Beaujolais, un semi marathon qui ouvre l'appétit

8 septembre 2013, 16h40, je franchis la ligne de mon 1er ultra trail. Magnifique journée, beau classement, apothéose d'une belle saison de trail et de quelques milliers de km sur les sentiers. Et effondrement de la motivation.
On me propose les Templiers, on me tente avec des marathons : "toi qui a le foncier, vas y c'est pour toi. Tu vas cartonner".
Sans l'envie au fond de soi, je n'y crois pas une seconde.

Ma décision est assez vite prise de courir un semi à l'automne. je ne suis dispo que pour le beaujolais qui n'est pas le plus plat que l'on connaisse. Tant pis, c'est sur celui là que j'irai égaler ou battre mon chrono de 1h22'30" (3'54" au km)
L'objectif en soi n'est pas le semi mais bien le marathon de printemps, sans doute le dernier avant quelques années et je veux y aller chercher un chrono. Alors je vais profiter de ce semi pour faire des réglages avec JJ, un ami guide et préparateur physique qui me suit. Je teste un nouveau type d'entrainement pour moi : pas d'AS, du foncier d'abord, beaucoup, de la muscu très régulièrement, de la vitesse en fin de préparation et une séance dite "à la kenyane" que je fais 1, parfois 2 fois par semaine.

J'ai donc fait de gros volumes pour préparer ce semi. Si la tête avait suivi, j'étais sans doute près pour un marathon (pas MON marathon). entre 80 et 100 km par semaine, volume inimaginable il y a un an. Pas de blessure depuis 1 an et demi et je touche du bois. Pas mal de mes sorties font 20 bornes ce qui fait qu'un semi marathon n'est vraiment qu'une fraction de mon entrainement hebdo et on peut retourner le problème dans le sens où on veut, c'est un facteur important de réussite. quand une course n'est pas plus longue qu'un entrainement, on ne part pas dans l'inconnu. Un semi n'est pas la moitiéd'un marathon. loin de là.

Toujours est-il que l'on est jeudi, 10 jours avant la course et je suis éclaté , crevé, vanné, plus de jus. Les kenyane, les 10*3', les vma au club m'ont lessivé. On réadapte la fin de prépa et les cannes reviennent le mercredi avant la course. Ouf...
Je me suis fixé 3'52" au km comme objectif.
Au dernier moment on m'a demandé de remplacer un blessé dans l'équipe d'endurance shop; je vais essayer de faire honneur au maillot.

Il fait froid ce 23 novembre, il y a 30 km/h de vent; ça va pas être facile.
Mais c'est parti.
Je négocie le 1er km en 3'51"; on peut dire que je gère mais il y a beaucoup de monde devant; y'a même un gars déguisé en zorro qui vient de me passer à plus de 16 à l'heure. mais put...c'est quoi ce bordel !?
Pas de panique, les 2 km qui suivent montent ferme, il faut être vigilant. 3'52", 3'46" et 3'58" dans le fort raidillon (10%) de 500m. Trop rapide.
je le sais d'autant mieux que je me retrouve avec des mecs qui carburent un peu entre 1h17 et 1h21 pour ceux que je connais. Dans le lot il y a un bon trailer du coin, Yann Nourry. Il a pris du champ au 3ème mais dans la montée, je reprends tout le monde et me voilà en haut de la première bosse avec 60mde D+ dans la foulée de Yann. ça va vite, il part devant sur le replat. 5m...10 m

Beaucoup de vent de face. ... 15m
Je prends ma décision, j'accélère et reprends Yann pour me caler derrière lui à l'abri du vent. Je ramène en même temps le groupe qui a dû penser comme moi : on se fatiguera moins en allant plus vite mais en se protégeant. On amorce un long faux plat descendant : 3'42". Je trouve même le groupe un poil lent donc je relance en passant devant tout en me disant :
- mais t'es con ou quoi ? ça va trop vite et tu en remets une couche.
- bin ouais mais ça descend

je continue à suivre en 3'35" puis 3'39"; ça va vite et ça lâche derrière. Il y a Yann, 2 autres gars et moi derrière, juste derrière, me disant que je vais faire un carton au 10 km et exploser ensuite.

côté ravito, ma décision était prise avant le départ : je ne prends plus rien sur semi : ni eau ni sucre ni rien. Je trace. Et je vois que les mecs dans mes allures font pareil.

On passe dans le bois de Laye. Bel endroit. J'avais vécu un beau moment lors de mon marathpn du beaujolais il y a 3 ans. je m'en souviens. On a rejoint depuis 1 km le parcours du marathon et j'encourage des marathoniens qui finiront en 4h30 en gros. Beaucoup marchent; ce doit pas être simple de voir passer des gugusses encore frais à 16 à l'heure.
Putain, 16 à l'heure ; je suis à 16 à l'heure depuis bientôt 10 bornes. Je n'en reviens pas.

10ème klm, on rentre de nouveau dans le stade à Arnas. Je passe en 37'40" je crois, 40" de moins que l'an dernier.
Je suis bien et si je perds du terrain par rapport aux 3 devant, le fossé n'est pas un gouffre.
Je commence à croire que la course va bien se passer

Je continue sur mes routes d'entrainement en 3'38" puis 3'48" sur un faux plat montant qui me fait beaucoup plus souffrir à l'entrainement qu'aujourd'hui. Yann est toujours en lige de mire mais bon, il est parti
M'attendent les 3 fameux km de montée redoutés de tous les 8500 coureurs du 12, du semi et surtout du marathon. L'an dernier, trop vaillant, j'ai bloqué le diaphragme dans cette montée que j'ai dû finir à 5' au km.
Prudence donc.
Je ne regarde pas l'allure, je me dis que j'ai assez d'avance sur les prévisions pour sans aucun doute battre mo record assez largement. Je me fixe sur les collègues devant.
Et comme ça monte, je rattrappe ! 4'03, 4'10" j'ai presque récupéré Yann et un autre (le troisième est parti devant)

Long faux plat de 1,5 km et vent de face.
Même décision que tout à l'heure, je mets les watt (3'59") et recolle les deux pour me protéger. ils accélèrent. Je tiens.
Sommet ! Les 180m de D+ sont avalés; reste la descente raide et des faux plats. ça va le faire.
3'52"
3'32", 3'37" avec des pointes à plus de 18 km/h (ça descend je vous rassure) et même si Yann me dit de tenir, je lâche un peu. Paradoxalement je ne souffre pas, ni cardiaquement ni musculairement. J'ai du mal à suivre la cadence, la gestuelle, il me faudra encore briser un mur de vitesse vers les 18 km/h où je ne suis pas efficace et pas en ligne.

Bin oui, c'est mon regret au moment où je rédige ce CR . je crois que j'avais les moyens de suivre. Mes puls à ce moment là à 167-168 ne disent pas autre chose. Il faut les regarder malgré tout en course pour se botter le cul. Ne pas prendre la décision de se mettre dans le dur, c'est l'assurance de ne pas y aller. Alors oui, j'ai fini ce semi avec un grand plaisir. J'étais ma foi bien inconfortable avec aucun km en dessous de 3'46" jusqu'à l'arrivée mais ce fut un inconfort relatif, sans commune mesure avec l'engagement d'une fin de marathon ou l'intensité d'une fin de 10 km où on se dit "ces conneries doivent cesser et vite" .
Bon, je franchis la ligne en 1h20'05" en 12ème position. C'est fou, c'est inespéré et mes regrets sont en réalité infimes. J'ai eu un vrai plaisir à courir, à me sentir en forme, à profiter de la vitesse, à exploser mon record. je passe la ligne hyper satisfait et très frais. Dans 2 min, je vais rejoindre le gymnase avec les sacs en ne pouvant pas m'empêcher de trottiner; j'ai juste envie de faire 10 bornes de plus... pour le plaisir.

Je suis accueilli par David d'endurance shop qui attend tous ses coureurs sur la ligne dans le froid, avec un mot pour chacun; très sympa, très convivial. il est content pour moi, ça se voit. j'aime bien les gens qui se réjouissent des perfs des autres.
Allez, je crois que j'ai fait honneur à leur maillot ... je finis premier de mon équipe et mon équipe finit 2ème du classement
Il y a Fifi aussi sur la ligne; je suis content de le retrouver et d'apprendre qu'il a fait encore une perf sur ce marathon très difficile. Quelle classe !

Une belle journée qui sera arrosée au beaujolais nouveau comme il se doit.
ça y est; enfin, j'ai ENVIE de ce marathon de printemps ! Je sais que j'ai une chance pour les moins de 2h50. Il me restera à retrouver ma combativité naturelle qui se repose visiblement pendant que je progresse

Je vais devoir commander un dictionnaire des superlatifs tant j'ai l'impression de me répéter sur tes CR

Comme d'hab, je suivrai tes entrainements et courses avec attention (même si je ne suis pas sûr que soit tranbsposable à mon niveau )

En tout cas, Chapeau mon garçon ... tu progresses

Un très gros j'aime pour une très grosse perf !!!
Bravo pour cette magnifique course et pour cette droite à la Tyson sous coke que tu as mis à ta marque !!!!!!!!!!!

En tout cas, indépendamment de tes grosses qualités naturelles, tant physiques que psychologiques, tu viens de me conforter dans l'idée qu'un gros foncier est un vrai atout pour un semi. Lors de mon semi préparatoire du marathon de Metz, je fais 1h22 sans souffrir et sans partir ds l'idée de battre ma marque (ce que je ferais pourtant...).

Quand je préparerai mes prochains semi, je pense faire du volume de marathon, mais avec des AS de semi... Tu vois, le temps passant, on en revient au méthodes d'entrainement à l'ancienne...

NB : note pour moi : ta remarque sur le fait qu'à force de ne pas vouloir trop d'inconfort, on se brime et n'entre jamais réellement dans la zone... Sur 10, inévitablement, il m'arrive de me dire "mets en moins, détends toi"

Bref, je conclus : bravo !!!!!!!

Pffff....

je suis baba... et tellement impressionné, bref vraiment content pour toi. C'est ce genre de sensations en course qui donnent envies d'aller voir "plus loin" . Et à dire vrai ton cr m'a remis aussi un coup de boost pour mon entrainement hivernal, je crois que je vais "un peu" modifié mes plans

Pour finir , juste : Bravo

Bon, bah évidemment et comme d'habitude, bravo et merci de partager tout ça. C'est tout juste du rêve pour un gugusse de mon niveau (cette année, j'ai arraché le titre de champion du mètre carré où je suis assis).

robin écrit:

Je teste un nouveau type d'entrainement pour moi : pas d'AS, du foncier d'abord, beaucoup, de la muscu très régulièrement, de la vitesse en fin de préparation et une séance dite "à la kenyane" que je fais 1, parfois 2 fois par semaine.

Et j'imagine que ton foncier, tu le travailles sur un terrain plutôt vallonné, je me trompe?

frantz54123 écrit:

En tout cas, indépendamment de tes grosses qualités naturelles, tant physiques que psychologiques, tu viens de me conforter dans l'idée qu'un gros foncier est un vrai atout pour un semi.

Pareil par ici. Quand Robin cause, je prends des notes. Et quand je vois Seb 35 faire une SL de 20 bornes en prépa 10 km, je me dis que ces histoires de volume ont vraiment du sens.

Encore merci Robin!