Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
- Aquila
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Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu a été créé par Aquila
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337916
Prélude
Je me retrouve sur la ligne de départ échaudé par mon échec relatif de l’an dernier sur cette course (cf ***CR 2013*** ) et sevré de résultats sportifs en 2014 — toutes courses annulées soit pour maladie, soit pour emploi du temps incompatible. Bénéficiant cette année des conseils amicaux d’un coach qualifié et expérimenté, j’ai cherché, avec son aide, à exploiter à fond mon potentiel, au prix d’une préparation chargée et tendue (mon carnet d’entrainement CCAP est à jour pour les curieux).
Attente studieuse
Arrivé tôt pour partir pas trop loin de la ligne et limiter les embouteillages aux premiers km, j’ai 1h30 à tuer. J’en profite pour passer en revue mon plan de course. On n’affiche pas le cardio mais on le relève pour alimenter les stats. A la place, le 4e affichage de l’écran principal de la Garmin 310 sera la vitesse moyenne. Objectif : 1h46. Pour y parvenir, les 2 premiers km, presque plats, seront courus un peu sous AS 21 pour économiser du jus, soit 5 :00 min/km. Ensuite, on grimpe conformément à la sortie de reconnaissance de samedi dernier et, une fois au sommet du col de la Gineste, on déroule confortablement jusqu’au km 14 où on fait le point. A partir de là, on jette dans la bataille toutes les forces restant en réserve — en faisant gaffe aux crampes, auxquelles on est vulnérable au terme des descentes rapides — et on fait les comptes sur la ligne d’arrivée.
20 min avant le départ, enserré dans la foule compacte, je m’échauffe comme je peux en mimant un saut à la corde sans les mains… A H – 5 min, je ferme les yeux, me concentre, mets de l’ordre dans le plan de bataille et les consignes techniques, comme on range une boite à outils pour y retrouver ce dont on a besoin sans avoir à farfouiller. H – 1 min, les gens assis se lèvent et on gagne de la place, on marche donc quelques mètres vers la ligne de départ… Feu ! Avec les voisins d’impatience, on piétine deux bonnes minutes, on se souhaite bonne course et top action !
Le hors d’œuvre
Départ presque à froid, c’est pénible ça. Je vise 5 :00 avec un peu de mal. Des gens partent comme des boulets de canon — on les reprendra sur la Gineste — tandis que d’autres sont nettement sous le rythme général. Cette cohue est dangereuse, j’essaie de ne slalomer que quand c’est nécessaire, de trouver des « couloirs » d’allure où des coureurs se suivent au même régime. Ce genre d’intermède ne dure que 300m environ, ensuite il faut à nouveau déboîter en surveillant les boulets de canon qui dépassent de partout… Déjà la voix du coach résonne dans ma tête comme s'il était là : « posture, foulée, ventilation ! »
Km 1: 05:04 min, D+ 7 m, FC moy 82%, FC max 87%.
Km 2: 04:58 min, D+ 13 m, FC moy 88%, FC max 89%.
Pour aller plus haut…
On arrive sur le parcours parfaitement étalonné dans ma tête : l’ascension qui va durer jusqu’au km 9,5. Là, pas d’impro. Ca commence en grimpant doucement. Ca va s’accentuer progressivement jusqu’au sommet. C’est là qu’on fout sa course en l’air alors pas de blague. La voix du coach encore dans la tête : « la foulée pilote la FC, même si tu ne l’affiches pas sur ta montre. Petites foulées rasantes, bras souples, un torrent d’air frais dévale sur les bronches ». Au km 3, j’avale une pâte de fruits que je rince avec une rasade de potion magique (jus de citron, sirop de sucre de canne, sel et Château La Pompe 2014), comme le chauffeur d’une loco jette du charbon dans son foyer et réinjecte de la flotte dans sa chaudière... Dans 10 min, ça enverra ce qu’il faut là où il faut. « La pente se raidit, raccourcis ta foulée ! Ventile !»
Km 3: 05:05 min, D+ 21 m, FC moy 88%, FC max 90%.
Km 4: 05:19 min, D+ 30 m, FC moy 90%, FC max 92%.
Km 5: 05:13 min, D+ 12 m, FC moy 90%, FC max 93%.
Aller plus hauuuuuuut…
La montée de Vaufrèges est passée. Beaucoup se croient dans le vif du sujet depuis un km ou deux. Lourde erreur. Autour de moi, j’entends souffler comme lors d’une grosse séance de VMA. Mauvais présage. A 6,7 km, le virage à droite en épingle dévoile alors la surprise, celle qui démolit le moral de ceux qui ne connaissent pas le quartier. Vu de l’œil de celui qui souffle comme une forge, à 100% de ses moyens dans la montée de Vaufrèges, on dirait un mur. Vu du balcon de celui qui s’économise, on dirait une vitre où des dizaines de frelons voient leur course folle se briser net. « Courte, la foulée, encore plus. Tu ventiles mal, travaille-moi ça. Bien souple sur les pattes arrière. Lààà, c’est bien. Au train, tranquille. Vas-y, dépasse-moi tout ça ». Un coup d’œil à ma droite : on voit la route en contrebas, et l’interminable serpent humain qui se déroule derrière nous à perte de vue. « Regarde devant toi, y’en a qui craquent, ça marche, ça zigzague, fais gaffe... ». Ca grimpe. Ca grimpe bien même. Ah, voilà les lacets, ça grimpe encore plus raide, la route est en fort dévers. « Il n’y a que quelques dizaines de mètres comme ça. Laisse passer l’orage. Ralentis autant qu’il faut mais ne cours pas n’importe comment ! Posture, foulée, ventilation… ». Là, c’est du bois dur. Et des gens sont là, au bord de la route. Des regards bienveillants, des mots qui font du bien. Comment sont-ils arrivés là ? Certains ont des vélos, d’autres pas. Et de bagnoles, il n’y en a pas. Tout ça pour encourager des gens qu’ils ne connaissent même pas. C’est beau, moi je dis. Merci messieurs-dames, merci les enfants ! Et c’est la bascule ! Sans transition, ça redescend fort vers le PK 10 ! Tiens, un des coureurs d’allure 1h45 ! Il va se ravitailler. Pas moi, j’ai mes pâtes de fruits et ma potion magique. Bye bye. Ca sens bon, ça… Je suis dans les temps programmés aux 10 km.
Km 6: 05:37 min, D+ 44 m, FC moy 92%, FC max 93%.
Km 7: 05:38 min, D+ 43 m, FC moy 92%, FC max 94%.
Km 8: 05:49 min, D+ 66 m, FC moy 94%, FC max 96%.
Km 9: 05:58 min, D+ 58 m, FC moy 94%, FC max 97%.
Km 10: 05:11 min, D+ 24m, D- 20+, FC moy 94%, FC max 99%.
Offensive en début de descente
Je fais le point. Ca va. Mal nulle part, pas cramé, je déroule fort dans la descente. Peu après le PK 10, il y a une petite grimpette : ça, c’est le juge de paix. Bon, bah j’ai bien géré, il y a du jus en stock. Plein ! Une pâte de fruits, une rasade de potion magique… Posture, foulée, ventilation et gaaaaaz ! Ca monte un peu, ça descend pas mal, c’est gondolé. Des types me dépassent et se mettent devant moi, ralentissant aussitôt. Bah ouais, ça remonte… Il faut zigzaguer, mettre des coups de cul car la foule reste dense. Sur la courbe cardio, on voit d’ailleurs des pics pas loin de 100% sur des manœuvres comme ça. Gaffe, ça use. Mais que faire ? Sans ça, il faut ralentir et relancer, ce n’est guère mieux. A chaque ravito, il faut serrer à gauche, dépasser la foule qui se ravitaille, puis faire gaffe à ceux qui reviennent en direction des poubelles disposées à gauche, à ceux qui te balancent leurs bouteilles à moitié vides dans la gueule, à ne pas glisser dans les flaques d’eau… Les Kinvara 4 n’ont pas tendance à l’aquaplaning, c’est une bonne chose.
Km 11 : 04:16 min, D- 44 m, FC moy 92%, FC max 96%.
Km 12 : 04:52 min, D+ 7 m, D- 12m, FC moy 92%, FC max 99%.
Km 13 : 04:42 min, D- 24 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 14 : 04:49 min, D- 10 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 15 : 05:01 min, D+ 8 m, D- 10 m, FC moy 92%, FC max 96%.
Opération « tout doit disparaitre » : on se dépouille lors du final
Là, ça descend fort. On lâche les chevaux mais on fait gaffe à rester technique, à atterrir souple à chaque foulée, à ne rien faire brusquement sinon une crampe, ou, pire, une contracture viendra mettre un terme à la belle aventure. A la vitesse moyenne affichée sur ma montre, j’ai de l’avance. Dans l’état où je suis, je suis bien incapable de la quantifier mais elle est nette. Je sens confusément que je suis en train de faire un gros, gros truc. Je n’entends plus la voix du coach dans ma tête mais je n’en ai plus besoin, je suis sur des rails. Je ressens mon corps : je suis à 100% de mon potentiel. Si j’accélère d’un pouillème, la machine va casser net. La foulée est technique. La ventilation est propre. La posture est nickel, le dos ne morfle absolument pas dans la descente. Mais j’ai mal. Les cuissots jouent les amortisseurs et je le sens passer. Dès que le profil s’aplanit, je réduis la cadence : je deviens fragile musculairement, je le sais. Je le sens. J’ai trois poumons. Je ne m’essouffle pas, et je ne m’essoufflerai pas. C’est la surcompensation qui fait son effet. Mais mes jambes, surtout la droite, n’aiment pas du tout ce qui se passe.
Voilà la côte des pompiers. Juste de quoi faire un travail de côtes courtes, un petit truc, quoi. Mais mal placé, à un peu plus d’1 km de l’arrivée. Se baisser, raccourcir la foulée, aller doucement. Laisser passer l’orage. Plein de gens sont là, bienveillants, ça booste. Merci à eux. La bascule, la relance. Trop fort. Le mollet droit essaie de faire une crampe. Tout beau mon grand, on est à plus de 13 km/h, au-delà du contrat ! Il reste 1 km. Coup d’œil à la montre… Oh nom de Dieu, le chrono ! Il doit y avoir un malentendu. Ouais, y’a un malentendu. Au sens du terme auquel aime bien l'entendre notre Robin diabolique… On reste calme, on ne s’emballe pas et on fait le boulot proprement jusqu'au bout. Je vois la ligne. Un type se traîne, rongé par les crampes. Je le dépasse. On se parlera après la ligne d'arrivée, qu'il franchira après une relance héroïque. 100m à faire, le mollet et la cuisse de la jambe droite se tétanisent. Allez donc vous faire voir, les muscles ! Je pousse, je boîte, je cours n’importe comment mais si je n’accélère pas, je vais m’arrêter. Un mélange de potion magique, de sucs gastriques et de pâte de fruits essaie de remonter par les voies naturelles mais je les renvoie à la cave. Ligne à 50m. Le chrono officiel promet le sas 1h45 pour l’an prochain. Vision tunnel. Je ne vois plus qu’ 1 m² sur la ligne d’arrivée. J’y mets le pied et coupe le chrono. Marcher, récupérer 3 bouteilles d’eau, reprendre ses esprits, marcher. C’est fini.
Km 16 : 04:24 min, D- 58 m, FC moy 91%, FC max 93%.
Km 17 : 04:13 min, D- 66 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 18 : 04:44 min, D+ 10m, D- 3 m, FC moy 94%, FC max 97%.
Km 19 : 04:55 min, D- 29 m, FC moy 94%, Fc max 98%.
Km 20 : 04:31 min, D- 62 m, FC moy 93%, FC max 96%
Bloc 21 : 310 m (slalom pendant 20 km + marge d’erreur): 01:24 min, Fc moy 94%, FC max 100%.
Récapitulatif : 01:41:43 h, D+ 336m, D-345 m, FC moy 91%, Fc max 100%.
Des larmes d’émotion en appelant mon épouse pour le résultat. La famille donne beaucoup quand un coureur fait une grosse, grosse prépa. Ne jamais l’oublier. Coup de fil au coach, et exultation commune ! Pour moi, c’est carton plein. La revanche est prise sur Marseille-Cassis 2013. 2014, année de disette en termes de résultats sportifs, devient année faste. L’objectif est archi-dépassé. Les progrès sont considérables, j’ai du mal à y croire. J’ai fait tout ce que je pouvais, 1 seconde de mieux eût été impossible. Je suis ravi, aux anges. Tout ce travail a porté ses fruits. « Mais après quoi cours-tu comme ça ? — Si vous saviez… »
Quelques chiffres pour les amateurs du genre.
Lien Garmin Connect: connect.garmin.com/activity/620351628
Merci à ceux et celles qui ont partagé avec moi cette belle aventure via mon suivi. Tout ça a commencé de façon un peu laborieuse à ma reprise du printemps dernier, et s'est terminé de bien belle manière, avec votre concours. Merci à vous, merci à CCAP, à ceux qui le gèrent et le font vivre.
Je me retrouve sur la ligne de départ échaudé par mon échec relatif de l’an dernier sur cette course (cf ***CR 2013*** ) et sevré de résultats sportifs en 2014 — toutes courses annulées soit pour maladie, soit pour emploi du temps incompatible. Bénéficiant cette année des conseils amicaux d’un coach qualifié et expérimenté, j’ai cherché, avec son aide, à exploiter à fond mon potentiel, au prix d’une préparation chargée et tendue (mon carnet d’entrainement CCAP est à jour pour les curieux).
Attente studieuse
Arrivé tôt pour partir pas trop loin de la ligne et limiter les embouteillages aux premiers km, j’ai 1h30 à tuer. J’en profite pour passer en revue mon plan de course. On n’affiche pas le cardio mais on le relève pour alimenter les stats. A la place, le 4e affichage de l’écran principal de la Garmin 310 sera la vitesse moyenne. Objectif : 1h46. Pour y parvenir, les 2 premiers km, presque plats, seront courus un peu sous AS 21 pour économiser du jus, soit 5 :00 min/km. Ensuite, on grimpe conformément à la sortie de reconnaissance de samedi dernier et, une fois au sommet du col de la Gineste, on déroule confortablement jusqu’au km 14 où on fait le point. A partir de là, on jette dans la bataille toutes les forces restant en réserve — en faisant gaffe aux crampes, auxquelles on est vulnérable au terme des descentes rapides — et on fait les comptes sur la ligne d’arrivée.
20 min avant le départ, enserré dans la foule compacte, je m’échauffe comme je peux en mimant un saut à la corde sans les mains… A H – 5 min, je ferme les yeux, me concentre, mets de l’ordre dans le plan de bataille et les consignes techniques, comme on range une boite à outils pour y retrouver ce dont on a besoin sans avoir à farfouiller. H – 1 min, les gens assis se lèvent et on gagne de la place, on marche donc quelques mètres vers la ligne de départ… Feu ! Avec les voisins d’impatience, on piétine deux bonnes minutes, on se souhaite bonne course et top action !
Le hors d’œuvre
Départ presque à froid, c’est pénible ça. Je vise 5 :00 avec un peu de mal. Des gens partent comme des boulets de canon — on les reprendra sur la Gineste — tandis que d’autres sont nettement sous le rythme général. Cette cohue est dangereuse, j’essaie de ne slalomer que quand c’est nécessaire, de trouver des « couloirs » d’allure où des coureurs se suivent au même régime. Ce genre d’intermède ne dure que 300m environ, ensuite il faut à nouveau déboîter en surveillant les boulets de canon qui dépassent de partout… Déjà la voix du coach résonne dans ma tête comme s'il était là : « posture, foulée, ventilation ! »
Km 1: 05:04 min, D+ 7 m, FC moy 82%, FC max 87%.
Km 2: 04:58 min, D+ 13 m, FC moy 88%, FC max 89%.
Pour aller plus haut…
On arrive sur le parcours parfaitement étalonné dans ma tête : l’ascension qui va durer jusqu’au km 9,5. Là, pas d’impro. Ca commence en grimpant doucement. Ca va s’accentuer progressivement jusqu’au sommet. C’est là qu’on fout sa course en l’air alors pas de blague. La voix du coach encore dans la tête : « la foulée pilote la FC, même si tu ne l’affiches pas sur ta montre. Petites foulées rasantes, bras souples, un torrent d’air frais dévale sur les bronches ». Au km 3, j’avale une pâte de fruits que je rince avec une rasade de potion magique (jus de citron, sirop de sucre de canne, sel et Château La Pompe 2014), comme le chauffeur d’une loco jette du charbon dans son foyer et réinjecte de la flotte dans sa chaudière... Dans 10 min, ça enverra ce qu’il faut là où il faut. « La pente se raidit, raccourcis ta foulée ! Ventile !»
Km 3: 05:05 min, D+ 21 m, FC moy 88%, FC max 90%.
Km 4: 05:19 min, D+ 30 m, FC moy 90%, FC max 92%.
Km 5: 05:13 min, D+ 12 m, FC moy 90%, FC max 93%.
Aller plus hauuuuuuut…
La montée de Vaufrèges est passée. Beaucoup se croient dans le vif du sujet depuis un km ou deux. Lourde erreur. Autour de moi, j’entends souffler comme lors d’une grosse séance de VMA. Mauvais présage. A 6,7 km, le virage à droite en épingle dévoile alors la surprise, celle qui démolit le moral de ceux qui ne connaissent pas le quartier. Vu de l’œil de celui qui souffle comme une forge, à 100% de ses moyens dans la montée de Vaufrèges, on dirait un mur. Vu du balcon de celui qui s’économise, on dirait une vitre où des dizaines de frelons voient leur course folle se briser net. « Courte, la foulée, encore plus. Tu ventiles mal, travaille-moi ça. Bien souple sur les pattes arrière. Lààà, c’est bien. Au train, tranquille. Vas-y, dépasse-moi tout ça ». Un coup d’œil à ma droite : on voit la route en contrebas, et l’interminable serpent humain qui se déroule derrière nous à perte de vue. « Regarde devant toi, y’en a qui craquent, ça marche, ça zigzague, fais gaffe... ». Ca grimpe. Ca grimpe bien même. Ah, voilà les lacets, ça grimpe encore plus raide, la route est en fort dévers. « Il n’y a que quelques dizaines de mètres comme ça. Laisse passer l’orage. Ralentis autant qu’il faut mais ne cours pas n’importe comment ! Posture, foulée, ventilation… ». Là, c’est du bois dur. Et des gens sont là, au bord de la route. Des regards bienveillants, des mots qui font du bien. Comment sont-ils arrivés là ? Certains ont des vélos, d’autres pas. Et de bagnoles, il n’y en a pas. Tout ça pour encourager des gens qu’ils ne connaissent même pas. C’est beau, moi je dis. Merci messieurs-dames, merci les enfants ! Et c’est la bascule ! Sans transition, ça redescend fort vers le PK 10 ! Tiens, un des coureurs d’allure 1h45 ! Il va se ravitailler. Pas moi, j’ai mes pâtes de fruits et ma potion magique. Bye bye. Ca sens bon, ça… Je suis dans les temps programmés aux 10 km.
Km 6: 05:37 min, D+ 44 m, FC moy 92%, FC max 93%.
Km 7: 05:38 min, D+ 43 m, FC moy 92%, FC max 94%.
Km 8: 05:49 min, D+ 66 m, FC moy 94%, FC max 96%.
Km 9: 05:58 min, D+ 58 m, FC moy 94%, FC max 97%.
Km 10: 05:11 min, D+ 24m, D- 20+, FC moy 94%, FC max 99%.
Offensive en début de descente
Je fais le point. Ca va. Mal nulle part, pas cramé, je déroule fort dans la descente. Peu après le PK 10, il y a une petite grimpette : ça, c’est le juge de paix. Bon, bah j’ai bien géré, il y a du jus en stock. Plein ! Une pâte de fruits, une rasade de potion magique… Posture, foulée, ventilation et gaaaaaz ! Ca monte un peu, ça descend pas mal, c’est gondolé. Des types me dépassent et se mettent devant moi, ralentissant aussitôt. Bah ouais, ça remonte… Il faut zigzaguer, mettre des coups de cul car la foule reste dense. Sur la courbe cardio, on voit d’ailleurs des pics pas loin de 100% sur des manœuvres comme ça. Gaffe, ça use. Mais que faire ? Sans ça, il faut ralentir et relancer, ce n’est guère mieux. A chaque ravito, il faut serrer à gauche, dépasser la foule qui se ravitaille, puis faire gaffe à ceux qui reviennent en direction des poubelles disposées à gauche, à ceux qui te balancent leurs bouteilles à moitié vides dans la gueule, à ne pas glisser dans les flaques d’eau… Les Kinvara 4 n’ont pas tendance à l’aquaplaning, c’est une bonne chose.
Km 11 : 04:16 min, D- 44 m, FC moy 92%, FC max 96%.
Km 12 : 04:52 min, D+ 7 m, D- 12m, FC moy 92%, FC max 99%.
Km 13 : 04:42 min, D- 24 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 14 : 04:49 min, D- 10 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 15 : 05:01 min, D+ 8 m, D- 10 m, FC moy 92%, FC max 96%.
Opération « tout doit disparaitre » : on se dépouille lors du final
Là, ça descend fort. On lâche les chevaux mais on fait gaffe à rester technique, à atterrir souple à chaque foulée, à ne rien faire brusquement sinon une crampe, ou, pire, une contracture viendra mettre un terme à la belle aventure. A la vitesse moyenne affichée sur ma montre, j’ai de l’avance. Dans l’état où je suis, je suis bien incapable de la quantifier mais elle est nette. Je sens confusément que je suis en train de faire un gros, gros truc. Je n’entends plus la voix du coach dans ma tête mais je n’en ai plus besoin, je suis sur des rails. Je ressens mon corps : je suis à 100% de mon potentiel. Si j’accélère d’un pouillème, la machine va casser net. La foulée est technique. La ventilation est propre. La posture est nickel, le dos ne morfle absolument pas dans la descente. Mais j’ai mal. Les cuissots jouent les amortisseurs et je le sens passer. Dès que le profil s’aplanit, je réduis la cadence : je deviens fragile musculairement, je le sais. Je le sens. J’ai trois poumons. Je ne m’essouffle pas, et je ne m’essoufflerai pas. C’est la surcompensation qui fait son effet. Mais mes jambes, surtout la droite, n’aiment pas du tout ce qui se passe.
Voilà la côte des pompiers. Juste de quoi faire un travail de côtes courtes, un petit truc, quoi. Mais mal placé, à un peu plus d’1 km de l’arrivée. Se baisser, raccourcir la foulée, aller doucement. Laisser passer l’orage. Plein de gens sont là, bienveillants, ça booste. Merci à eux. La bascule, la relance. Trop fort. Le mollet droit essaie de faire une crampe. Tout beau mon grand, on est à plus de 13 km/h, au-delà du contrat ! Il reste 1 km. Coup d’œil à la montre… Oh nom de Dieu, le chrono ! Il doit y avoir un malentendu. Ouais, y’a un malentendu. Au sens du terme auquel aime bien l'entendre notre Robin diabolique… On reste calme, on ne s’emballe pas et on fait le boulot proprement jusqu'au bout. Je vois la ligne. Un type se traîne, rongé par les crampes. Je le dépasse. On se parlera après la ligne d'arrivée, qu'il franchira après une relance héroïque. 100m à faire, le mollet et la cuisse de la jambe droite se tétanisent. Allez donc vous faire voir, les muscles ! Je pousse, je boîte, je cours n’importe comment mais si je n’accélère pas, je vais m’arrêter. Un mélange de potion magique, de sucs gastriques et de pâte de fruits essaie de remonter par les voies naturelles mais je les renvoie à la cave. Ligne à 50m. Le chrono officiel promet le sas 1h45 pour l’an prochain. Vision tunnel. Je ne vois plus qu’ 1 m² sur la ligne d’arrivée. J’y mets le pied et coupe le chrono. Marcher, récupérer 3 bouteilles d’eau, reprendre ses esprits, marcher. C’est fini.
Km 16 : 04:24 min, D- 58 m, FC moy 91%, FC max 93%.
Km 17 : 04:13 min, D- 66 m, FC moy 92%, FC max 95%.
Km 18 : 04:44 min, D+ 10m, D- 3 m, FC moy 94%, FC max 97%.
Km 19 : 04:55 min, D- 29 m, FC moy 94%, Fc max 98%.
Km 20 : 04:31 min, D- 62 m, FC moy 93%, FC max 96%
Bloc 21 : 310 m (slalom pendant 20 km + marge d’erreur): 01:24 min, Fc moy 94%, FC max 100%.
Récapitulatif : 01:41:43 h, D+ 336m, D-345 m, FC moy 91%, Fc max 100%.
Des larmes d’émotion en appelant mon épouse pour le résultat. La famille donne beaucoup quand un coureur fait une grosse, grosse prépa. Ne jamais l’oublier. Coup de fil au coach, et exultation commune ! Pour moi, c’est carton plein. La revanche est prise sur Marseille-Cassis 2013. 2014, année de disette en termes de résultats sportifs, devient année faste. L’objectif est archi-dépassé. Les progrès sont considérables, j’ai du mal à y croire. J’ai fait tout ce que je pouvais, 1 seconde de mieux eût été impossible. Je suis ravi, aux anges. Tout ce travail a porté ses fruits. « Mais après quoi cours-tu comme ça ? — Si vous saviez… »
Quelques chiffres pour les amateurs du genre.
Lien Garmin Connect: connect.garmin.com/activity/620351628
Merci à ceux et celles qui ont partagé avec moi cette belle aventure via mon suivi. Tout ça a commencé de façon un peu laborieuse à ma reprise du printemps dernier, et s'est terminé de bien belle manière, avec votre concours. Merci à vous, merci à CCAP, à ceux qui le gèrent et le font vivre.
Last Edit:il y a 10 ans 2 semaines
par Aquila
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Dernière édition: il y a 10 ans 2 semaines par Aquila.
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- dule66
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Réponse de dule66 sur le sujet Re: Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337919Merci pour ton CR, c'est super à lire, à imaginer,... Dire qu'au même moment je maudissais la côte sur laquelle je grimpais ! Ce CR est un exemple à suivre, on devrait l'imprimer et le poser en éditorial de magazine spécialisée, type Jogging ou running.....
Maintenant, récupère bien, savoure tes endorphines -tu as fais le plein pour la semaine au moins là.... et à très bientôt !
par dule66
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- Kodama
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Réponse de Kodama sur le sujet Re: Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337923
Quel beau CR et quelle magnifique performance !
Bravo pour cette prépa et course menée à son terme, sur le fil du rasoir !
Bravo !
Bravo pour cette prépa et course menée à son terme, sur le fil du rasoir !
Bravo !
par Kodama
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- Osmo
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Réponse de Osmo sur le sujet Re: Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337926
p**ain de CR
Désolé j'ai pas d'autres mots. Belle fin de saison à moins que tu ne termines sur un 10 pour faire péter ton RP sur cette distance. Avec une préparation aussi rondement menée, tu devrais pouvoir faire une jolie perf également.
Merci pour ce CR
Désolé j'ai pas d'autres mots. Belle fin de saison à moins que tu ne termines sur un 10 pour faire péter ton RP sur cette distance. Avec une préparation aussi rondement menée, tu devrais pouvoir faire une jolie perf également.
Merci pour ce CR
par Osmo
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- Kharaez
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Réponse de Kharaez sur le sujet Re: Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337928
La gestion de pourse aux petits oignons tout juste revenus comme il faut, donc pas cramés...
Excellent JM ! Encore bravo !
Excellent JM ! Encore bravo !
par Kharaez
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- hayko00
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Réponse de hayko00 sur le sujet Re: Marseille-Cassis: entre revanche et malentendu
Posted il y a 10 ans 3 semaines #337933
Super, bien joué !
Je tiens quand même a te préciser que ta FCM est mal évalué, au lien garmin si j'ai bien compris tu atteint 105% de ta FCM.
Je tiens quand même a te préciser que ta FCM est mal évalué, au lien garmin si j'ai bien compris tu atteint 105% de ta FCM.
Last Edit:il y a 10 ans 3 semaines
par hayko00
Dernière édition: il y a 10 ans 3 semaines par hayko00.
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