eau et 3 morceaux de bananes et c’est reparti.
Petit bémol, je sens une légère plissure sous le pied droit, une des chaussettes risque de me faire une ampoule mais il est trop tôt pour que ce ne soit pas gênant. Je décide de prendre le risque de ne rien changer en bougeant jute un peu les orteils afin de la replacer, car m’arrêter et remettre la chaussette risquerait d’être bien pire
J’arrive à voir poindre la flamme d’un meneur d’allure 4h, je le remonte sans changer de rythme ce qui est plutôt rassurant, mais à nouveau une pause pipi s’impose, tant pis, je le reverrais peut être plus tard.
J’arrive au 15km en 1h23’15 soit 5’36/km du à l’arrêt pipi principalement mais le pire reste à venir.
Nous arrivons au ravitaillement, je file vers le fond des tables comme d’habitude pour éviter la cohue, mais hélas le sol est vraiment gorgé de détritus, les chaussures en sont même collante. J’attrape une bouteille d’eau me décale pour aller plus loin hercher mes 3 morceaux de bananes et en repartant c’est là que se produit le drame. Je m’écarte de la table lorsqu’une anglaise plonge devant moi vers la table, je ne peux l’éviter qu’au prix d’une embardée mais les pieds dérapent et je m’envole pour retomber sur le bras droit et le dos. L’anglaise se confond en excuse mais je n’ai pas le temps de l’attendre, je repars, je ferais le diagnostic en courant, j’ai le temps…
Je suis totalement couvert de boue de banane et d’orange sur le côté droit, je regarde à de nombreuses reprises mon coude et oh miracle, pas de saignements. La cuisse est un peu douloureuse mais là encore pas de saignement, je m’en sors plutôt bien même si les traumatismes auront surement leur impact plus tard, nous n’en sommes qu’au 15ème.
Je repars et je rejoins bientôt le meneur d’allure 4h de tout à l’heure. Je m’en rapproche et le double tout doucement. Je suis partagé entre me coller à leur train ou garder le mien qui pour le moment me va très bien.
Passage au km20 en 1h50’39 soit 5’32/km, hélas une grosse descente avant le 20 m’a un peu grisé et en regardant ma montre, je me suis rendu compte que je tournais régulièrement proche des 5’/km ce qui est complétement une absurdité.
Par contre je suis super étonné du ravitaillement du meneur d’allure, car je n’ai pris qu’une bouteille et 3 morceaux de bananes et je le retrouve devant moi largement après le ravitaillement, ils ne se sont pas arrêtés ??
Au km23 nouveau brumisateur de la BSPP, je décide d’en profiter car le rafraîchissement ne me fera pas de mal vu que la chaleur commence à être très présente. 2ème galère…
Je me colle côté de la table pour prendre un max de pluie, sauf que l’eau a ruisselé et je me retrouve dans une énorme flaque de 20cm d’eau. Mes chaussures, mes chaussettes et les pieds sont trempés complétement, ce qui ne manque pas de réveiller le début d’ampoule supposé tout à l’heure. Les chaussures sont lourdes, très lourdes !
Nous prenons le ravitaillement au km24 car nous enchainons ensuite sur 1km500 de tunnel. La pénombre est désagréable mais au moins il fait plus frais. Seulement la route est beaucoup moins large, je décide donc de me mettre sur le trottoir gauche qui est lui plutôt dégagé. 3ème erreur… La pénombre ne me fait pas voir un bateau de ce trottoir qui est très haut, résultat, mon pied droit s’encastre dans le dénivelé subit, je trébuche, les pieds me rattrapent mais au prix d’un très gros effort et de chocs énormes. Mes cuisses ont bien chauffées sur le coup et si je ne suis pas tombé, ce n’est guère mieux.
Km25 en 5’36/km le rythme baisse mais reste suffisant…
L’enchainement des galères et la fatigue commencent leur travail de sape !
Je commence à compter les kms à rebours mais ça me parait encore énorme, ce qui n’est pas pour me motiver encore…
Je me laisse ralentir et laisse partir le flambeau 4h00 pour me faire passer par… le flambeau 4h00. Je m’étais fourvoyé, ce n’était pas le même porteur que j’avais aperçu et du coup, j’aurais mieux fait de me laisser glisser vers ce meneur d’allure qui était sur un rythme plus à ma portée.
Nous arrivons au km30 5’58/km avec un 30ème en 6’52, les forces m’ont lâchées…
Les organisateurs ont trouvé drôles de symboliser un faux mur sur les bords en mentionnant dessus « vous franchissez le mur ».
Et je l’ai pris en pleine poire tout de suite après.
Ça tombe comme un couperet, j’arrive au ravitaillement, je décide de faire un ravitaillement long en prenant le temps de manger et en marchant plutôt que de continuer de courir.
Sauf que je n’arrive pas à redémarrer. Les jambes ne veulent pas.
Le doute s’installe, dois je abandonner !
Tant pis, je marche un peu et je fais un nouvel arrêt pipi. Je décide un coup de poker, en utilisant mon joker téléphone. J’appelle ma femme, je lui dis que je suis dans le mur, on papote 2 minutes pendant que je marche, ça change les idées.
Je tente de repartir et là nouveau coup d’arrêt avec énormes contractures au niveau des cuisses. Mes jambes sont des bouts de bois. Je m’arrête à nouveau, je sens l’arrêt définitif poindre de plus en plus. J’étire les jambes sur une barrière 15secondes.
Etait-ce suffisant ? Fallait-il un petit repos ? En tout cas, j’arrive à remettre un pied devant l’autre. Certes l’allure est ridicule mais au moins j’avance et en courant.
J’arrive péniblement au km35 en 7’28/km, ça fait mal !!! Les 4h sont bien loin maintenant mais en même temps, il s’agit de sauver mon marathon en arrivant.
Je sens le rythme revenir tranquillement même si je suis très loin de mes ratios. Je gagne quelques secondes à chaque kilomètre
Km36 7’03
Km37 6’33
Km38 6’20
Km39 6’06
Ce n’était plus les jambes qi travaillaient, j’étais un robot qui enchainait les pas, le regard droit devant, la bouche fermée. Je ne voyais que les mètres gagnaient vers la ligne d’arrivée. C’est vache mais je me motivais à redoubler tous ceux qui m’avaient doublés lorsque j’étais à l’agonie. De plus en plus de runners devenaient des marcheurs, le nombre de concurrents à la peine allait croissant.
J’avançais inexorablement vers la ligne d’arrivée et c’était pour moi le principal. Les ravitaillement des km35 et 40 je les zappe complètement hormis une bouteille au 40 car j’étais incapable d’ingurgiter quoi que ce soit et surtout pas me ralentir ou encore m’arrêter.
Km40 6’37/km, je suis au km40. Plus jamais je ne m’arrêterais sans franchir cette maudite ligne ! Les dents sont serrées.
Km41 en 6’15 le rythme est toujours là car jai fait une escale bouteille d’eau.
La foule devient de plus en plus dense, on nous annonce tous les 100m qu’on se rapproche d’autant de la ligne. Certains mentent gentiment pour nous motiver sur la fin proche.
Je passe un rond point et je me retrouve sur une immense avenue, l’Immense avenue que j’attendais depuis maintenant 42km. J’arrive sur les 200 derniers mètres, plus rien ne peut m’arriver, je savoure, je prends même des photos de la ligne au loin. J’accélères comme je peux.
J’y suis, je passe l’arche et j’arrête ma montre : 4h12’39
Je suis finalement plus lucide que je ne l’étais 10km plus tôt.
Je suis finalement bien mieux que nombre de personnes autour de moi, j’ai le sourire et je marche tranquillement sans chanceler alors que beaucoup souffre et se mette à terre.
Je remonte l’avenue, je trouve l’organisation de l’arrivée extrêmement bien faite. Je récupère mon t-shirt et mon pancho, je me ravitaille avec encore des bananes, une pomme et plein d’abricot sec.
Je commence à réaliser que je suis marathonien ! Je l’ai fait, j’ai réussi ce pari fou, j’appelle ma femme puis mon collègue qui m’attend. Je peux rentrer chez moi et je mesure aux nombres de félicitations de mes proches que c’est loin d’être banal comme course.
Voilà, pour l’éternité, je suis marathonien, je ne suis pas dans les premiers, je ne suis pas dans les derniers, je suis dans la masse. Cette masse est une masse héroïque qui réalise un exploit bien méconnu, un exploit que je mesure aujourd’hui, maintenant que je connais les sacrifices pour pouvoir dire : JE SUIS MARATHONIEN
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- Sabrina Gump
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Oui, marathonien ! Félicitations !
Merci également pour ce compte-rendu précis !
Pour les ravitaillements, tu n'as mangé que des bouts de bananes et bu de l'eau ?
Merci également pour ce compte-rendu précis !
Pour les ravitaillements, tu n'as mangé que des bouts de bananes et bu de l'eau ?
par Sabrina Gump
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- Patrick57
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A nouveau un grand bravo Raphaël pour avoir réussi à vaincre tous ces écueils qui se sont dressés sur ta route dimanche !
Et quel mur dis-donc ! ... mur que tu as réussi à passer finalement, en le gérant plutôt bien puisque tu as réussi à retrouver progressivement un peu d'allant ... et tu t'es même permis de prendre des photos avant l'arrivée ...trop fort !
A priori, tes tendons t'ont laissé tranquille si j'ai bien suivi
Dommage pour ces 2 chutes car ça t'a forcément couté des forces pour la suite.
Et avec une prépa non tronquée, je suis sûr que le sub 4h était largement à ta portée
Tu as pu mesurer toute la difficulté que représentait une telle épreuve ... but you did it, yessss !!!!
Merci pour ce très joli CR !
Bonne récup et encore bravo !
Et quel mur dis-donc ! ... mur que tu as réussi à passer finalement, en le gérant plutôt bien puisque tu as réussi à retrouver progressivement un peu d'allant ... et tu t'es même permis de prendre des photos avant l'arrivée ...trop fort !
A priori, tes tendons t'ont laissé tranquille si j'ai bien suivi
Dommage pour ces 2 chutes car ça t'a forcément couté des forces pour la suite.
Et avec une prépa non tronquée, je suis sûr que le sub 4h était largement à ta portée
Tu as pu mesurer toute la difficulté que représentait une telle épreuve ... but you did it, yessss !!!!
Merci pour ce très joli CR !
Bonne récup et encore bravo !
par Patrick57
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- ketshoo
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Félicitation à toi!
Merci pour ce CR
Te voila Marathonien
Merci pour ce CR
Te voila Marathonien
Last Edit:il y a 9 ans 7 mois
par ketshoo
Dernière édition: il y a 9 ans 7 mois par ketshoo.
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Bravo Coincoin,
Et un Marathonien, Un !
Ah ce maudit mur...
Félicitations d'avoir su te ressaisir de la sorte et de n'avoir rien lâché jusqu'à la ligne d'arrivée.
La belle récompense était au bout.
Merci pour ce CR, maintenant place à la récup',
Encore bravo,
Et un Marathonien, Un !
Ah ce maudit mur...
Félicitations d'avoir su te ressaisir de la sorte et de n'avoir rien lâché jusqu'à la ligne d'arrivée.
La belle récompense était au bout.
Merci pour ce CR, maintenant place à la récup',
Encore bravo,
par faco
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Un CR qui envoit du rêve. C'est vraiment cool de pouvoir vivre un petit peu par procuration de tels événements. (je te laisse les courbatures )
Je ne dirais donc qu'une chose, merci MOSSIEURS le marathonien. (oui ça mérite un s à ce niveau la)
Je ne dirais donc qu'une chose, merci MOSSIEURS le marathonien. (oui ça mérite un s à ce niveau la)
par Osmo
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